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WASHINGTON/LE CAIRE, 10 novembre (Reuters) - Les Etats-Unis vont mettre fin au ravitaillement en vol des avions de la coalition militaire sous commandement saoudien qui intervient depuis 2015 au Yémen, ont annoncé samedi les autorités saoudiennes et américaines.

Dans un communiqué diffusé par l'agence de presse saoudienne, Ryad a précisé avoir demandé à Washington de mettre un terme au ravitaillement car la coalition arabe était en mesure de le faire de manière indépendante.

Le secrétaire d'Etat à la Défense, James Mattis, a soutenu cette décision et a indiqué que le gouvernement américain avait été consulté.

Mattis a également précisé que les Etats-Unis allait poursuivre leur rôle pour aider la coalition arabe et les forces yéménites à limiter les pertes civiles et à étendre le déploiement de l'aide humanitaire.

Cette annonce intervient dans un contexte de tensions autour du royaume saoudien, montré du doigt par la communauté internationale après le meurtre du journaliste et opposant saoudien Jamal Khashoggi le 2 octobre au consulat d'Arabie saoudite à Istanbul.

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont appelé fin octobre à la proclamation d'un cessez-le-feu au Yémen, où la coalition combat la rébellion houthie au prix de milliers de victimes et d'une grave crise humanitaire.

"Récemment, le royaume et la coalition ont accru leur capacité à mener au Yémen des vols de ravitaillement de manière indépendante. En conséquence, et en consultation avec les Etats-Unis, la coalition a demandé l'arrêt du soutien à ses opérations de ravitaillement pour ses opérations au Yémen", a indiqué le royaume saoudien dans un communiqué.

L'Arabie saoudite a une flotte de 23 appareils pour ses opérations de ravitaillement, dont six Airbus 330 MRTT utilisés pour le Yémen, tandis que les Emirats arabes unis ont également six Airbus 330 MRTT, a rapporté samedi la chaîne de télévision saoudienne Al Arabiya al Hadath.

Ryad possède en outre neuf Hercules KC-130 opérationnels, a-t-elle ajouté.

La décision annoncée de concert par Ryad et Washington vise sans doute à éviter que le Congrès américain prenne prochainement des mesures contre ces opérations de ravitaillement, comme il l'en a menacé.

Cependant, un arrêt de ces opérations n'aura guère d'impact sur le conflit, considéré comme une guerre de procuration entre l'Arabie saoudite et l'Iran, qui soutient les rebelles houthis, car seulement un cinquième des avions de combat de la coalition ont recours au ravitaillement opéré par les Américains.

LE PAM CRAINT UNE FAMINE MASSIVE

L'alliance sunnite conduite par l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis a annoncé vendredi le déclenchement d'une "vaste offensive" contre la rébellion houthie à Hodeïda.

Ce port de la mer Rouge, par où transitent 80% des importations alimentaires et de l'aide humanitaire au Yémen, constitue un lien vital pour des millions de Yéménites.

"L'escalade des attaques (...) de la coalition américano-saoudo-émiratie confirme que les appels américains à un cessez-le-feu ne sont que des paroles en l'air", écrit Mohamed Ali al Houthi, le chef de la rébellion, dans une tribune publiée vendredi par le Washington Post.

Cet appel à la trêve, poursuit-il, n'est qu'une tentative "de sauver la face après l'humiliation" provoquée par la mort de Jamal Khashoggi.

Le Programme alimentaire mondial a annoncé jeudi qu'il comptait doubler son assistance au Yémen, espérant venir en aide à 14 millions de personnes afin d'éviter une "famine massive".

Les frappes aériennes de la coalition, qui s'appuient sur l'armement et les renseignements des pays occidentaux, touchent fréquemment des écoles, des hôpitaux et des marchés et leurs victimes se comptent par milliers.

L'émissaire spécial des Nations unies pour le Yémen, Martin Griffiths, espère organiser des pourparlers de paix d'ici la fin de l'année.

Une tentative de négociations a échoué en septembre, en raison de l'absence d'une délégation houthie, qui affirme avoir été empêchée de se rendre en Suisse.

Le gouvernement yéménite, reconnu par la communauté internationale et soutenu par la coalition arabe, a accusé les Houthis d'avoir saboté les discussions. (Phil Stewart et Makini Brice, avec Nayera Abdallah Mahmoud au Caire; Arthur Connan et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)