En ce début d’année 2016 marqué par une profonde défiance vis-à-vis du secteur bancaire, ses membres ne disposent d’aucune marge d’erreur lors de la publication de leurs résultats. Société Générale en fait l’amère expérience et voit son action chuter de 12,64% à 27,445 euros, soit son plus bas niveau depuis juillet 2013. Elle a désormais perdu plus d’un tiers de sa valeur depuis le 1er janvier alors que le secteur a été pénalisé par les craintes à propos de son exposition au pétrole, du niveau des créances douteuses italiennes et par des résultats décevants (Deutsche Bank, Credit Suisse…).

Ceux dévoilés ce matin par Société Générale n'ont pas non plus été à la hauteur des attentes. Sur les trois derniers mois de 2015, son bénéfice net a bien progressé de 19,5% à 656 millions d'euros mais le consensus était plus élevé : 814 millions d'euros. Le produit net bancaire a, lui, reculé de 1,7% à 6,053 milliards d'euros.

Si le résultat net a profité d'une plus-value de 147 millions d'euros liée à la cession d'Amundi il a souffert d'une provision pour litige bien plus importante que prévu. Elle s'est élevée à 400 millions d'euros, soit le double de ce qui était attendu selon Kepler Cheuvreux. Comme d'habitude, la banque n'a pas précisé à quel litige elle était affectée. Le directeur général a tenté de rassurer les investisseurs en déclarant qu'il "n'y a rien de nouveau sur les litiges existants", selon Reuters. Société Générale fait notamment l'objet d'une enquête des autorités américaines pour savoir si elle a violé les règles d'embargo à l'égard de certains pays.

Sur l'ensemble de l'année, la banque a vu son résultat net part du groupe augmenter de 49,3% à 4 milliards d'euros pour des revenus en augmentation de 8,8% à 25,64 milliards.

Outre des résultats plus faibles que prévu, les investisseurs sanctionnent l'impossibilité pour Société Générale de confirmer son objectif d'une rentabilité des fonds propres de 10% à la fin de l'année contre 8,1% en 2015. La banque a mis en cause l'environnement économique et financier et l'augmentation des exigences en capital.

A ce sujet, la banque de la Défense a dévoilé un ratio de fonds propres durs en hausse de 80 points de base sur un an à 10,9% et supérieur de 10 points de base au consensus. Elle a atteint avec un an d'avance son objectif de 11% et ce ratio est aussi déjà plus élevé que le niveau de 9,75% exigé par les autorités européennes cette année. Le ratio de levier a, lui, atteint 4% à fin décembre, en ligne avec l'objectif de 4% à 4,5% à fin 2016.

Dernière mauvaise nouvelle, la banque versera un dividende de 2 euros par action au titre de 2015, un niveau inférieur au consensus (2,09 euros), mais bien supérieur à celui de 2014 (1,20 euro).


AOF - EN SAVOIR PLUS
Les points forts de la valeur
- Banque universelle opérant dans la banque de détail, en France (numéro 3, soit 35 % des revenus) et en Europe de l’est essentiellement, et dans la banque de financement ;
- Positions de leader sur des segments en croissance comme les dérivés actions, les produits structurés et la gestion passive et amélioration des performances dans la Banque d’investissement grâce au contrôle des coûts et à la division « fixed income » ;
- Recentrage sur la banque de détail (les 2/3 des revenus) et sur la banque de financement et d'investissement d’où un redressement continu de la rentabilité depuis trois ans ;
- Remontée du ratio de "Common Equity Tier One" à 10,1 %, au-dessus des 9 % exigé par Bâle 3 et, pour le ratio de levier (bilan rapporté aux fonds propres), à 3,6 %, au-delà des 3 % requis ;
- Impact positif sur le bilan de la politique de « Quantitative easing » de la BCE ;
- Bilan solide qui sera renforcé par la cession prochaine des 20 % détenus dans la société de gestion Amundi.

Les points faibles de la valeur
- Forte sensibilité boursière à l’évolution de la crise grecque, partagée par toutes les valeurs bancaires ;
- Montée en puissance des banques en ligne et craintes sur l’arrivée dans l’offre de crédit des géants de l’internet ou des télécoms ;
- Morosité du réseau français, impacté par les changements réglementaires sur les commissions et incertitudes sur l’exécution du plan de réduction du réseau d’agences en France ; ;
- Forte présence en Russie via la filiale Rosbank et en Roumanie, deux foyers de pertes, d’où une défiance des investisseurs à l’égard de la réussite du plan Ambition 2016 ;
- Décote boursière par rapport à ses pairs.

Comment suivre la valeur
- Dans le contexte actuel, la valorisation des banques dépend de 5 points : leurs positions de liquidités, leur capacité à satisfaire au ratio de solvabilité dit « Bâle 3 » égal à 9 % des fonds propres, le contrôle de leurs engagements en banque d’investissement, la centralisation des compensations de dérivés et, enfin, les décisions des Banques centrales -Fed américaine et BCE européenne ;
- En contexte « normal », la valorisation dépend de 2 points : le coût du risque, lui-même lié à l’environnement économique et le rendement des fonds propres ou ROE ;
- Avancées en Afrique, continent auquel seront consacrés 4 Mds€ d’investissements, avec un objectif de croissance annuelle moyenne de 7 % des revenus jusqu’en 2016 ;
- Montée en puissance de l’activité en ligne, portée par Boursorama qui vise 1,5 million de clients en 2020 ;
- Exécution du « Plan Ambition SG 2016 » : résultat opérationnel supérieur à 10 %, croissance des revenus de 3 % par an et bénéfice par action de 6 €, et enveloppe de 4 Mds€ pour soutenir la croissance ;
- Interrogations sur la stratégie impulsée par Lorenzo Bini Smaghi, président du conseil d’administration depuis mai 2015 ;
- Capital éclaté dont les salariés sont les premiers actionnaires avec 7,61 % des actions et 12,47 % des droits de vote.

Finance - Banques
Le secteur bancaire réduit la voilure. Après RBS, Credit Suisse, UBS, ou encore Deutsche Bank, c'est le géant britannique HSBC, qui a annoncé un nouveau plan stratégique visant à réduire ses effectifs, d'ici à 2017, de 50.000 employés. Le FMI a mis en garde contre les faiblesses persistantes des banques européennes. Il estime que leurs créances douteuses s'élèvent encore à plus de 900 milliards d'euros. Dans toutes les régions du globe, des vulnérabilités bancaires ont été soulignées par le FMI. En Chine le secteur bancaire subit une exposition excessive à l'immobilier, qui représente 20% de ses créances. Aux Etats-Unis, le FMI craint que la remontée annoncée des taux d'intérêt, après sept ans de taux proches de zéro, n'ait pas encore été prise en compte par les investisseurs.