Washington (awp/afp) - L'embellie de l'emploi en juillet aux Etats-Unis devrait donner un signal à la Banque centrale américaine (Fed) pour resserrer son soutien à l'économie, et annoncer le rythme auquel elle envisage de réduire ses achats d'actifs.

Près d'un million d'emplois (943.000) ont été créés le mois dernier, et le taux de chômage est tombé à 5,4%.

"Ces données (...) correspondent à ce que la Réserve fédérale recherche pour prendre la décision de réduire les achats d'actifs", explique l'économiste Diane Swonk, de Grant Thornton.

La Fed injecte chaque mois sur les marchés 120 milliards de dollars de liquidités, via l'achat de 80 milliards de bons du Trésor et 40 milliards de MBS (produits financiers adossés à des prêts immobiliers). Cela a permis de fluidifier le crédit et de pousser les taux à la baisse pour aider la reprise économique.

Pour laisser la première économie du monde voler de nouveau de ses propres ailes, la Banque centrale veut voir des progrès "substantiels" vers ses deux objectifs: le plein emploi et la stabilité des prix.

Le marché du travail peinait ces derniers mois à se relever, mais les prix, eux, ont bondi. La hausse a été de 4% sur un an, selon l'indice PCE, dépassant largement l'objectif de 2% à long terme.

Ces évolutions paradoxales ont placé la Fed dans une position très inconfortable, puisqu'il aurait fallu réduire les achats d'actifs pour empêcher une inflation trop forte. Mais cela aurait alors pu peser sur le redressement du marché du travail.

"La reprise de l'emploi arrive à un moment où la Fed doit sérieusement envisager de réduire ses achats d'actifs pour éviter une flambée inutile de l'inflation", observe encore Diane Swonk.

Septembre ou novembre ?

La Fed avait fait comprendre, la semaine dernière à l'issue de sa réunion monétaire, que les discussions étaient en cours, sans toutefois donner de précision, indiquant qu'elle continuerait à "évaluer les progrès lors des prochaines réunions".

Le rapport sur l'emploi de juillet pourrait ainsi n'être que "le premier de plusieurs rapports sur l'emploi solides (qui lui seront) nécessaires", relève Lydia Boussour, d'Oxford Economics.

Elle estime que "le marché du travail étant susceptible de se renforcer davantage au cours des prochains mois", le Comité monétaire "est sur la bonne voie pour commencer la réduction progressive (...) début 2022".

L'un de ses gouverneurs, Christopher Waller, avait dit, lundi, que la réduction pourrait débuter dès octobre si le marché de l'emploi continue de s'améliorer.

Cela supposerait une annonce en août ou en septembre, car la Fed veut présenter son calendrier avant de lancer le mouvement. Les prochains chiffres de l'emploi, qui seront publiés le 3 septembre, seront donc déterminants.

Mais la propagation du variant Delta pourrait ralentir le redressement.

"Nous n'excluons pas complètement la possibilité d'une décision en septembre", lors de la prochaine réunion, estime Krishna Guha, économiste pour Evercore, qui privilégie cependant novembre.

Jackson Hole

"Bien que cela puisse être plus tôt, nous voyons la Fed annoncer une réduction des achats lors de la réunion du FOMC de novembre", anticipe également Rubeela Farooqi, cheffe économiste pour High Frequency Economics.

D'ici là, de premiers indices pourraient émerger de la réunion mondiale des banquiers centraux, les 26 au 28 août à Jackson Hole dans le Wyoming (ouest), avec notamment le discours très attendu du président de la Fed, Jerome Powell.

D'autres économistes en revanche, misent sur une attitude plus attentiste: "je pense que la Fed est prête à laisser l'économie tourner à plein régime pendant une période prolongée et à ne pas paniquer si l'inflation reste élevée", commente ainsi l'économiste indépendant Joel Naroff.

En effet, souligne-t-il, "il est beaucoup plus facile de ralentir la croissance que de l'accélérer lorsque les taux sont si bas, surtout si les aides massives du gouvernement disparaissent".

Les taux directeurs se trouvent en effet toujours dans une fourchette de 0% à 0,25%, brutalement abaissés en mars 2020. Ils ne devraient pas en bouger avant 2023, selon les estimations données par le comité monétaire après sa réunion de juin.

afp/rp