KARACHI, Pakistan, 1er novembre (Reuters) - Des islamistes radicaux ont bloqué les routes des principales villes du Pakistan pour la deuxième journée consécutive jeudi, en guise de protestation contre la décision de la Cour suprême d'annuler en appel mercredi la condamnation à mort prononcée contre la chrétienne Asia Bibi.

Une formation islamiste radicale, Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP), a aussitôt organisé des manifestations et bloqué des rues dans les grandes villes du pays, tout en appelant ses partisans à assassiner les trois juges qui ont annulé la condamnation à mort d'Asia Bibi.

Selon un journaliste de Reuters, environ 200 manifestants se sont réunis sous de larges tentes établies sur deux routes de Karachi.

Lors d'un discours, un membre du TLP a exhorté ses partisans à incendier des pneus si la police parvenait à éteindre les feux propagés au préalable.

Asia Bibi, mère de quatre enfants, a été en 2010 la première femme au Pakistan à être condamnée à la peine capitale par pendaison pour blasphème. Rejetant cette accusation, elle avait fait appel de cette décision devant la Cour suprême.

Il lui était reproché d'avoir tenu des propos critiques envers l'islam quand des voisins lui avaient demandé de ne pas boire de l'eau dans le même verre qu'eux parce qu'elle était chrétienne.

Son cas a provoqué l'indignation des chrétiens du monde entier et a semé la division au sein de la société pakistanaise, où deux hommes politiques qui avaient pris position en sa faveur ont été assassinés.

Le Premier ministre Imran Khan a prévenu les manifestants que le gouvernement interviendrait en cas de blocus prolongé.

"Nous ne permettrons aucun dommage. Nous ne permettrons pas que le trafic automobile soit bloqué", a-t-il déclaré dans une allocution télévisée en fin de soirée mercredi. "Je vous le demande, ne contraignez pas l'Etat à agir", a-t-il ajouté.

Le chef du TLP, Mohamed Afzal Qadri, a déclaré lors d'un rassemblement à Lahore que les trois juges de la Cour suprême méritaient d'être tués.

Il a aussi demandé la démission du gouvernement et le soulèvement des soldats de l'armée contre leur chef, l'influent général Qamar Javed Bajwa.

Hafiz Saeed, considéré par les Etats-Unis comme le cerveau des attaques à Bombay qui ont fait 166 morts en 2008, a appelé à manifester.

En novembre 2017, le TLP avait organisé le blocus d'Islamabad, la capitale, à la suite d'une légère modification dans un serment religieux, ce qu'il avait interprété comme un cas de blasphème.

Sept personnes avaient trouvé la mort et plus de 200 autres avaient été blessées dans des affrontements avec les forces de police, et les partisans du TLP ne s'étaient dispersés qu'après avoir passé un accord avec l'armée. (Syed Raza Hassan; Jean Terzian pour le service français)