(Actualisé avec détails des funérailles § 6-7)

par Patricia Velez et Terry Wade

CARACAS, 7 mars (Reuters) - Tendant le poing ou faisant le signe de croix, près de deux millions de Vénézuéliens ont continué jeudi à défiler devant la dépouille du président Hugo Chavez, qui a succombé mardi à 58 ans au cancer contre lequel il luttait depuis deux ans.

Le cercueil ouvert du "comandante" a été déposé mercredi dans l'imposante Académie militaire de Caracas, après une longue procession suivie par la foule dans les rues de la capitale.

Soldats en treillis, officiers en grand uniforme, ministres ou habitants des bidonvilles sont venus rendre un dernier hommage au chantre de la "révolution bolivarienne", dont les obsèques solennelles seront célébrées vendredi en présence de nombreux chefs d'Etat étrangers.

Chaque participant n'a disposé que de quelques secondes pour adresser un message d'adieu à l'ancien chef de l'Etat, vêtu de l'uniforme et du béret rouge qu'il portait lors de son adresse à la nation en 1992 qui avait lancé sa carrière politique.

La dépouille a été déposée dans un cercueil de bois simple, protégé par une vitre et orné de fleurs et du drapeau vénézuélien.

Le vice-président Nicolas Maduro, qui assure l'intérim, a annoncé jeudi que Chavez serait embauné et que sa dépouille serait ensuite inhumée au musée militaire de Caracas.

Il a également décrété une prolongation de sept jours supplémentaires de la période du deuil national afin de permettre à tous les Vénézuéliens de lui rendre un dernier hommage.

Tous les participants ont juré de rester fidèles aux idéaux défendus par Chavez durant ses quatorze années à la tête du pays et de soutenir sans faille celui qu'il a désigné comme son successeur, Nicolas Maduro, lors de l'élection présidentielle prévue normalement d'ici un mois.

"C'est à nous de poursuivre la révolution et de faire ce que Chavez nous a demandé - soutenir Maduro", déclarait Trinidad Nunez, 40 ans, devant le bâtiment où repose la dépouille du défunt président.

Beaucoup éclataient en sanglots en arrivant devant le cercueil.

"Je lui ai dit de ne pas s'inquiéter, que Nicolas Maduro sera bien le nouveau président comme il l'a demandé", raconte Maria Fernandez, une infirmière de 51 ans.

FUNÉRAILLES NATIONALES

La prochaine élection devrait voir s'opposer Maduro, un ancien syndicaliste de 50 ans, et le chef de l'opposition Henrique Capriles, 40 ans, gouverneur centriste de l'Etat de Miranda battu par Chavez lors du scrutin d'octobre dernier.

Pour mener campagne, il se pourrait que Maduro doive renoncer à son rôle actuel de président par intérim, qui pourrait échoir à un neveu de Chavez, le ministre des Sciences Jorge Arreaza.

Des sources ont confirmé à Reuters que l'opposition a décidé d'apporter à nouveau son soutien à Capriles qui avait rassemblé 44% des suffrages lors de la présidentielle fin 2012.

Les enquêtes d'opinion donnent une confortable avance à Maduro, le dauphin désigné par Chavez avant sa mort mais qui ne possède pas le charisme de son mentor.

Les diplomates étrangers et les marchés internationaux s'attendent à une victoire de l'actuel vice-président et à une poursuite de la politique menée par son prédécesseur, au moins à court terme.

Le gouvernement n'a toujours pas annoncé où le "comandante" serait inhumé.

De nombreux Vénézuéliens pensent que ce sera dans sa ville natale de Sabaneta, au coeur de la région des Llanos. D'autres veulent qu'il repose dans l'imposant mausolée qu'il a fait édifier à Caracas pour abriter les restes de Simon Bolivar, le héros de l'indépendance au XIXe siècle.

A Cuba, le pays allié où Chavez a été opéré quatre fois pour son cancer, le deuil est aussi profond. "Je ne peux pas retenir mes larmes", dit Omara Lahera, une habitante de La Havane devant un grand portrait de Chavez sur la place de la Révolution. "Sa mort nous a surpris mais il vit toujours dans nos coeurs."

Les dirigeants de Bolivie, du Paraguay et d'Argentine sont déjà à Caracas et assisteront aux obsèques vendredi.

"Chavez a aidé tous les peuples d'Amérique latine, il s'est battu pour l'intégration et il appartient désormais à notre Histoire", a dit la présidente argentine Cristina Fernandez. (Avec Marianna Parraga à Caracas, Rosa Tania Valdes à La Havane, Helen Popper à Buenos Aires; Guy Kerivel et Pierre Sérisier pour le service français)