Zurich (awp) - Le boulanger industriel Aryzta pourra procéder comme prévu à la hausse de capital de près de 800 millions d'euros afin de renflouer ses finances. Réunis jeudi en assemblée générale, les actionnaires ont donné leur feu vert à l'opération à une courte majorité. Après des mois de tensions, les dirigeants peuvent pousser un petit "ouf" de soulagement.

Au total, la hausse n'a récolté que 53% de votes favorables, alors qu'à peine plus de la moitié des droits de vote (50,54%) étaient représentés à l'assemblée. L'opération devrait permettre d'engranger un produit brut de 790 millions d'euros, un montant conforme à l'annonce initiale de mi-août.

La direction a désormais les coudées franches pour mettre en oeuvre les mesures destinées à réduire l'endettement et redresser l'entreprise.

"Nous allons maintenant concentrer nos efforts sur la stabilisation des activités et la mise à profit des opportunités de croissance avec nos clients", a déclaré le président du conseil d'administration Gary McGann en marge de l'assemblée. Et de préciser que "la hausse du flux de trésorerie disponible constituera la base du renforcement du bilan".

De son côté, le directeur général (CEO) Kevin Toland a mis l'accent sur les relations avec la clientèle. "Notre situation nous a empêché d'avancer avec nos clients", a-t-il reconnu. Il a par ailleurs confirmé que les objectifs formulés en août restaient de mise.

Le groupe avait alors indiqué viser une croissance organique de l'excédent brut d'exploitation (Ebitda) comprise entre 6-9% pour l'exercice décalé 2018/19, et à moyen terme une marge Ebitda de l'ordre de 12 à 14%.

Mea culpa des dirigeants

En préambule du vote, M. McGann a concédé que la situation de l'entreprise et le contexte de marché avaient été mal évalués. La direction du groupe pensait s'être constitué une base solide pour la poursuite de ses activités et que le marché avait atteint le creux la vague. "Visiblement, nous nous sommes trompés et avons sous-estimé les difficultés", a reconnu le dirigeant.

Actionnaire principal d'Aryzta, le gestionnaire d'actifs espagnol Cobas - détenteur de près de 15% des droits de vote - n'a pas caché sa déception face au résultat du scrutin. "Nous acceptons la décision, mais allons considérer quelles mesures additionnelles serviront le mieux les intérêts de l'entreprise", a-t-il fait savoir par voie de communiqué.

Opposé à la hausse de capital dans sa forme actuelle, il avait milité en faveur d'une solution alternative afin d'atténuer l'effet de dilution, proposant une augmentation de capital de seulement 400 millions d'euros, assortie de cessions d'actifs non stratégiques à hauteur de 250 millions.

Dans la matinée, le groupe helvético-irlandais a détaillé les contours de l'augmentation de capital. Celle-ci prévoit l'émission de plus de 900 millions d'actions nominatives d'une valeur nominale de 0,02 franc l'unité, qui seront proposées à 1 franc aux actionnaires actuels.

Les actionnaires existants se verront offrir dix droits de souscriptions préférentiels par action détenue au 6 novembre après la clôture de la Bourse. A compter du lendemain, la nominative Aryzta sera traitée hors droits de souscription.

Les droits de préemption pourront être exercés entre le 7 et le 15 novembre midi. Passé ce délai, les titres n'ayant pas trouvé preneur feront l'objet d'une offre aux investisseurs institutionnels et privés, dont le prospectus devrait être publié "autour du 2 novembre".

Le premier jour de cotation sur les Bourses suisse (SIX) et irlandaise (Euronext Dublin) est attendu pour le 19 novembre.

Du pain sur la planche

Dans un commentaire, la Banque cantonale de Zurich (ZKB) estime que la dilution qu'entraînera la hausse de capital - par rapport à la capitalisation boursière actuelle avoisinant les 840 millions de francs suisses - est le "moindre mal" au vu du risque de perte totale pour les actionnaires.

La recommandation de pondération au marché reste de mise, même si la banque estime que le titre n'est "pas approprié" pour les investisseurs privés du fait des risques élevés.

Plus sévère, Vontobel estime que maintenant que la hausse de capital a passé la rampe, la direction d'Aryzta va se retrouver sous une pression intense pour mettre ses projets à exécution. La banque privée recommande de se défaire du titre et a placé son objectif de cours sous révision.

Après avoir annoncé avant l'ouverture de la séance la suspension de l'action Aryzta de la cotation, l'opérateur SIX Swiss Exchange a autorisé la reprise des échanges à partir de 12h30. A la clôture, l'action chutait de 20,0% à 7,51 francs suisses, dans un SPI en hausse de 0,04%.

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