Londres (awp/afp) - L'inflation au Royaume-Uni, la plus élevée des pays du G7, n'a pas reculé en mai, se maintenant à 8,7% sur un an, dans un pays en proie à une sévère crise du coût de la vie.

Ce chiffre têtu, alors que les analystes tablaient sur un repli modeste, rend une hausse de taux d'intérêt de la Banque d'Angleterre quasi certaine pour jeudi, quand elle annoncera sa nouvelle décision de politique monétaire.

"Les prix des voyages aériens, des divertissements et biens ou services culturels, et ceux des voitures d'occasion ont été les plus gros facteurs" de résistance de l'inflation, notamment les tarifs de réservation des concerts, détaille l'Office national des statistiques (ONS) mercredi dans son rapport mensuel.

Le mois dernier, un afflux de touristes lié à un concert de la superstar américaine Beyonce - qui s'est également produite au Royaume-Uni en mai - avait été cité par un économiste comme un facteur contribuant à la persistance d'une inflation très élevée en Suède.

Maigre consolation: les tarifs des carburants ont ralenti leur progression le mois dernier au Royaume-Uni. La flambée des prix alimentaires a un tout petit peu marqué le pas également, mais se maintient à des niveaux historiquement très élevés à plus de 18% sur un an.

"Les prix montent chaque semaine", sur certains produits, "le pain, le fromage, c'est ridicule", lance auprès de l'AFP Ray Turner, un retraité de 65 ans, près d'un supermarché Tesco du sud-est de Londres, disant rechercher désormais des alternatives moins chères aux produits de base.

"Près de 70% des ménages sont soit 'extrêmement' soit 'très inquiets' de la hausse des prix de l'alimentation et des boissons", relève le cabinet d'études Kantar.

Fruits, légumes, poulet "ont considérablement augmenté" et "même Lidl, qui est censé être moins cher, n'est plus si bon marché", remarque pour sa part Alba Martinez, 35 ans, sage-femme en congé maternité, qui se décrit comme "plus pauvre que jamais" et dit désormais acheter et cuisiner en plus grande quantité.

"Nous savons combien l'inflation élevée fait du mal aux familles et aux entreprises à travers le pays", a assuré mercredi le ministre des Finances Jeremy Hunt dans un communiqué.

"Terrible"

Mais si le gouvernement distribue des aides aux plus modestes face au coût de la vie, "ça ne va pas bien loin", affirme à l'AFP Frank Lindsay, peintre décorateur de 60 ans à la retraite, qui vit notamment des aides du gouvernement et décrit une situation "terrible" alors que tout a augmenté, "les factures, comme le prix des courses".

La Banque d'Angleterre, qui tente depuis des mois d'éteindre la flambée des prix, devrait jeudi augmenter de nouveau son principal taux d'intérêt, actuellement à 4,50%. La question étant désormais pour les économistes de savoir si la hausse sera de 25 ou 50 points de base.

Ce qui devrait mettre encore la pression sur les finances des ménages propriétaires dont les remboursements de crédits immobiliers ne cessent de grimper.

Le chef de l'opposition travailliste au Royaume-Uni, Keir Starmer, a pointé devant le Parlement mercredi la responsabilité des politiques conservatrices dans la "catastrophe des prêts immobiliers", alors que les taux des nouveaux emprunts fixés pour deux ou cinq ans, très courants dans le pays, sont autour de 6%.

Mais "c'est l'inflation qui fait grimper les taux d'intérêt" et c'est pourquoi le gouvernement "prendra les décisions difficiles et responsables" pour lutter contre les hausses de prix, a rétorqué le Premier ministre Rishi Sunak. L'exécutif a notamment exclu la veille d'aider directement les titulaires de prêts immobiliers, vu comme une politique inflationniste.

Paul Dales, de Capital Economics, estime que "l'accélération de l'inflation sous-jacente (hors alimentation, énergie, etc.) fait du Royaume-Uni une anomalie et une +nation de stagflation+".

Le cas de l'inflation têtue au Royaume-Uni a amené le gouverneur de la Banque d'Angleterre Andrew Bailey à admettre que les prévisions de l'institution n'avaient pas été fiables, et que les prix mettraient plus de temps que prévu à marquer le pas.

Une situation qui contraste avec les Etats-Unis où la Réserve fédérale a fait une pause dans ses hausses de taux directeurs grâce à un fort ralentissement de l'inflation en mai, à 4,0% sur un an.

Dans la zone euro, elle s'est repliée à 6,1% en mai, après 7% en avril.

afp/rp