Jérusalem (awp/afp) - Des dirigeants du monde entier ont appelé dimanche à la retenue après l'attaque massive de drones et de missiles menée dans la nuit par l'Iran contre Israël, en réponse à une frappe contre son consulat à Damas qu'il lui impute, une opération qui fait craindre un embrasement régional.

Cette première attaque directe jamais menée par la République islamique contre le territoire israélien a été "déjouée", a annoncé le porte-parole de l'armée israélienne Daniel Hagari. "La campagne n'est pas encore terminée, nous devons rester en état d'alerte", a martelé le ministre de la Défense Yoav Gallant.

Dans la foulée, le chef des forces armées iraniennes, Mohammad Bagheri, a salué une attaque qui "a atteint tous ses objectifs". Lui emboitant le pas, le président Ebrahim Raïssi a déclaré que la "punition de l'agresseur s'est réalisée", prévenant Israël que toute riposte "imprudente" à cette attaque donnerait lieu à une réponse militaire beaucoup "plus forte".

A la demande d'Israël, le Conseil de sécurité de l'ONU va se réunir en urgence dimanche. Son chef, Antonio Guterres, a condamné "une grave escalade", à l'instar de nombreux pays comme la France et l'Allemagne qui craignent un embrasement régional.

"Nous ne voulons pas d'escalade. Nous ne voulons pas d'une guerre étendue avec l'Iran", a déclaré dimanche après-midi le porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison Blanche, John Kirby, sur la chaîne de télévision américaine NBC.

Plus tôt, le président américain Joe Biden, qui a renouvelé son soutien "inébranlable" à Israël, a annoncé la tenue d'une réunion du G7 afin de coordonner une "réponse diplomatique unie" à l'attaque iranienne.

Parallèlement à l'attaque iranienne, des alliés de Téhéran, le Hezbollah libanais et les rebelles yéménites houthis, ont tiré des roquettes et des drones en direction du territoire israélien.

L'attaque iranienne est intervenue alors qu'Israël est engagé depuis plus de six mois dans une guerre contre le Hamas palestinien dans la bande de Gaza.

99% des tirs interceptés

"Avec les Etats-Unis et d'autres partenaires, nous avons réussi à défendre le territoire de l'Etat d'Israël", s'est félicité le ministre israélien de la Défense.

"Nous avons intercepté 99% des tirs vers Israël", a indiqué pour sa part Daniel Hagari. Israël a annoncé la réouverture dimanche matin de son espace aérien, de même que la Jordanie et le Liban, pays voisins d'Israël, ainsi que l'Irak, frontalier de l'Iran.

Selon l'armée israélienne, l'Iran a "lancé un essaim de 300 drones tueurs, des missiles balistiques et des missiles de croisière". Seuls quelques missiles balistiques "sont entrés et ont touché légèrement" une base militaire, qui reste en activité, a affirmé Daniel Hagari.

L'agence officielle iranienne Irna a fait état elle, de "sérieux dégâts dans la plus importante base aérienne du Néguev (sud)".

Outre plusieurs blessés légers, une jeune fille de 7 ans originaire d'une communauté bédouine dans le sud d'Israël a été placée en soins intensifs, a indiqué M. Hagari.

L'attaque iranienne est une réponse à la frappe le 1er avril qui a détruit le consulat iranien à Damas et coûté la vie à sept membres des Gardiens de la révolution, dont deux hauts gradés. L'Iran a accusé Israël de cette frappe, mais ce dernier n'a ni confirmé ni démenti.

Peu avant 02h00 dimanche matin (23h00 GMT samedi), une série de détonations a figé Jérusalem. Le ciel s'est piqué de lumières rouges et jaunes filmées par l'AFP, et par de nombreux habitants qui ont partagé les images sur les réseaux sociaux. Une heure environ après l'annonce de l'opération iranienne, baptisée "Promesse honnête", l'agence Irna a indiqué qu'"une première vague de missiles balistiques" avait été lancée "en profondeur" du territoire israélien.

"Désamorcer la situation"

Dans la foulée, Téhéran a appelé les Etats-Unis à rester à l'écart de son conflit avec Israël. "Il s'agit d'un conflit entre l'Iran et le régime voyou israélien, dont les Etats-Unis DOIVENT RESTER À L'ECART!", a déclaré la mission iranienne à l'ONU sur X.

L'Iran a amené "en toute conscience" le Moyen-Orient "au bord du précipice", a accusé dimanche la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, en référence à une éventuelle contre-attaque israélienne.

La crainte d'un embrasement régional est dans toutes les têtes. L'Egypte a mis en garde contre un "risque d'expansion régionale du conflit", l'Arabie saoudite a appelé à "la plus grande retenue" et l'Irak "à ne pas étendre la situation".

Même préoccupation hors du monde arabe. Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a appelé au "calme", disant travailler avec les alliés britanniques à un "désamorçage" de la situation. La Russie a également appelé à la "retenue".

Signe du climat inflammable dans la région, la France a annoncé dimanche recommander à ses ressortissants de quitter temporairement l'Iran. Depuis Rome, le pape François a lancé un "appel pressant" contre "une spirale de violence risquant d'entraîner le Moyen-Orient dans un conflit encore plus grand".

Face aux condamnations occidentales, l'Iran a annoncé convoqué les ambassadeurs du Royaume-Uni, de France et d'Allemagne.

"Pas d'accord humanitaire" à Gaza

Samedi, les forces spéciales maritimes des Gardiens de la révolution ont saisi un navire accusé d'être "lié" à Israël, avec 25 membres d'équipage à bord, dans les eaux du Golfe.

Téhéran, qui ne reconnaît pas l'existence d'Israël, est un allié du Hamas, auteur le 7 octobre d'une attaque sanglante sans précédent sur le sol israélien qui a provoqué une offensive israélienne dévastatrice à Gaza, où 33.729 personnes, essentiellement des civils, ont péri, selon le mouvement islamiste palestinien.

Le Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007, est classé groupe terroriste par les Etats-Unis et l'Union européenne.

Son rejet de la proposition de trêve soumise par les médiateurs montre que le chef du Hamas dans la bande de Gaza, Yahya Sinouar, "ne veut pas d'accord humanitaire, ni le retour des otages", a estimé le Mossad israélien dans un communiqué dimanche.

L'attaque des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël a entraîné la mort de 1.170 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir des données officielles. Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent détenues à Gaza dont 34 sont mortes, d'après des responsables israéliens.

afp/rp