Les actionnaires, réunis en assemblée générale extraordinaire quelques jours seulement après la nouvelle incarcération à Tokyo de l'ancien président de Nissan, ont exprimé leur désarroi et leur inquiétude.

Carlos Ghosn nie toutes les accusations portées contre lui et affirme être victime d'un complot de la part du conseil de Nissan. Libéré le 6 mars contre le versement d'une caution de neuf millions de dollars après 108 jours de détention, il est à nouveau sous les verrous depuis jeudi, soupçonné d'enrichissement personnel aux dépens de Nissan.

Le directeur général de Nissan Hiroto Saikawa qui s'exprimait devant les actionnaires pour la première fois depuis le début de l'affaire en novembre dernier, a commencé par présenter des excuses.

Il a aussi expliqué qu'avant de céder sa place à la tête du groupe, il ferait en sorte de stabiliser Nissan. Ce qui prendra du temps, a-t-il ajouté.

"Ce n'est pas un problème que nous pourrons régler du jour au lendemain. Nous devons accomplir la tâche (d'améliorer la gouvernance) et préparer l'entreprise pour les prochaines étapes, puis passer le flambeau de la direction", a-t-il dit.

Les débats ont parfois été agités, interrompus par des interventions critiques dans la salle, où étaient rassemblés 4.100 actionnaires, presque un record.

"JE SUIS TRÈS MÉFIANT"

Les actionnaires ont voté en faveur de la révocation du conseil d'administration de Nissan de Carlos Ghosn et de son ancien bras droit Greg Kelly, accusé de complicité. Greg Kelly nie également toutes les accusations portées contre lui.

Les actionnaires ont aussi approuvé la nomination en tant qu'administrateur du président de Renault Jean-Dominique Senard, une élection qui était attendue pour apaiser les craintes concernant l'avenir de l'alliance automobile franco-japonaise, dont il est président de droit.

A la tribune, Jean-Dominique Senard a souligné l'importance de l'alliance. "Je proposerai constamment les meilleures évolutions possibles dans le cadre de l'alliance", a-t-il dit. "Nous voulons assurer à Nissan l'avenir qui convient."

La chute de Carlos Ghosn, qui était l'un des dirigeants d'entreprises les plus connus dans le monde, semble avoir laissé certains actionnaires de Nissan perplexes.

"La situation semble aller plus loin qu'il n'y paraît sur la base des informations dont on dispose", a ainsi déclaré l'actionnaire Roberto Montoya, âgé de 68 ans. "Je suis très méfiant et la plupart des gens le sont."

Les avocats de Carlos Ghosn ont affirmé que l'arrestation de leur client la semaine dernière était une tentative de le museler, car l'ancien patron devait prendre la parole le 11 avril lors d'une conférence de presse.

Le Club de la presse étrangère au Japon (FCCJ) a annoncé sur son site internet qu'il diffuserait mardi une déclaration vidéo de Carlos Ghosn.

Hiroto Saikawa a déclaré que Nissan envisageait de réclamer des dommages et intérêts à Carlos Ghosn pour inconduite financière présumée. Il a également déclaré aux actionnaires qu'il n'était pas question de lui verser d'indemnités de rupture.

Carlos Ghosn fait l'objet de poursuites au pénal pour avoir omis de déclarer environ 82 millions de dollars (environ 73 millions d'euros) de rémunérations et pour avoir transféré temporairement à Nissan des pertes financières personnelles durant la crise financière mondiale. Ce qu'il dément.

(Avec Maki Shiraki, Arthur Connan et Dominique Rodriguez pour le service français, édité par Benoît Van Overstraeten)

par Naomi Tajitsu