Lucerne (awp) - Après une reprise post-pandémique vigoureuse, les ventes de bière sont reparties à la baisse en 2022/23, un repli que l'Association suisse des brasseries (ASB) met sur le compte d'un contexte économique morose, marqué par la hausse des prix et miné par les incertitudes géopolitiques.

Au cours de l'année brassicole écoulée - du 1er octobre 2022 au 30 septembre 2023 - le marché de la bière suisse a enregistré une contraction de 2,5% à 4,57 millions d'hectolitres (hl). Dans un communiqué diffusé mardi, la faîtière des brasseurs relativise toutefois ce recul, l'exercice 2021/22 ayant bénéficié d'un fort effet de rattrapage après la pandémie de Covid-19.

L'évolution est également sensiblement différente s'agissant de la production nationale (-1,2%) ou des importations (-7,0%), dont la part frôle désormais le cinquième (21,3%) alors qu'elle représentait plus d'un quart (26,1%) il y a une dizaine d'années. L'engouement du public helvétique pour la bière sans alcool s'est une nouvelle fois confirmé: avec une hausse de 5,3% à près de 280'000 hl, ce segment constitue désormais 6,1% du marché, contre 5,8% en 2021/22.

"La peur de l'inflation, la hausse des primes d'assurance maladie, les coûts élevés de l'énergie et la situation géopolitique incertaine pèsent sur le moral des consommateurs", avance le président de l'ASB Nicolò Paganini. A cela s'ajoute un euro plus bas que jamais, qui stimule le tourisme d'achat, ainsi qu'une météo capricieuse, qui a limité les occasions de consommer en extérieur au printemps, et que l'été indien n'a pas suffi à compenser.

Nouvelles habitudes

En conférence de presse, le conseiller national saint-gallois a évoqué un "changement générationnel" dont témoigne le lent déclin de la "culture du stammtisch". Nombre d'amateurs du breuvage houblonné dégustant désormais celui-ci de manière plus sélective, notamment comme accompagnement de mets, on assiste à un intérêt croissant pour la qualité des produits.

L'élu du Centre a salué l'arrivée au sein de la faîtière de pas moins de cinq nouvelles brasseries, dont deux romandes - à Fribourg et Martigny - portant le total à 40. Et de rappeler que l'ASB a fixé comme condition d'adhésion un seuil de production de 1000 hl par an, ce qui exclut la plupart des quelque 1200 brasseries artisanales enregistrées auprès de la Confédération.

De son côté, le directeur de l'ASB Marcel Kreber a indiqué qu'avec une consommation annuelle de 55 litres par habitant en moyenne, la Suisse se situe dans le tiers inférieur du classement avec ses voisins européens.

Interrogés sur l'évolution des revenus et des prix au cours des douze derniers mois, les responsables ont botté en touche. "Les coûts sont toujours une problématique importante", en raison notamment des besoins énergétique considérables de la branche et de la raréfaction de certains ingrédients en raison de la guerre en Ukraine, a indiqué M. Paganini.

Selon les dernières données sur l'inflation (IPC) publiées par l'Office fédéral de la statistique (OFS) le renchérissement de la bière sur un an s'est monté à 2,4% dans la restauration et à 3,8% dans le commerce de détail en octobre, alors que ces valeurs dépassaient 7% avant l'été.

L'ASB, dont les membres représentent 98% de la production brassicole suisse, revendique un chiffre d'affaires annuel cumulé pour l'ensemble de la branche de "plus d'un milliard de francs suisses". En 2022, les consommateurs de bière ont payé environ 320 millions de francs suisses à la Confédération en impôt sur la bière et en TVA.

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