Lors de sa première conférence de presse après sa victoire, le chef de file du Parti libéral démocrate (PLD) a ainsi estimé que son appel à un assouplissement monétaire "illimité" avait été plébiscité par le scrutin.

Il a déclaré qu'il demanderait à son gouvernement, une fois formé le 26 décembre, de travailler avec la Banque du Japon pour fixer un objectif d'inflation de 2%, soit le double de l'objectif actuel.

Shinzo Abe a également annoncé la réactivation d'un conseil gouvernemental de politique économique et budgétaire et il a exprimé la volonté que le gouverneur de la Banque du Japon assiste à ses réunions.

Le PLD, qui avait prôné plus de fermeté à l'égard de la Chine au long de la campagne, a largement remporté les élections législatives anticipées, renvoyant dans l'opposition le Parti démocrate (PDJ) après une parenthèse de trois ans.

Shinzo Abe a ainsi promis d'améliorer ce qu'il a qualifié de relations stratégiques avec la Chine, tout en réaffirmant la souveraineté du Japon sur les îles Senkaku - appelées Diaoyu par le Chine -, au centre de tensions entre les deux pays depuis plusieurs mois.

Dans la foulée des propos du futur Premier ministre japonais, considéré comme un "faucon" parmi les nombreuses factions du PLD, le ministère chinois des Affaires étrangères a réaffirmé la souveraineté de la Chine sur l'archipel.

ACCÈS DE FAIBLESSE DU YEN

"Nous devons approfondir les liens avec le reste de l'Asie, y compris l'Inde et l'Australie - et pas seulement d'un point de vue diplomatique mais également dans les domaines de la sécurité et de l'énergie - avant de commencer à travailler à une amélioration des relations avec la Chine", a déclaré Shinzo Abe.

Fait inhabituel pour une banque centrale, la Banque du Japon a été au coeur du débat politique tout au long de la campagne après les appels de Shinzo Abe à un assouplissement monétaire "illimité".

Du fait de ces prises de position, le yen recule depuis plusieurs semaines - ce qui est plutôt une évolution positive pour un pays très dépendant des exportations -, la devise japonaise touchant un plus bas de 20 mois face au dollar et un creux de sept mois et demi face à l'euro.

En plus de mesures que pourrait prendra la BoJ, Shinzo Abe s'est également engagé à fortement augmenter les dépenses publiques afin de sortir la troisième économie mondiale de sa quatrième récession depuis 2000 et de mettre enfin un terme au phénomène de déflation qui plombe l'activité du pays.

"Il est rare que des questions de politique monétaire focalisent à ce point l'attention lors d'une élection, mais nos points de vue ont reçu un soutien massif de l'opinion. J'espère que la Banque du Japon en tiendra compte", a-t-il dit.

Des sources ont dit la semaine dernière que la Banque du Japon était susceptible d'assouplir une nouvelle fois sa politique monétaire jeudi à l'issue de sa réunion.

L'option la plus probable serait que la banque centrale étende son programme de rachat d'actifs et de prêts, qui représente déjà 91.000 milliards de yens (857 milliards d'euros), de 5.000 à 10.000 milliards de yens supplémentaires.

Depuis que la Banque du Japon - dont les taux directeurs sont proches de zéro depuis plus de deux ans - a fixé en février un objectif d'inflation de 1%, elle a déjà pris à quatre reprises des mesures d'assouplissement monétaire via des rachats d'actifs.

Dans un entretien téléphonique accordé à Reuters, Tom Byrne, vice-président chez Moody's, a déclaré que toute hausse des dépenses publiques pouvait donner un coup de pouce temporaire à l'économie japonaise, tout en soulignant que cela ne ferait, faute de réformes visant à améliorer les perspectives à long terme du pays, qu'augmenter un endettement déjà très important.

Le Japon est le pays développé le plus endetté au monde, avec un endettement qui représente environ deux fois le produit intérieur brut (PIB) du pays.

Cette dette est cependant détenue pour l'essentiel par des investisseurs japonais, les banques du pays préférant investir les dépôts reçus dans des obligations souveraines plutôt que de prêter des sommes à d'autres entreprises.

Tokyo consacre la moitié de ses recettes fiscales au service de la dette.

Bertrand Boucey et Benoît Van Overstraeten pour le service français, édité par Dominique Rodriguez

par Leika Kihara et Kaori Kaneko