* Réunion du Conseil de sécurité des Nations unies mardi

* Biden veut soutenir le rétablissement de la démocratie

* Le sort d'Aung San Suu Kyi inconnu après son arrestation

* La junte militaire dénonçait des fraudes électorales

2 février (Reuters) - Le parti de la dirigeante birmane Aung San Suu Kyi a appelé mardi à sa libération "aussi tôt que possible" et à la reconnaissance par la junte militaire de sa victoire lors des élections législatives de novembre, au lendemain d'un coup d'Etat largement condamné par la communauté internationale.

Plus de 24 heures après son arrestation, il était toujours impossible de savoir avec certitude où se trouvait la lauréate du prix Nobel de la paix en 1991.

Un dirigeant de sa formation, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), a déclaré avoir appris qu'elle était en bonne santé et n'avait pas été transférée du lieu où elle a été placée en détention lors du putsch des militaires.

Aung San Suu Kyi a été arrêtée lundi dans la capitale Naypyitaw avec plusieurs dizaines de ses alliés.

"Il n'y a aucun projet de transférer Daw Aung San Suu Kyi (et l'un de ses proches). Il a été appris qu'ils étaient en bonne santé", a écrit Kyi Toe, responsable de la LND, sur Facebook. Un précédent message indiquait qu'Aung San Suu Kyi se trouvait chez elle.

Kyi Toe a aussi affirmé que les parlementaires de la LND arrêtés lors du coup d'Etat étaient autorisés à quitter les quartiers où ils sont détenus. Reuters n'a pas été en mesure de le contacter pour obtenir des précisions.

Le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir ce mardi pour discuter des événements en Birmanie, un pays qui est sorti il y a dix ans tout juste d'un régime militaire au pouvoir pendant près d'un demi-siècle.

Les Etats-Unis ont menacé de réimposer des sanctions à l'encontre des militaires birmans. Le président américain Joe Biden, qui fait face à sa première crise internationale depuis sa prise de fonction, a qualifié le coup d'Etat d'attaque directe contre la transition de la Birmanie vers la démocratie et l'Etat de droit.

L'INTERVENTION ÉTAIT "INÉVITABLE", DIT LE CHEF DE LA JUNTE

Ce coup d'Etat intervient après la victoire écrasante de la LND d'Aung San Suu Kyi lors des élections législatives du 8 novembre, contestée par l'armée, la Tatmadaw, qui juge que le scrutin a été entaché de fraudes.

Le pouvoir a été transféré au commandant en chef de l'armée, le général Min Aung Hlaing, et l'état d'urgence décrété pour une durée d'un an. Afin de consolider son pouvoir, la junte militaire a démis de leurs fonctions 24 ministres et nommé 11 remplaçants pour diriger des ministères parmi lesquels les Finances, la Défense, les Affaires étrangères et l'Intérieur.

Lors de la première réunion mardi du gouvernement formé à la suite du putsch, Min Aung Hlaing a déclaré que la prise du pouvoir par les militaires était devenue inévitable, leurs accusations de fraude électorale n'ayant pas été prises en compte.

"Malgré les requêtes répétées de la Tatmadaw, cette voie a été choisie de manière inévitable pour le pays. Jusqu'à la formation du prochain gouvernement après les élections à venir, nous devons diriger le pays", a-t-il dit, selon des propos rapportés par le service de presse de l'armée.

Les militaires, dont les accusations de fraude ont été démenties par la commission électorale, se sont engagés à organiser des élections libres et équitables et à transférer le pouvoir aux vainqueurs, mais sans fournir de calendrier.

Dans un communiqué publié sur la page Facebook officielle d'un représentant du parti, le comité directeur de la LND a demandé la libération immédiate de tous les détenus, la reconnaissance des résultats des élections législatives et l'ouverture des travaux du nouveau Parlement qui devaient débuter lundi.

LA CHINE MESURÉE

Des appels à la désobéissance civique ont fleuri mardi sur les réseaux sociaux, tandis que des klaxons et des coups frappés sur des casseroles ont retenti dans Rangoun, la plus grande ville du pays, ont rapporté des journalistes de Reuters.

L'armée a mis en garde les médias et la population contre la propagation de ce qu'elle a qualifié de rumeurs sur les réseaux sociaux destinées à encourager des émeutes et l'instabilité.

Les rues birmanes sont néanmoins restées silencieuses durant la nuit de lundi à mardi alors qu'un couvre-feu est en place pour endiguer la propagation du coronavirus.

Les troupes et la police anti-émeute ont pris position à Naypyitaw et à Rangoun.

Mardi matin, les connexions téléphoniques et internet ont été rétablies mais l'aéroport international de Rangoun restera fermé jusqu'en avril voire mai, a dit son responsable à Reuters, sans fournir d'explication.

Les banques de la capitale économique ont rouvert après avoir interrompu leurs services la veille en raison d'une connexion internet défaillante et afin d'éviter des retraits massifs d'argent.

Outre les Etats-Unis, de nombreux pays ont condamné le coup d'Etat en Birmanie.

La Chine, pour sa part, a seulement indiqué avoir pris note des évènements et appelé les deux parties à respecter la Constitution. D'autres pays de la région, dont la Thaïlande voisine de la Birmanie, ont refusé de commenter des "affaires internes". (Rédaction de Reuters, rédigé par Stephen Coates, Robert Birsel; version française Blandine Hénault et Bertrand Boucey, édité par Jean-Michel Bélot)