convaincre les cadres

PARIS (awp/afp) - "Par la fenêtre ou par la porte": en octobre 2006, les dirigeants de France Télécom expliquaient, sans filtre, aux cadres de l'entreprise réunis en convention comment atteindre l'objectif de 22.000 départs, un moment-clé dans le dossier examiné par le tribunal de Paris.

La deuxième semaine du procès pour "harcèlement moral" de France Télécom et de ses ex-dirigeants s'est achevée vendredi par une plongée dans la réunion de l'ACSED, l'association des cadres supérieurs et dirigeants. C'était le 20 octobre 2006, huit mois après l'annonce de 22.000 départs sur trois ans. Le PDG Didier Lombard parlait à un public conquis et n'a donc pas mâché ses mots.

Les discours ont donné lieu à deux retranscriptions: le compte-rendu officiel et une version officieuse, transcription mot à mot d'un enregistrement audio qui a été détruit.

"Il faut qu'on sorte de la position mère poule. (...) Ce sera un peu plus dirigiste que par le passé", déclarait le PDG, jugé aujourd'hui dix ans après une vague de suicides dans l'entreprise. "En 2007, je ferai les départs d'une façon ou d'une autre...", ajoutait-il. Et dans le compte-rendu complet qui n'a pas été rendu public, la phrase se terminait ainsi: "... par la fenêtre ou par la porte".

Le numéro 2 de l'entreprise, Louis-Pierre Wenes, évoquait lui un "impératif": "Faire vite, faire vite, faire vite". Et il lançait aux cadres appelés à mettre en oeuvre les suppressions de postes: "Je me refuse à faire le boulot des autres. Je compte sur vous!"

"On ne va pas faire dans la dentelle", complétait le DRH Olivier Barberot. "J'aurai échoué si on ne fait pas les 22.000 départs".

La secrétaire de l'ACSED avait ensuite rapidement envoyé aux cadres un compte-rendu de la convention. "J'ai enlevé quelques mots, à la marge", a-t-elle expliqué vendredi au tribunal. "J'ai enlevé le terme +plan social+, je savais qu'il était très polémique".

Elle a surtout retiré l'expression "par la fenêtre ou par la porte". "Je savais qu'il fallait la retirer. C'est une phrase qu'on ne prend pas au pied de la lettre. C'est une expression triviale", a ajouté l'ex-secrétaire.

Egalement enlevée: une expression d'Olivier Barberot. "On va faire partir la colle". "C'était le lien entre les employés et France Télécom. Il y avait un lien affectif", explique-t-elle.

Mais ces retraits n'ont pas suffi: même expurgé, le compte-rendu avait mis le DRH dans une colère noire et les dirigeants de l'ACSED avaient demandé à la secrétaire de supprimer l'enregistrement, ce qu'elle avait aussitôt fait.

Les prévenus s'expliqueront sur ces faits lundi à 13H30.

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