B9-0148/2020

Résolution du Parlement européen sur une action coordonnée de l'Union pour combattre la pandémie de COVID-19 et ses conséquences

(2020/2616(RSP))

Le Parlement européen,

- vu l'évaluation des risques de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur l'épidémie de COVID-19, qui fait état d'un risque de propagation et d'un risque d'impact très élevé de la COVID-19 au niveau mondial et qualifie la COVID-19 de pandémie,

- vu le plan stratégique de préparation et de riposte de l'OMS pour lutter contre le nouveau coronavirus,

- vu l'évaluation rapide des risques liés à l'épidémie de coronavirus réalisée par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) et ses mises à jour,

- vu le dernier rapport sur les menaces liées aux maladies contagieuses (CDTR) de l'ECDC et ses lignes directrices en matière de santé publique liées à la COVID-19,

- vu la décision nº 1082/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontières graves sur la santé et abrogeant la décision nº 2119/98/CE[1],

- vu la décision nº 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l'Union[2],

- vu la charte sociale européenne révisée du Conseil de l'Europe, du 3 mai 1996,

- vu le socle européen des droits sociaux (SEDS) proclamé par le Parlement, le Conseil et la Commission en novembre 2017,

- vu la déclaration des ministres des finances de l'Union européenne sur le pacte de stabilité et de croissance au regard de la crise de COVID-19, du 23 mars 2020,

- vu la proposition de règlement du Conseil portant création d'un instrument européen de soutien temporaire à l'atténuation des risques de chômage en situation d'urgence (SURE) à la suite de la pandémie de COVID-19, présentée par la Commission le 2 avril 2020 (COM(2020)139),

- vu la note préliminaire d'évaluation de l'Organisation internationale du travail (OIT) du 18 mars 2020 intitulée: «Le COVID-19 et le monde du travail: Répercussions et réponses»,

- vu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (pacte budgétaire),

- vu les déclarations de la Banque centrale européenne des 12 et 18 mars 2020[3],

- vu la baisse des taux directeurs opérée par la Réserve fédérale américaine le 3 mars 2020[4],

- vu la déclaration de l'Eurogroupe du 4 mars 2020[5],

- vu la déclaration du Conseil européen du 26 mars 2020[6],

- vu l'évaluation économique intermédiaire de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), du 2 mars 2020[7],

- vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

- vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

- vu la résolution de l'Assemblée générale des Nations unies intitulée «Solidarité mondiale dans la lutte contre la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19)»,

- vu le rapport mis à jour de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement sur le choc de la COVID-19 pour les pays en développement,

- vu sa résolution du 28 novembre 2019 sur l'urgence climatique et environnementale[8],

- vu l'article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que le nouveau coronavirus, signalé pour la première fois à Wuhan en décembre 2019 et désormais connu sous le nom de coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2 (SRAS-CoV-2), conjointement avec sa maladie associée, la COVID-19, s'est désormais propagé dans le monde entier et que la COVID-19 a été officiellement qualifiée de pandémie;

B. considérant que les systèmes de santé publics sont soumis à de fortes pressions pour assurer une prise en charge adéquate de tous les patients; qu'ils reçoivent de moins en moins de financement et sont négligés, en raison des processus de libéralisation et de privatisation, d'une part, et des mesures d'austérité de droite, d'autre part; qu'ils sont par conséquent moins à même de fonctionner, que ce soit dans des situations normales ou d'exception, comme celle que nous connaissons actuellement avec la pandémie de COVID-19; considérant qu'il existe une pénurie inquiétante de lits d'unités de soins intensifs, d'équipements de protection individuelle, de médicaments et de dispositifs médicaux dans tous les États membres; que cette pénurie se rencontre à des degrés fort divers d'un État membre à un autre;

C. considérant que la pandémie de COVID-19 a mis en évidence les conséquences des politiques néolibérales de l'Union et l'absence de coordination et de solidarité entre les États membres en période de crise sanitaire, qui ont également retardé les mesures nécessaires pour soutenir les États membres qui connaissent de graves difficultés et stimuler la relance économique et sociale; que l'Union n'a pas réussi à promouvoir une stratégie commune de lutte contre le virus afin d'éviter une concurrence entre les États membres en ce qui concerne les ressources limitées dans le domaine de la santé;

D. considérant que l'OIT a déclaré que la crise économique et de l'emploi accélérée par la pandémie de COVID-19 pourrait entraîner, au niveau mondial, la perte de 195 millions d'emplois à plein temps au deuxième trimestre 2020;

E. considérant que la pandémie de COVID-19 a eu un impact considérable et perturbateur sur les systèmes économiques des États membres et a provoqué des perturbations de la société, notamment eu égard aux groupes vulnérables ainsi qu'aux revenus et aux droits des travailleurs; que la couverture des négociations collectives recule dans l'ensemble de l'Union;

F. considérant que la Banque centrale européenne s'est engagée à mettre en place un programme d'achats d'urgence face à la pandémie, d'une valeur de 750 milliards d'euros, pour racheter des titres de dette publique et privée, ce qui permettra d'alléger en partie la dette publique pendant la crise, ainsi que 120 milliards d'euros de mesures d'assouplissement quantitatif et 20 milliards d'euros de rachat de dettes;

G. considérant que la Commission a décidé d'activer la clause dérogatoire générale aux règles en matière de déficit prévue dans le pacte de stabilité et de croissance, afin d'essayer d'encourager les dépenses publiques des États membres, mais qu'elle n'a pas abrogé le pacte;

H. considérant qu'aussi bien l'épidémie elle-même que la crise économique et sociale qui en résulte sont des problèmes mondiaux; qu'aujourd'hui plus que jamais, la concurrence doit être remplacée par la solidarité et la coopération au niveau mondial;

I. considérant que le changement climatique et la perte continue de biodiversité et la destruction des habitats naturels au niveau mondial accroissent considérablement les risques de zoonoses; que l'épidémie de COVID-19 ne doit en aucun cas être prise comme excuse pour justifier des retards dans la lutte contre l'urgence climatique et environnementale; qu'il sera urgent de rebâtir notre société et notre économie dans une perspective sociale et écologique après l'épidémie;

J. considérant que les mesures prises par les gouvernements devraient toujours respecter les droits fondamentaux de chacun; que ces mesures devraient être nécessaires, proportionnées et temporaires;

K. considérant que le Parlement hongrois a adopté, le 30 mars 2020, une loi octroyant à M. Viktor Orbán et à son gouvernement un mandat parlementaire pour gouverner par décret à durée indéterminée et la possibilité d'imposer des sanctions pouvant aller jusqu'à cinq ans d'emprisonnement à des journalistes couvrant la pandémie;

L. considérant que l'introduction ou la prolongation des contrôles aux frontières intérieures porte atteinte au droit à la libre circulation et à l'espace Schengen dans son ensemble; que les restrictions des déplacements ne sauraient affecter le droit de demander asile et doivent respecter les obligations liées à l'accès à la protection internationale, en particulier le principe de non-refoulement, ainsi que les droits fondamentaux, comme en dispose l'article 4 du code frontières Schengen;

M. considérant que, depuis le 17 mars 2020, des camps se trouvant sur les cinq îles de la mer Égée sont soumis au confinement, forçant ainsi quelque 40 000 demandeurs d'asile se trouvant dans ces centres fortement surpeuplés à vivre dans des conditions inhumaines et dégradantes, et les exposant par conséquent ainsi à un risque encore plus élevé de contracter la COVID-19; que la COVID-19 fait également courir un risque important aux personnes se trouvant dans des centres de rétention préalable à l'éloignement; que les migrants sans papiers font partie des personnes les plus exposées à la COVID-19 et les moins protégées, puisque les soins de santé primaires sont, dans la plupart des États membres, inaccessibles aux migrants en situation irrégulière;

Crise sanitaire

Garantir une prise en charge et un approvisionnement en biens essentiels

1. déplore les décès associés à la COVID-19, exprime toute sa sympathie pour les proches des victimes, les patients souffrant actuellement de la maladie à coronavirus 2019 et ceux qui se trouvent en quarantaine ou en confinement, et exprime toute sa solidarité avec les pays et régions les plus touchés de par le monde;

2. salue et remercie les professionnels de santé qui ont travaillé sans relâche et dans des conditions particulièrement difficiles pour lutter contre la propagation du virus et traiter les patients atteints de COVID-19; demande aux États membres de veiller à ce que leurs systèmes de santé disposent de suffisamment de ressources, d'équipements de protection et de personnel; apprécie et salue les efforts consentis par tous les autres travailleurs essentiels qui ont permis à notre société de continuer de fonctionner, en risquant leur santé et celle de leurs proches; reconnaît que, dans de nombreux cas, ce sont précisément ces personnes qui ont connu des difficultés, des remises en cause de leurs salaires et de leurs droits, y compris à la suite des recommandations et des politiques néolibérales de l'Union, et souffert d'un manque de reconnaissance pendant de nombreuses années; demande d'accorder une attention toute particulière au secteur agroalimentaire, qui dépend fortement du travail saisonnier de migrants; demande de défendre les droits et d'augmenter les salaires et la protection sociale de tous les travailleurs, à la mesure du développement de la technologie et de la production; réclame une amélioration substantielle des conditions de vie et de travail de tous les travailleurs et de leurs familles;

3. déplore la réaction tardive de l'Union dans la lutte contre la pandémie et s'inquiète vivement du manque de solidarité dont font preuve certains États membres et l'Union elle-même à l'égard des personnes les plus touchées par la crise; insiste sur la nécessité d'une coordination et d'une planification efficaces au niveau de l'Union, qui impliquent une meilleure allocation des ressources existantes en vue d'aider les pays qui en ont le plus besoin ainsi que la mobilisation des secteurs public et privé en vue de produire des masques, des respirateurs, des tests et des médicaments, et de les partager entre eux, afin d'inverser les dépendances qui ont été mises au jour dans le contexte de l'épidémie et d'apporter un soutien aux systèmes de santé nationaux aux différents stades de la pandémie, en formulant notamment des orientations sur les mesures que doivent prendre les autorités nationales ainsi que les collectivités régionales et locales; demande à tous les États membres qui en ont les moyens d'envoyer leurs médecins, infirmières et ressources médicales dans les régions les plus touchées et d'accueillir des patients issus de ces régions;

4. s'inquiète vivement de la pénurie de fournitures d'équipements de protection individuelle (EPI), de kits de test, de dispositifs médicaux et de médicaments aux niveaux mondial, européen et national, laquelle résulte des politiques de réduction des stocks et d'externalisation de leur production en dehors de l'Union et des différents États membres; souligne que cette pénurie de fournitures est particulièrement inquiétante dans le cas des professionnels des soins médicaux et sociaux qui sont en première ligne dans la lutte et en contact direct avec les patients, ainsi que dans le cas des groupes économiquement vulnérables; demande aux États membres de faire preuve de solidarité et de garantir la mise à disposition d'EPI destinés aux travailleurs de la santé dans l'ensemble de l'Union; se félicite des procédures conjointes de passation de marchés accélérées que la Commission a lancées avec les États membres, et demande à la Commission et aux États membres de présenter un plan visant à développer les secteurs de production stratégique de chaque État membre de manière coordonnée et cohérente; demande aux États membres de nationaliser ou de réquisitionner les sites de production lorsque cela s'avère nécessaire pour produire tous les dispositifs médicaux nécessaires; demande à la Commission de tirer pleinement parti de toutes les possibilités qu'offre le mécanisme de protection civile de l'Union pour garantir un approvisionnement adéquat à l'avenir;

5. insiste sur l'importance d'une livraison rapide de tous les produits et dispositifs médicaux; demande que soient immédiatement ouverts des points de passage frontaliers pour les voies réservées aux camions transportant ces produits et dispositifs médicaux, et que ces véhicules se voient accorder la priorité absolue sans délai;

6. s'inquiète de la protection des travailleurs non essentiels qui devraient cesser de travailler pendant le confinement; demande aux États membres de suspendre les activités non essentielles; demande à la Commission de coordonner une démarche commune entre les États membres et de dresser une liste des activités essentielles qui doivent se mener en quarantaine moyennant des EPI en suffisance, et de conseiller à tous les autres travailleurs de rester chez eux;

7. demande l'adoption d'une démarche coordonnée de l'après-confinement dans l'Union afin d'éviter une résurgence du virus; prie instamment les États membres d'élaborer conjointement des critères pour la levée de la quarantaine ainsi que des autres mesures d'urgence, et de lever ces mesures de manière coordonnée, en ayant pour principe directeur la préservation de la vie humaine;

8. demande aux États membres de s'efforcer d'améliorer la coopération, la planification et l'interconnexion entre eux en matière de systèmes de soins de santé; propose la mise en œuvre d'un système renforcé de reconnaissance mutuelle des paiements directs entre les différents systèmes de santé des États membres; demande la mise en place d'un cadre sanitaire coordonné afin d'assurer la coopération entre les États membres ainsi que la mise en œuvre de politiques solides; demande à l'Union d'apporter un soutien aux systèmes nationaux de santé publique, dans le respect des compétences et de la souveraineté nationales; demande à la Commission de coordonner une démarche commune visant à remédier aux défaillances des systèmes de soins de santé que la crise liée à la maladie à coronavirus 2019 a mises en évidence, en contribuant notamment à l'élaboration de normes communes solides en matière de soins de santé; demande la création d'un Fonds de santé visant à soutenir davantage les milliers de dirigeants régionaux et locaux qui luttent pour offrir des services de santé publique au niveau local;

9. s'inquiète vivement de la manière dont la pandémie de COVID-19 a perturbé l'accès aux services essentiels de santé sexuelle et génésique et a entravé la capacité des autorités des États membres à réagir à la violence à caractère sexiste;

10. demande aux États membres de prendre en compte le fait que de nombreux travailleurs de la santé pourraient être traumatisés par les événements actuels, et de garantir des soins appropriés; demande à la Commission de mettre à disposition les fonds nécessaires pour renforcer la protection des structures et unités de soins de santé physique et mentale, et de mener des campagnes d'information ainsi que de sensibilisation du public afin de soutenir tous les citoyens, en particulier les groupes vulnérables exposés à l'incertitude, à l'isolement et à la violence;

11. insiste sur l'importance des travaux du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) ainsi que de l'Agence européenne des médicaments (EMA); demande à la Commission et aux États membres de veiller à ce que des ressources suffisantes soient mises à la disposition de l'ECDC et de l'EMA, tant aujourd'hui que dans le futur cadre financier pluriannuel (CFP), notamment en ce qui concerne leurs effectifs; rappelle que les précédentes réductions de vingt salariés à temps plein de l'ECDC devraient à tout le moins être immédiatement annulées; souligne que le personnel devrait de préférence être permanent plutôt que contractuel; demande à la Commission et aux États membres de renforcer le rôle et les compétences de l'ECDC afin de garantir une meilleure application de ses recommandations et orientations;

12. insiste sur la nécessité d'une évaluation approfondie de l'épidémie de COVID-19 et de la réaction à la pandémie aux niveaux mondial, européen et des États membres, afin de tirer les enseignements des échecs des politiques néolibérales et ainsi que des politiques d'austérité et de renforcer les systèmes de santé publique dans leur dimension tant curative que préventive, afin que ces systèmes soient mieux équipés et suffisamment financés pour faire face à une épidémie à l'avenir; insiste sur l'importance de la collecte de données non personnelles actualisées et pertinentes à cet égard;

13. se félicite de l'allocation de 47,5 millions d'euros à la recherche, nécessaire et urgente, sur la mise au point d'un vaccin contre la maladie à coronavirus 2019, son traitement et son diagnostic, de manière à empêcher la propagation du coronavirus; souligne qu'il importe de disposer de fonds communautaires suffisants pour la préparation et la réaction à l'épidémie de COVID-19, qu'il s'agisse de l'EVAg (European Virus Archive - GLOBAL), du projet PREPARE ou encore du réseau de collaboration mondiale en matière de recherche pour la préparation aux maladies infectieuses (GloPID-R);

14. demande à la Commission, dès lors que des fonds publics européens sont investis dans la recherche, de veiller à ce que les résultats de ces travaux ne soient pas soumis à des droits de propriété intellectuelle et que les patients bénéficient de la garantie d'un tarif abordable pour les produits développés à partir de ces recherches; insiste sur l'importance des activités et des institutions publiques de recherche et de développement ainsi que de la coopération au niveau international, tout en exprimant ses inquiétudes quant au rôle dominant des multinationales dans le secteur pharmaceutique; prie instamment toutes les entreprises pharmaceutiques de mettre en commun leurs données et leurs connaissances dans le cadre d'un effort collectif visant à détecter, à tester, à développer et à fabriquer des traitements destinés à enrayer la maladie;

15. demande à la Commission et aux États membres d'éviter les erreurs commises par le passé, tenant au fait qu'après la survenue de l'épidémie de SRAS, la recherche d'un vaccin avait été négligée, alors que la poursuite de la recherche aurait pu accélérer considérablement les efforts actuels visant à trouver un vaccin, les deux virus étant étroitement liés; demande que la recherche actuelle sur les vaccins ne s'interrompe pas une fois l'épidémie de COVID-19 terminée;

16. souligne que c'est par le renforcement de l'offre publique de soins de santé universels que l'on peut le mieux lutter contre les épidémies mondiales et protéger nos sociétés, et insiste sur le fait que la santé publique devrait être entre les mains du secteur public ou du secteur non marchand afin de ne pas dépendre du marché; demande la constitution de sociétés pharmaceutiques publiques; demande que les systèmes de soins de santé publics soient préservés et que leur financement soit substantiellement augmenté afin de garantir un accès universel à des hôpitaux de qualité, à des structures d'accueil pour les personnes âgées, à des services de santé et à des médicaments offerts et produits localement, et demande que les droits des personnes handicapées soient respectés; déplore que le pacte de stabilité et de croissance et les recommandations spécifiques par pays formulées dans le cadre du Semestre européen aient conduit les États membres à revoir à la baisse le financement de leurs systèmes de santé en vue d'atteindre les critères de convergence nominaux; demande à tous les États membres de mettre un terme aux réductions budgétaires et d'investir massivement dans leurs systèmes de santé publique, y compris lors de la survenue de la crise économique à venir;

Crise sociale

Sauver l'emploi, les revenus et la protection sociale

17. prend acte de la proposition de la Commission du 2 avril 2020 en vue d'un règlement du Conseil sur l'instrument SURE; demande que le nouvel instrument garantisse les emplois, les salaires et les droits du travail des travailleurs; regrette, cependant, que l'instrument SURE demeure un mécanisme volontaire et que son financement revête uniquement la forme de prêts - et non de subventions publiques - levés sur les marchés financiers, ce qui permettra aux banques privées de profiter de la crise et alourdira la dette des États membres; souligne que le recours à cet instrument ne devrait pas se traduire par une perte de revenus pour les travailleurs;

18. demande aux États membres de faire pleinement usage du Fonds social européen et du Fonds européen d'ajustement à la mondialisation afin d'atténuer l'impact de la crise pour les travailleurs licenciés et les groupes les plus vulnérables; invite la Commission à préparer immédiatement des mesures d'urgence pour éviter l'interruption des programmes au titre du Fonds social européen et du Fonds européen d'ajustement à la mondialisation le 31 décembre 2020 au cas où un accord sur le CFP ne pourrait être conclu dans les temps;

19. invite les États membres à investir dans les services publics d'intérêt général, en particulier dans la santé, l'éducation, l'accueil des enfants, les soins aux personnes âgées et les maisons de repos, la prise en charge des personnes sans domicile et le logement, afin d'atténuer la crise sociale et d'améliorer la vie des groupes défavorisés, y compris les personnes exposées au risque de pauvreté ou d'exclusion sociale;

20. demande aux États membres d'interdire les expulsions et de permettre à tous les chômeurs, ainsi qu'aux emprunteurs à revenu faible ou moyen de suspendre les remboursements des emprunts immobiliers et les versements de loyer pour la durée de la crise lorsqu'ils sont confrontés à des difficultés financières, et ce, sans frais bancaires supplémentaires;

21. invite les États membres à promouvoir le dialogue social et la négociation collective dans la gestion de la crise du COVID-19 et à veiller à ce que les partenaires sociaux soient pleinement associés à la conception et à la mise en œuvre des mesures prises; invite les États membres à prendre les mesures nécessaires pour préserver les emplois, les conditions de travail et les salaires, y compris les mesures de chômage partiel, les dispositifs de compensation salariale et les mesures similaires; dénonce les efforts déployés par certains États membres et certaines entreprises pour tirer profit de la situation et s'attaquer aux droits et conditions de travail des travailleurs; invite les États membres à consulter les syndicats et les travailleurs pour définir des mesures de santé et de sécurité au travail permettant de lutter contre la propagation de l'épidémie de COVID-19 et pour cesser les activités qui ne sont pas essentielles afin de protéger les travailleurs de la contagion;

22. invite les États membres à prolonger la durée des indemnités de chômage, et à suspendre les conditions auxquelles est subordonnée la perception de ces indemnités, jusqu'à la pleine reprise économique; estime qu'une attention particulière devrait être accordée à la protection des personnes les plus éloignées du marché du travail;

23. invite les États membres, sous réserve de conditions sociales et environnementales, à assumer la responsabilité de payeur de dernier ressort en couvrant directement les factures des petites et moyennes entreprises et en finançant des mesures, telles que subventions salariales, pour préserver les emplois et protéger les revenus; invite les États membres à subventionner des dispositifs de chômage partiel avec maintien de l'intégralité de la rémunération ainsi que des prolongations des congés de maladie rémunérés et des réductions des horaires de travail pour les travailleurs qui s'occupent d'enfants et de membres de la famille à charge, avec maintien de la rémunération à plein temps; invite les États membres à mettre un terme aux activités des plateformes numériques et à développer les mesures de protection des faux travailleurs indépendants et de tous les autres travailleurs atypiques, y compris les travailleurs des plateformes, dans le but de remplacer toutes les rémunérations perdues;

24. souligne que toutes les aides financières dont bénéficient des entreprises privées devraient être subordonnées à l'absence de licenciement et à la protection des niveaux existants de conditions de travail; demande instamment aux États membres d'interdire temporairement le versement de dividendes aux actionnaires par les entreprises et de geler toute augmentation des revenus des PDG et des primes versées aux cadres; estime que l'État, lorsqu'il renfloue des entreprises privées dans des secteurs stratégiques, devrait en devenir copropriétaire afin d'assurer leur viabilité et leur efficacité ainsi que pour s'assurer que l'argent du contribuable puisse être récupéré après la crise;

25. souligne que les renflouements devraient être assortis de conditions strictes en matière de normes environnementales, sociales et fiscales, de diligence en matière de droits de l'homme tout au long des chaînes d'approvisionnement et de transparence fiscale; souligne qu'aucune subvention ne devrait être versée pour des combustibles fossiles ou des projets extrêmement polluants;

26. demande aux États membres et aux partenaires sociaux de veiller, le cas échéant et en tant que mesure temporaire, à ce que tous les travailleurs aient la possibilité et les moyens de télétravailler; se dit préoccupé par la fracture numérique à cet égard et demande un réexamen du plan européen de déploiement de l'internet en vue d'assurer l'égalité d'accès pour tous et partout à la 4G;

27. souligne qu'il convient d'accorder une attention particulière aux travailleurs détachés qui sont bloqués dans un autre État membre, sans avoir la possibilité de l'auto-confinement, et qui, souvent, n'ont pas accès à l'indemnité de chômage partiel et à l'assurance maladie; presse les États membres de garantir la sécurité et la santé des travailleurs détachés qui se trouvent sur leur territoire; demande l'abrogation de la directive sur le détachement de travailleurs[9];

28. dénonce l'exploitation de la pénurie et le phénomène du marché noir ainsi que les augmentations brutales des prix des gels hydroalcooliques, des lingettes désinfectantes et des masques; demande aux États membres de réguler les prix des produits essentiels; souligne la nécessité d'accroître le rôle et la responsabilité des plateformes en ligne, lesquelles devraient être coresponsables lorsqu'elles proposent des produits non conformes et frauduleux; demande à la Commission d'ajouter la tarification astronomique de produits essentiels à la directive sur les pratiques commerciales déloyales[10]afin d'éviter les augmentations soudaines et drastiques du prix de produits essentiels sur les sites de marché en ligne; déplore les actions de certains assureurs qui refusent de dédommager l'arrêt d'exploitation;

29. presse la Commission d'offrir une aide financière aux secteurs culturels et créatifs, y compris au travers de l'Initiative d'investissement en réaction au coronavirus, et demande aux États membres d'assurer l'accès aux mesures de compensation pour tous les professionnels de la culture, y compris les journalistes freelance;

Reprise et justice sociale

30. demande aux États membres et à la Commission d'éliminer tous les obstacles à la négociation collective et de s'attaquer au déclin persistant de la couverture des négociations collectives; estime que la négociation collective et/ou les accords tripartites sont, de loin, les meilleurs instruments pour garantir une reprise démocratique et socialement juste où «nul n'est laissé pour compte», fondée sur la création d'emplois de qualité et sur la transition vers des formes d'emploi à durée indéterminée;

31. demande à la Commission d'introduire une exemption claire pour les faux travailleurs indépendants, tels que les travailleurs des plateformes, aux règles de concurrence de l'Union, de manière à permettre à de tels travailleurs de négocier collectivement sans qu'il soit considéré qu'ils ont conclu une entente;

32. invite la Commission et les États membres à veiller à ce que tous les paquets de relance et renflouements s'attaquent aux pertes de revenus, de protection sociale et de droits à la retraite que subissent les femmes du fait de leurs responsabilités familiales; invite les États membres et les partenaires sociaux à adopter des formules de travail qui favorisent la redistribution des responsabilités familiales à l'intérieur des familles, sans perte de revenus ni recul du niveau des salaires;

33. invite la Commission, les États membres et les partenaires sociaux à élaborer des mesures de santé et de sécurité au travail tenant compte de la spécificité des sexes et axées en particulier sur les secteurs de première linge afin d'éviter de futures épidémies; rappelle que les femmes sont surreprésentées dans la plupart des professions de première ligne, telles que les infirmières et autres professionnels de la santé, les travailleurs des pharmacies, les caissières des supermarchés, les enseignants, les éducateurs, les soignants des personnes âgées et le personnel de nettoyage;

34. invite la Commission à présenter une proposition relative à un régime européen de réassurance chômage basé sur des subventions et sur le principe de mutualisation des risques et non sur la conditionnalité des prêts; souligne que toute mesure prise sur cette voie doit garantir une convergence progressive des droits des travailleurs, en rejetant toute harmonisation qui déclenche un nivellement par le bas des conditions de vie et de travail;

35. invite l'Union européenne à accéder à la Charte sociale européenne révisée et à prendre des mesures immédiates pour la mettre en œuvre; invite tous les États membres à ratifier la charte révisée;

Crise économique

Assistance économique essentielle

36. regrette la réponse tardive et inadéquate que l'Eurogroupe a apportée à la crise le 9 avril 2020; relève que cette réunion met à nu les contradictions qui existent à l'intérieur de l'UE ainsi que le manque effrayant de solidarité et de mesures proportionnées à l'ampleur des problèmes auxquels les États membres et les personnes sont confrontés; considère que l'enveloppe totale de 500 milliards EUR est extrêmement faible par rapport à l'augmentation des besoins; s'oppose à la portée restreinte, à la capacité limitée, à la conditionnalité et à la surveillance dont sont assortis les 240 milliards EUR apportés par le Mécanisme européen de stabilité (MES); regrette que la solution présentée soit un fonds de relance indéfini et vague;

37. se félicite de la décision d'activer la «clause dérogatoire générale» du Pacte de stabilité et de croissance; demande l'abrogation permanente du pacte, ainsi que l'abrogation du cadre de gouvernance économique de l'UE dans son ensemble, y compris du Semestre européen et du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, qui restreignent et conditionnent la marge de manœuvre dont disposent les États pour promouvoir leurs stratégies de développement social, public et productif; juge inapproprié que les institutions européennes émettent des recommandations par pays au milieu d'une crise sans précédent, en particulier à propos de positions budgétaires qui concernent les dépenses pour des services sociaux et sanitaires dans les États membres; demande, après la crise, de remplacer le Pacte de stabilité et de croissance par un Pacte pour le développement durable et l'emploi;

38. demande la suspension immédiate et permanente de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques, afin que les gouvernements soient en mesure de dépenser (et d'emprunter) le montant requis pour relever ce défi sans crainte d'être sanctionnés;

39. demande aux États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l'emploi et les revenus et pour garantir un accès universel aux services publics - en particulier aux services sociaux et sanitaires - même si cela signifie que, en définitive, les objectifs budgétaires à moyen terme ne seront pas atteints;

40. demande aux institutions européennes, en particulier à la Banque centrale européenne (BCE), de prendre des mesures urgentes pour éviter qu'une nouvelle crise financière et de la dette souveraine ne se développe; souligne, à cet égard, que la BCE doit s'engager à agir comme prêteur de dernier ressort pour les États membres, pas seulement pour les banques, en faisant de ses programmes d'achat d'obligations souveraines des programmes inconditionnels, illimités et fondés sur les besoins de dépense des États membres plutôt que sur l'actuelle clé de répartition du capital;

41. invite la BCE à recenser et acheter tous les obligations souveraines liées au COVID-19 et à annuler dans sa totalité la dette liée au coronavirus, émise par les États membres pendant l'épidémie de COVID-19 et pendant la période de réaction à ses impacts économiques et sociaux;

42. demande la création immédiate d'obligations COVID-19 et d'obligations Pacte vert européen, émises par la BCE ou garanties par un programme d'achats de la BCE qui doit être inconditionnel et qui permettra aux États membres de se remettre rapidement de la crise, et de transformer leurs économies, sans laisser personne sur le côté; souligne que les obligations COVID-19 devraient être perpétuelles et sans intérêt de manière à représenter une création d'argent permanente en mesure de compenser un choc économique extraordinaire; estime que ces obligations pourraient également être émises par le futur Fonds de relance européen ou par la Banque européenne d'investissement (BEI), pour autant qu'elles soient émises sans conditions macroéconomiques ou autres et immédiatement achetées par la BCE;

43. souligne que, puisque les lignes de crédit existantes du MES en faveur des États membres intègrent une conditionnalité similaire à celle des renflouements et protocoles de la Troïka, un nouveau mécanisme est nécessaire, qui permettra d'apporter des lignes de crédit inconditionnelles, sans intérêt, aux États membres qui ont besoin d'un financement;

44. demande à la BCE de réorienter ses politiques d'assouplissement quantitatif, en particulier son programme d'achat de titres du secteur des entreprises, pour le subordonner à l'engagement des entreprises envers la pleine protection de l'emploi, des travailleurs, des droits et des revenus et envers les objectifs de l'accord de Paris;

45. invite la BCE à envisager la nécessité de fournir des liquidités directement aux petites et moyennes entreprises et aux citoyens sans passer par l'intermédiaire des banques; souligne que la BCE doit tirer les enseignements de la crise et demander à la Commission de proposer une révision de ses statuts de manière à accroître la capacité de la banque à soutenir la dépense publique;

46. demande une réglementation plus stricte des marchés financiers afin de prévenir les attaques spéculatives et souligne que la vente à découvert devrait être interdite et que la distribution de dividendes, les primes et les rachats d'actions doivent être temporairement interdits dans l'ensemble du marché unique;

47. prend acte de la création du Fonds de garantie paneuropéen de la BEI, doté de 200 milliards EUR; demande que la BEI utilise son potentiel au maximum pour soutenir les entreprises publiques et également pour apporter des fonds aux micro, petites et moyennes entreprises, sous réserve de l'engagement des entreprises à protéger l'emploi, les droits et les revenus;

48. demande la mobilisation immédiate des 4 milliards EUR de marges non allouées et de flexibilités qui restent disponibles dans le budget 2020;

49. insiste pour que la Commission prenne toutes les mesures nécessaires afin d'allouer les 3 milliards EUR disponibles au titre de l'excédent budgétaire 2019 et pour l'orienter vers la lutte contre le COVID-19 et son impact social et économique;

50. rappelle qu'il y a lieu de préserver les principes de la politique de cohésion pendant la crise du coronavirus, en assurant une flexibilité maximale, et de veiller à ce qu'aucun transfert n'ait lieu de régions en transition ou moins développées vers d'autres régions;

51. demande que les fonds soient renforcés, mobilisés et réorientés sans attendre; souligne que, pour stimuler les efforts budgétaires, les États membres doivent avoir un accès immédiat aux fonds structurels de l'UE, y compris le Fonds de solidarité de l'Union européenne, afin de réagir à la crise; souligne que le budget existant de l'UE doit être renforcé et que de nouveaux fonds doivent être réorientés vers un financement de la cohésion auquel les États membres puissent faire appel en fonction des besoins;

52. demande la mise en œuvre de contrôles des capitaux lorsque cela est nécessaire pour ralentir la fuite massive de capitaux depuis les économies en développement et émergentes qui a lieu depuis le début de la pandémie;

53. demande l'adoption immédiate d'une exception sanitaire dans tous les accords commerciaux en ce qui concerne l'accès aux brevets pour des machines médicales et des médicaments, et la non-restriction de la possibilité, pour les États, d'intervenir dans le secteur de la santé publique; demande le gel immédiat de toutes les négociations concernant de nouveaux accords de libre-échange et un programme de révision des programmes qui sont déjà entrés en vigueur afin de relever les défis actuels, y compris au moyen d'un chapitre supplémentaire permettant les aides d'État pour gérer la pandémie;

Reprise écologique et socialement juste

54. demande à la Commission, lors de sa révision des règles applicables aux aides d'État, d'envisager la possibilité d'une intervention publique et démocratique de l'État dans l'économie, favorisant le développement, la justice sociale et la satisfaction des besoins sociaux, y compris toutes les mesures nécessaires pour une reprise écologique et socialement juste;

55. souligne que cette épidémie a illustré l'extrême vulnérabilité de l'économie mondialisée, avec ses longues chaînes commerciales contrôlées par des entreprises multinationales et des spéculateurs sur les prix, et la dépendance de l'économie de l'UE vis-à-vis de la production dans des pays tiers; souligne la grande nécessité de rapatrier la production et l'industrie dans chaque État membre, en favorisant le développement des secteurs productifs de chaque pays, avec un secteur public fort, notamment dans le cas des secteurs stratégiques qui sont trop importants pour être abandonnés au marché, tels que les médicaments, les produits sanitaires, les EPI et les dispositifs médicaux; invite la Commission à augmenter vigoureusement son soutien au financement public, à la recherche et à l'innovation dans ces domaines;

56. souligne que l'épidémie de COVID-19 ne doit en aucun cas être prise comme excuse pour justifier des retards dans la lutte contre l'urgence climatique et environnementale; invite la Commission et le Conseil à œuvrer sans relâche et rapidement à une loi sur le climat réellement ambitieuse et au plan d'action en faveur de l'économie circulaire, ainsi qu'à continuer à se montrer ambitieux dans tous les aspects du pacte vert, tels que la stratégie «De la ferme à la table» ainsi que la stratégie en faveur de la biodiversité et les propositions législatives annoncées; souligne que ces stratégies et la législation en la matière devraient être publiées sans retard injustifié;

57. observe avec préoccupation que la hausse des températures à l'échelle mondiale, la destruction des habitats naturels et de la biodiversité, ainsi que la façon dont l'homme élève, échange et consomme les animaux actuellement sont susceptibles d'accroître gravement le risque de maladies zoonotiques; insiste sur la nécessité d'intensifier considérablement les efforts pour stopper le réchauffement climatique ainsi que la perte de biodiversité et d'habitats; invite la Commission à inclure, dans la loi sur le climat, l'objectif de réduire de 70 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, de parvenir à la neutralité carbone avant 2040 et de supprimer progressivement et rapidement les subventions en faveur des combustibles fossiles; invite la Commission et les États membres à intensifier leurs efforts en faveur de la réalisation des objectifs de développement durable; invite les États membres à investir massivement pour agrandir les réserves naturelles, les parcs et les espaces verts et de plein air, y compris dans les villes et dans leurs alentours;

58. constate que la pandémie de COVID-19 et la récession économique qu'elle entraîne, l'urgence climatique et les inégalités extrêmes sont fortement reliées les unes aux autres; demande à la Commission d'accroître à deux billions d'euros le budget alloué au plan d'investissement durable, pour permettre de financer un pacte vert et social européen progressiste visant à créer des millions de nouveaux emplois, à renforcer la cohésion sociale, à mieux préparer les systèmes de santé aux futures pandémies et à répondre à l'urgence climatique; souligne que l'argent public devrait être alloué à des projets publics et apporter des bénéfices publics;

59. souligne que notre société devra, au sortir de cette crise, être plus résiliente afin de pouvoir supporter de futurs chocs; insiste sur le fait qu'une transition entièrement juste vers une société et une économie durables est le seul moyen d'y parvenir; invite la Commission et les États membres à s'engager clairement en faveur d'un redémarrage écologique de notre société et à veiller à ce que le pacte vert pour l'Europe propose un plan réellement vert pour relancer notre économie en protégeant la santé publique, en préservant le bien public et le bien-être, et en garantissant à tous un avenir durable;

60. demande que les habitats naturels soient protégés afin d'atténuer le risque de perte de biodiversité et de mieux contrôler le risque de contamination de l'homme par les animaux; demande que les maladies émergentes soient étroitement surveillées, notamment celles causées par des microbiotes animaux, dont certains sont d'importants vecteurs pathogènes qui concernent tant la santé humaine que la santé animale; appelle de ses vœux la poursuite des études portant sur le déclenchement des épidémies, récemment et par le passé; appelle également de ses vœux des études sur la manière dont les activités humaines provoquent des modifications du microbiome animal;

61. invite la Commission à proposer, pour la période 2021-2027, un nouveau CFP ambitieux prévoyant davantage de fonds pour les politiques en faveur de la cohésion, du climat et de la santé; fait observer à cet égard que la proposition d'1,11 % du revenu national brut de l'EU-27 avancée par la Commission n'est pas suffisante pour faire face à la crise actuelle, et que même la part d'1,3 % proposée par le Parlement ne suffit pas non plus; exige que les hausses de budget pour le contrôle des frontières et la défense soient intégralement réaffectées à la politique de cohésion;

62. demande à la Commission de commencer à travailler immédiatement sur un nouveau CFP réorienté en plan d'urgence, en préparant un budget d'urgence, valable pendant au moins un an à compter de janvier 2021, et en prévoyant de doubler les ressources par rapport aux crédits d'engagement de l'année en cours; souligne que ce budget devrait examiner de nouvelles pistes pour augmenter nos ressources et trouver de nouveaux moyens et instruments pour enrayer la récession imminente due à la COVID-19, et qu'il doit respecter les règles de flexibilité et la concentration des ressources en faveur de la politique de cohésion qui ont été établies pour le budget 2020; insiste sur le rôle institutionnel de colégislateur dévolu au Parlement, en s'opposant à toute tentative de limiter ce rôle;

63. invite la BEI à mettre en œuvre un plan d'investissement européen visant principalement à revitaliser l'économie grâce à un pacte vert social, ainsi qu'un programme de développement des infrastructures sociales;

64. demande qu'un processus de restructuration de la dette soit engagé pour les États membres fortement endettés, afin de leur permettre d'avoir suffisamment de marge budgétaire pour favoriser les investissements nécessaires pour contrer la récession économique et renforcer les services publics;

65. souligne que l'Union européenne et ses États membres devront créer de nouvelles ressources pour financer la reprise; souligne que la reprise ne sera socialement juste que si elle est financée par des ressources budgétaires redistributives et progressistes; demande une hausse des impôts sur les grandes entreprises et sur la fortune; invite à cet égard les États membres à augmenter les taux de l'impôt sur les sociétés, en appliquant des taux plus élevés pour les entreprises qui génèrent le plus de profits, en particulier celles qui, dans le secteur financier, ont tiré profit d'opérations spéculatives à court terme, ainsi qu'à créer un impôt sur les bénéfices excédentaires; invite les États membres à créer un impôt sur la fortune nette concernant les particuliers les plus fortunés;

66. invite le Conseil à engager des fonds de l'Union supplémentaires pour relier de manière productive le Fonds de relance à un CFP réorienté, amélioré et plus poussé pour la période 2021-2027, ainsi qu'à donner des lignes directrices pour ce Fonds, qui apportera des ressources aux plus vulnérables des États membres, des régions et des particuliers afin de leur permettre de lutter durablement contre les inégalités et les divergences croissantes entre les pays et les régions ou au sein de la société;

67. demande à la Commission de suspendre en partie les procédures d'infraction concernant les règles de l'Union en matière de TVA, afin de permettre aux États membres de baisser les taux de TVA pour les produits essentiels ou d'ajouter ces produits à la liste des articles à taux zéro ou exonérés; invite la Commission à proposer une révision de la directive relative à la TVA[11]afin d'introduire davantage de progressivité dans les règles de l'Union en matière de TVA;

68. presse les États membres qui participent à la procédure de coopération renforcée de convenir de l'adoption d'une taxe sur les transactions financières (TTF); souligne que la solution la plus appropriée serait une solution de l'Union dans son ensemble et invite donc la Commission à proposer une nouvelle TTF à tous les États membres;

69. met l'accent sur la solidarité internationale qui se manifeste en ces temps de crise, comme celle dont ont fait preuve la Chine, Cuba et le Venezuela, entre autres, et appelle de ses vœux le déploiement d'une telle solidarité lors d'autres crises, comme les déplacements dus au climat et les catastrophes naturelles; estime que la communauté internationale doit faire preuve de la même solidarité envers les pays tiers, en particulier pour répondre aux pertes et aux dommages, au financement de l'action climatique et de l'adaptation au changement climatique, ainsi qu'à d'autres demandes de solidarité émanant des pays du Sud; demande, pour ces raisons, la levée immédiate des sanctions et des blocus économiques imposés à des pays tiers et qui compromettent la santé et le bien-être de leur population pendant cette pandémie;

70. invite les États membres à respecter leur engagement collectif et à fournir aux pays en développement l'aide publique au développement prévue; demande que des fonds supplémentaires soient alloués à tous les outils de l'Union en matière d'aide au développement, d'aide extérieure et d'aide humanitaire, et demande également l'affectation d'un budget pour aider les pays en développement à mettre en œuvre des mesures de renforcement de leurs systèmes de santé publics et fournir tout le soutien matériel, médical, humain et technique nécessaire pour faire face à l'épidémie de COVID-19; demande qu'un soutien soit apporté aux pays en développement pour les aider à produire du matériel médical; insiste sur la nécessité de modifier le nouveau CFP conformément à ces besoins urgents et d'allouer davantage de ressources; invite l'Union à soutenir l'allègement des dettes bilatérales, multilatérales et commerciales, ainsi que la renégociation des paiements d'intérêts sur une période de deux ou trois ans pour tous les pays en développement, notamment les pays africains à revenu faible ou moyen;

71. souligne que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale doivent garantir l'accès au financement des pays en difficulté financière, sans discrimination ni conditionnalité, et sans «programme d'ajustement structurel» qui affaiblit les systèmes de santé et empêche les États de réagir aux crises; insiste sur le fait que le FMI et la Banque mondiale doivent annuler le paiement des dettes et mettre en place des mécanismes de remise de dette, en particulier pour les pays appauvris qui ont besoin de toutes leurs ressources pour garantir le droit à la santé et d'autres droits de l'homme, ainsi que dans les cas de dette odieuse;

72. invite la Commission à prendre la tête des travaux visant à renforcer l'ensemble des efforts internationaux pour mettre en place une coopération mondiale en matière de santé qui soit véritablement juste et solidaire, adaptée aux défis de notre époque, avec des mécanismes efficaces de prévention en cas d'alerte de pandémie, un volet de prévention des crises sanitaires et des mécanismes de partage de brevets, de vaccins et de matériel médical;

73. demande que l'OMS facilite la mise en place, au niveau international, à celui de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement et à celui de l'Organisation mondiale du commerce, d'une initiative spéciale en matière de coopération internationale pour permettre l'accès universel aux médicaments, aux soins de santé publique, à l'alimentation et à l'eau, accès qui constitue un droit fondamental; invite la Commission à agir en coordination avec l'Organisation des Nations unies, au moyen du fonds créé par cette dernière contre le coronavirus et alimenté par plusieurs bailleurs de fonds, pour aider les pays en développement aux systèmes de santé fragiles à faire face à la crise;

Crise démocratique

Protection des droits fondamentaux

74. s ouligne que les droits fondamentaux des citoyens doivent être protégés en tout temps, même en situation d'urgence, notamment celui d'un accès libre et sur un pied d'égalité à des services de santé publics de qualité; rappelle que l'OMS a déclaré que, parmi les principes fondamentaux en matière de droits de l'homme et de santé, figurent notamment l'égalité et la non-discrimination; exige que tous les États membres les respectent scrupuleusement;

75. invite les États membres à garantir à toutes les personnes l'accès aux soins de santé préventifs et curatifs, y compris à tous les migrants et indépendamment du niveau de revenu; invite les États membres à prendre des mesures supplémentaires en matière de protection sociale afin d'aider les personnes que la crise touche de manière disproportionnée, y compris les femmes, qui se trouvent déjà dans une situation socio-économique désavantageuse, qui supportent une charge domestique encore plus lourde et sont exposées à un risque accru de violences fondées sur le sexe, d'où l'importance de faire de la lutte contre la violence domestique une priorité dans tous les aspects des politiques publiques; invite une fois encore le Conseil à finaliser d'urgence la ratification de la convention d'Istanbul par l'Union; demande aux États membres de prendre des mesures pour protéger les victimes de violence domestique, notamment les femmes et les enfants, en mettant en place des systèmes d'alerte, des lignes d'assistance téléphonique et des services d'urgence, en créant des dispositifs sûrs pour permettre aux femmes de se faire aider et en veillant à ce qu'il y ait effectivement des structures et des refuges pour protéger les victimes de violence; invite les États membres à garantir efficacement l'accès de toutes les femmes et jeunes filles aux services de santé génésique et sexuelle pendant la pandémie de COVID-19, notamment un accès à l'avortement en toute sécurité, et s'oppose fermement à toute tentative de retour en arrière en matière de droits des personnes LGBTI; condamne, dans ce contexte, les tentatives visant à criminaliser davantage l'avortement en Pologne, ainsi que les atteintes aux droits des personnes transgenres en Hongrie;

76. invite les États membres à adopter, pour lutter contre la COVID-19, des mesures proportionnées, nécessaires et non discriminatoires, qui devraient être temporaires, assorties de délais clairs et obligatoires, et soumises au contrôle parlementaire, et qui ne devraient pas servir à couvrir une action répressive menée sous un prétexte sanitaire;

77. condamne fermement la loi sur l'état d'urgence adoptée par le Parlement hongrois le 30 mars 2020, qui accorde des pouvoirs illimités à Víktor Orbán et à son gouvernement, et leur donne carte blanche pour restreindre les droits fondamentaux; presse la Commission et le Conseil de prendre des mesures immédiates contre cette évolution et d'employer tous les instruments et procédures dont ils disposent afin de garantir le plein respect de l'article 2 du traité sur l'Union européenne (traité UE) par la Hongrie; invite instamment le Conseil à tenir une réunion extraordinaire en avril afin d'examiner ce sujet précis, ainsi qu'à veiller à ce qu'une action soit immédiatement entreprise à ce sujet en procédant à l'audition visée à l'article 7, paragraphe 1, du traité UE;

78. fait part de ses vives inquiétudes quant à l'adoption de mesures de surveillance pour lutter contre la propagation du virus, y compris la collecte de données de localisation auprès d'opérateurs de télécommunications ou d'applications pour smartphones afin de suivre les déplacements de la population ou de repérer les personnes susceptibles d'être positives; invite instamment la Commission à suivre de près les mesures nationales susceptibles de nuire à la protection des données et de notre vie privée, et à consulter le Contrôleur européen de la protection des données avant toute adoption d'une initiative dans ce domaine; souligne que toutes les mesures qui restreignent la protection des données et de notre vie privée doivent être légitimes, efficaces pour prévenir les risques de décès et en matière de santé publique, rigoureusement proportionnées et utilisées uniquement à des fins de santé publique, tout en étant soumises à des délais stricts; souligne que les initiatives prises en situation d'urgence ne doivent pas conduire à une surveillance massive après la crise et exige des garanties à cet égard; souligne en outre qu'une telle contribution du numérique dans la lutte contre le virus ne peut être efficace que si, en parallèle, des tests de dépistage sont effectués à grande échelle;

79. invite instamment tous les États membres à garantir le droit d'asile et à ouvrir des structures adéquates et décentes d'accueil des demandeurs d'asile afin de permettre l'application de toutes les mesures de prévention, y compris la distanciation sociale, ainsi qu'à suspendre toutes les décisions de retour et expulsions, à mettre fin aux détentions liées au statut d'immigration, à prolonger automatiquement les titres de séjour et à accorder des titres de séjour temporaires aux migrants sans papier, comme l'a fait le Portugal, et à prolonger les délais prévus dans la législation relative aux étrangers; presse la Commission d'inclure ces demandes dans ses lignes directrices destinées aux États membres et de collaborer avec les autorités grecques pour évacuer les camps sur les îles grecques, notamment en procédant à la relocalisation et à la réunification familiale des demandeurs d'asile dans d'autres États membres;

80. fait part de sa grande préoccupation quant à la décision des autorités italiennes et maltaises de se servir de la pandémie de COVID-19 pour déclarer que leurs ports ne sont pas sûrs; s'inquiète du fait que ces autorités n'ont pas porté assistance à des personnes en détresse dans leurs zones de recherche et de sauvetage, bien qu'il leur ait été demandé d'intervenir; rappelle qu'il convient de trouver des solutions pour protéger la vie et la santé à la fois des personnes en détresse en mer et des personnes sur la terre ferme; demande aux États membres d'honorer l'obligation qui leur incombe en vertu du droit international de porter assistance aux navires en détresse et de proposer un lieu de débarquement aux personnes qui ont été secourues en mer, y compris par des embarcations de la société civile et des navires marchands; demande une nouvelle fois à l'Union de mener des opérations proactives de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale;

81. exhorte les États membres à n'adopter que des mesures nécessaires, coordonnées et proportionnées lorsqu'ils restreignent les déplacements ou introduisent des contrôles aux frontières intérieures et les prolongent, et de ne le faire qu'après avoir évalué soigneusement leur efficacité par rapport au problème de santé publique et sur la base des dispositions légales existantes, à savoir le code frontières Schengen et la directive sur la libre circulation, et en respectant pleinement la charte des droits fondamentaux; rappelle que les personnes ayant besoin d'une protection internationale ne sont pas concernées par la liste de ressortissants de pays tiers dont la présence dans l'espace Schengen n'est pas autorisée, et exhorte les États membres et la Commission à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que cette exception soit bien respectée en pratique; presse la Commission d'examiner la légalité, la proportionnalité et la cohérence de toutes les mesures prises et de veiller à ce qu'elles soient au moins évaluées a posteriori, en vue de retrouver un espace Schengen pleinement opérationnel et un respect intégral du droit à la libre circulation;

82. s'inquiète de la situation dans les prisons et les centres de rétention, où la santé de plus de 1,5 million de personnes en Europe est en danger; insiste vivement sur la nécessité de renforcer l'assistance médicale et d'encourager l'adoption des mesures recommandées par l'OMS et le Comité de prévention de la torture du Conseil de l'Europe; exhorte les États membres à autoriser la libération anticipée de détenus, en particulier des petits délinquants, des personnes âgées et des plus vulnérables, ainsi qu'à recourir davantage à des mesures non privatives de liberté; invite les États membres à adopter les mesures de précaution qu'il convient pour garantir le respect du droit des prisonniers à communiquer avec leur famille;

83. souligne que la pandémie de COVID-19 a augmenté le nombre de cas de racisme et de discrimination dans l'Union; déplore la fréquence avec laquelle, dans plusieurs États membres, des représentants politiques ont désigné des boucs émissaires et des mesures racistes ont été prises, ce qui a provoqué une hausse des violences contre les migrants, les réfugiés et les minorités; souligne qu'il est indispensable de s'attaquer au problème des crimes de haine en soutenant la mise en place d'un cadre législatif efficace dans chaque État membre; demande instamment à la Commission et à sa présidente de condamner les violences contre les Roms de la part des autorités locales et régionales perpétrées dans plusieurs États membres, y compris les expulsions collectives, pendant la pandémie;

84. souligne que toutes les mesures mises en œuvre par la Commission doivent être soumises au contrôle parlementaire; insiste sur le fait qu'il est impératif que le Parlement soit associé aux processus décisionnels et demande par conséquent l'annulation des décisions prises pour écarter ses représentants;

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85. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et à la Banque centrale européenne ainsi qu'aux gouvernements, aux parlements et aux partenaires sociaux des États membres.

[9]Directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services (JO L 18 du 21.1.1997, p. 1).

[10]Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur (JO L 149 du 11.6.2005, p. 22).

[11]Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO L 347 du 11.12.2006, p. 1).

La Sté Parlement Européen a publié ce contenu, le 15 avril 2020, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
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