1. Le Parlement européen doit-il ratifier l'accord d'investissements UE-Chine ?

Si le vote sur l'accord sur la facilitation des investissements entre l'Union européenne et la Chine se tenait demain, ma réponse est claire : ce serait un non. La conclusion politique de cet accord le 30 décembre dernier correspond au commencement d'un nouveau et long processus. Une fois tous les éléments négociés à notre disposition, l'analyse rigoureuse doit se dérouler et c'est dans cette logique que je me situe et je m'engage. Il ne s'agit pas d'être dans la posture et dans l'idéologie, mais bien créer des leviers d'actions efficaces notamment et spécifiquement pour pousser la Chine à mettre fin à des situations injustifiables et au travail forcé.

Mes attentes tant sur le texte que sur le contexte sont donc nombreuses. Rappelons que l'objectif de l'Union européenne vise à rééquilibrer notre relation commerciale avec la Chine, à assurer plus de réciprocité et à remédier à une concurrence déloyale. Je ne suis pas encore convaincue que cet accord réponde à nos objectifs et qu'il défende nos intérêts économiques.

Sur le contexte, nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la politique ultra-répressive et de violation permanente des droits de l'homme que la Chine mène. Ouïghours, Hong-Kong, Tibet : Cet accord ne peut se faire au prix de notre silence. S'il est vrai que cet accord inclut, et c'est une première pour un accord d'investissement, un chapitre avec des dispositions sur le développement durable, notamment en matière de lutte contre le changement climatique. La Chine a pris des engagements très faibles et qui ne sont que déclaratoires sur sa volonté d'avancer vers une ratification des conventions de l'OIT, notamment celles relatives au travail forcé. Je ne peux pas me satisfaire de déclarations !

Les zones d'ombre sont nombreuses, je demande à la Chine et à la Commission d'agir pour que le brouillard se dissipe, sans cela, le compte n'y sera pas.

2. Votre position peut donc évoluer. Pensez-vous que la Chine puisse répondre favorablement à vos exigences ?

Évoluer, seulement si j'ai des réponses précises et que les moyens de contrôle sont effectifs. Nous sommes déterminés à ce que la Chine s'engage avec un calendrier clair et contraignant pour la ratification des conventions de l'OIT. Mais ne soyons pas dupes, la ratification d'une convention n'est pas suffisante : une signature n'éradiquera pas à elle-seule les pratiques inadmissibles de travail forcé.

C'est pour cela que j attends également beaucoup de la Commission européenne ainsi que du Conseil.

Cet accord sur la facilitation des investissements ne permettra certainement pas à lui seul de répondre à tous ces enjeux. Il est temps pour nous d'utiliser nos instruments et d'en créer de nouveau. La volonté politique de l'Union européenne et des États membres d'agir de front doit être claire et déterminée. Il est par exemple temps que la Commission propose aux Etats membres d'utiliser le nouveau régime mondial de sanctions pour mettre à mal les responsables de ces violations des droits de l'homme.

Et d'autres leviers doivent voir le jour : il est temps que la législation ambitieuse sur le devoir de vigilance pour interdire l'importation des biens issus du travail forcé soit en place. Ou encore : le renforcement de notre mécanisme de filtrage des investissements étrangers, la création d'instrument ambitieux sur les effets de distorsion causés par les subventions étrangères, la mise en place d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières pour lutter contre le dumping environnemental chinois.

3. Refus de signer en l'état avec le Mercosur, l'accord d'investissements UE-Chine, etc. Le libre-échange est-il dépassé ?

J'ai une certitude si notre politique commerciale n'est pas en adéquation avec nos valeurs, nos objectifs et nos intérêts, nous ferons face à de plus en plus de difficultés. Je crois que la Commission a entendu nos préoccupations. Dans sa nouvelle stratégie commerciale, elle a ainsi intégré nombreuses priorités que nous portons, nous délégation Renaissance, avec le gouvernement et le Président de la République.

L'objectif européen ne peut plus être de multiplier les accords mais bien de nous assurer que les engagements pris par nos partenaires soient mis en œuvre. C'est un enjeu essentiel pour la confiance des citoyens. Il en va de notre efficacité et de notre crédibilité.

Construction de notre autonomie stratégique, verdissement de la politique commerciale et affirmation de l'Europe comme véritable puissance sont les maîtres-mots des nouvelles orientations de la Commission. Il faut le traduire concrètement.

Assurer la cohérence est la clé. Cela signifie que notre politique commerciale doit contribuer au Pacte vert européen et à la lutte contre le changement climatique, promouvoir les droits de l'homme et des standards sociaux élevés ainsi que défendre sans naïveté nos intérêts.

Voilà le combat que je mène depuis mon arrivée au Parlement européen, avec la délégation Renaissance : passer du libre-échange au juste-échange !

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En Marche published this content on 27 February 2021 and is solely responsible for the information contained therein. Distributed by Public, unedited and unaltered, on 26 February 2021 22:28:53 UTC.