Francfort (awp/afp) - Les risques d'un retournement rapide des taux et des prix de marché demeurent malgré la conjoncture robuste en zone euro, ont estimé mercredi la Banque fédérale allemande et la BCE dans deux rapports distincts.

L'économie allemande traverse sa huitième année consécutive de croissance, les entreprises et ménages peuvent se financer dans des conditions idéales et les marchés naviguent en eaux tranquilles, souligne la Bundesbank.

Mais plus les phases d'expansion économique sont longues, plus "il se peut que les dangers qui sont devant nous soient ignorés", a averti la vice-présidente de la Bundesbank, Claudia Buch, devant la presse à Francfort.

Dans un environnement où de nombreux placements obtiennent des notes très élevées et où les bilans des banques et assurances sont gorgés d'actifs financiers faiblement rémunérés, "les acteurs du marché sont vulnérables à des évolutions imprévues."

"Des risques liés à des réévaluations, des variations des taux d'intérêt et des pertes de crédit peuvent intervenir simultanément et se renforcer réciproquement", a-t-elle mis en garde.

Les caisses d'épargne et autres établissements, dont le modèle d'activité traditionnel de transformation des dépôts en crédits est mis à mal durant la période de taux bas, souffriraient davantage d'une remontée rapide des taux d'intérêt, estime la Bundesbank. La situation des fonds propres des établissements s'est toutefois notablement améliorée depuis la crise financière de 2008, nuance-t-elle.

Concernant la zone euro, la Banque centrale européenne souligne aussi la robustesse de la conjoncture mais prévient du risque de changements abrupts des prix d'actifs sur les marchés (actions, obligations). Cela pourrait être lié à la matérialisation de "risques géopolitiques", sans les nommer, de même qu'à des "changements d'appréciation par les investisseurs de l'inflation et de la croissance futures", a précisé son vice-président Vitor Constancio.

La BCE s'inquiète en outre de la viabilité d'entreprises non financières déjà fragiles, si les taux d'intérêt devaient augmenter sans que s'améliorent les conditions économiques.

En zone euro, les craintes portent déjà sur la rentabilité insuffisante des banques les moins importantes en taille et le fait qu'une bonne proportion soit lésée par d'importants paquets de prêts en souffrance.

La stabilité du système financier allemand ne sera, elle, affectée que si les taux augmentent "plus rapidement et fortement que prévu", a estimé Andreas Dombret, membre du directoire de la Bundesbank en charge de la surveillance bancaire.

Un tel scénario augmenterait le coût de refinancement pour les banques, tandis que leurs portefeuilles de prêts à long terme continueraient à peu rapporter, avec pour conséquence une rapide dégradation des marges.

Le secteur bancaire allemand est déjà en bas de l'échelle en Europe avec un rendement des fonds propres de 2,1% en 2016, rappelle la Bundesbank.

afp/rp