* Reprises d'entreprises en forte baisse entre 2013 et 2016

* Un enjeu pour l'emploi, la productivité et la compétitivité

* Les dispositions de la loi Pacte n'inverseront pas la tendance

PARIS, 14 mai (Reuters) - Les cessions-transmissions de sociétés ont nettement ralenti en France ces dernières années, ce qui menace le renouvellement du tissu économique dans un contexte de vieillissement des chefs d'entreprise, suggèrent les conclusions de l'Observatoire BPCE, présentées mardi.

Selon les résultats de cette étude, le nombre de cessions-transmissions d'entreprises a baissé d'un tiers en trois ans, passant de plus de 76.000 opérations en 2013 à moins de 51.000 en 2016 dans une période de faible croissance économique.

Sur ce total, environ 40.000 opérations ont concerné des TPE (très petites entreprises de moins de dix salariés), sachant que cette analyse ne prend pas en compte les professions libérales et microentrepreneurs (ex-autoentrepreneurs).

S'y ajoutent 11.000 reprises de PME (petites et moyennes entreprises, dix à 249 salariés) et ETI (entreprises intermédiaires de 250 à 4.999 salariés).

D'après les premiers éléments disponibles sur la période post-2016, "la cession-transmission des PME continue à plutôt mal se porter sur la période 2017-2018" alors que les ETI trouvent en général assez facilement des repreneurs, a précisé lors d'une conférence de presse Alain Tourdjman, directeur des études économiques du groupe BPCE, qui a coordonné cet observatoire.

Cette chute du nombre de cessions-transmissions d'entreprises est d'autant plus inquiétante que ces opérations constituent un "enjeu majeur pour la compétitivité et la productivité de la France", a souligné Nicolas Namias, directeur général Finance et stratégie du groupe BPCE.

Il s'agit "également d'un enjeu en matière d'emploi", a-t-il poursuivi en soulignant que les 51.000 opérations recensées en 2016 ont concerné un total de près de 770.000 salariés.

EXCEPTION POUR LES TRANSMISSIONS FAMILIALES

La seule modalité de cession à avoir échappé à la tendance baissière sur la période 2013-2016 est la transmission familiale, qui a représenté 22% des cessions de PME et ETI en 2016.

Mais cette note positive n'éclipse pas les problèmes persistants du passage de relais en fin d'activité professionnelle, dont l'accentuation conduit les auteurs de l'étude à évoquer une véritable "urgence économique" posant "un risque majeur pour l'avenir du tissu de PME français."

Contrairement à une idée répandue, l'arrivée des baby-boomers à l'âge de la retraite ne se traduit pas par une grande vague de cessions, au contraire.

Même si la reprise d'entreprise reste davantage une question de taille de la société que d'âge du chef d'entreprise, le recul du nombre de cessions-transmissions de PME et ETI sur la période récente a plus particulièrement touché les sociétés dont le dirigeant est âgé.

Ainsi, le taux de cession d'entreprises dont les dirigeants ont plus de 65 ans a reculé de quatre points entre 2013 et 2016, tandis que le repli s'est limité à 1,8 point pour les chefs d'entreprise quadragénaires.

La combinaison du vieillissement accru de la population des chefs d'entreprises, d'une probabilité de cession nettement moindre au-delà de 65 ans et de la tendance au sous-investissement des dirigeants les plus âgés se solde par "une accumulation d'opérations qui ne se font pas", a expliqué Alain Tourdjman.

Dans un contexte général plutôt orienté vers la promotion de la création d'entreprise que de la reprise, cela pourrait donc à terme entraîner la disparition pure et simple de nombreuses PME avec un risque réel de "perte de compétitivité du tissu productif des PME en France" à l'échelle macroéconomique, a-t-il prévenu.

Si l'économiste de la BPCE a salué les mesures favorisant destinées à favoriser les cessions d'entreprises aux salariés et les transmissions familiales inscrites dans la Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises), adoptée le mois dernier, il s'est montré plus mesuré sur leur impact.

"Je ne vois pas ces mesures comme étant d'une ampleur suffisante pour inverser la tendance" à la baisse des cessions-transmissions d'entreprises "et surtout pour répondre à l'enjeu (...) du vieillissement et du déficit de cession en fin d'activité professionnelle", a-t-il déclaré.

(Myriam Rivet, édité par Elizabeth Pineau)