La première étape de planification de cette stratégie passe par l'évaluation de la pérennité du dividende dans le temps. Pour cela, on va s’aider du payout-ratio ou taux de distribution en français. En effet, celui-ci mesure la proportion des bénéfices qu’une société verse aux actionnaires sous forme de dividendes.

Il se calcule de la manière suivante : (Montant du Dividende par Action / Bénéfice Net par Action ou BNA) x 100

Prenons l’exemple avec Total SE, valeur chérie des investisseurs dans ce type de stratégie puisque son rendement moyen sur les dix dernières année est de 5,6 %, son dividende est stable ou en hausse chaque année depuis 35 ans et il est versé tous les trimestres. 

 

Données en USD

2017

2018

2019

2020e

2021e

2022e

BNA

3.34

4.24

4.17

-1.08

2.80

4.49

Dividende

3.04

2.88

2.94

3.11

3.18

3.25

Taux distribution

91.02%

67.92%

70.50%

-

113.57%

72.38%

Cash flow par action

8.95

9.41

9.43

6.04

8.44

10.05

Source : Zonebourse.com - S&P Gloabl Market Intelligence - Données financières de Total

Un taux de distribution faible indique généralement que l’entreprise réinvestit la majeure partie de ses bénéfices dans sa croissance. A l’inverse, un ratio trop élevé, mettons supérieur à 100 %, peut être signe d’une pratique dangereuse voire insoutenable sur le long terme car cela signifie que la société distribue plus de dividendes que ses bénéfices ne le permettent. C’est le cas par exemple de Total SE si l’on suit les prévisions des analystes pour 2020 et 2021.

Toutefois, il n’y a pas de résultat idéal car la pérennité d’un dividende dépend également du secteur dans lequel l’entreprise opère. Par exemple, les entreprises d'un secteur défensif comme la santé ont tendance à afficher des résultats plus stables permettant ainsi de supporter des versements élevés sur le long terme (cf Sanofi). A contrario, les bénéfices des sociétés provenant d’un secteur cyclique comme l’automobile ou les matières premières sont vulnérables aux fluctuations macroéconomiques ce qui augmente la sensibilité du dividende.

C’est pourquoi il est également essentiel de regarder le cash-flow par action. Ce flux de liquidités correspond au cash réel qu’une entreprise dispose une fois son cycle de production payé et qui peut donc être affecté au rachat d’action, au versement de dividende ou à financer sa croissance. En conséquence, un cash-flow par action qui serait inférieur au dividende par action serait une très mauvaise nouvelle pour l’investisseur car cela signifierait que l’entreprise ne serait pas en mesure de verser une partie de ses bénéfices à ses actionnaires. Attention donc aux entreprises qui sont dans une situation financière délicate et qui veulent maintenir à tout prix leur dividende. 

Au-delà de la soutenabilité du dividende, il est important de regarder également s'il est profitable c'est-à-dire s'il est au moins stable ou en hausse sur un historique de temps assez large. Par exemple, nous disions plus haut que Total SE a versé un dividende (en €) stable et en hausse depuis 35 ans. Cela reprend finalement la stratégie des valeurs Aristocrates que nous avons décrite ici

Un autre critère à vérifier est le comportement du dividende en période de crise. Pour cela, vous pouvez étudier la période 2007 - 2009 ou bien le premier semestre 2020 avec la crise sanitaire qui a entraîné une majorité d’annulation des dividendes voire dans le meilleur des cas une réduction. Très peu d’entreprises ont maintenu leur dividende à l’image d’Air Liquide, Total SE, Dassault Systemes, L’Oréal, Schneider Electric, Sanofi, Vivendi et Danone. Pour avoir la liste complète des changements de dividendes du CAC 40, c’est par ici.

Ce retournement de politique sur les dividendes a sans doute pris de court les investisseurs qui se basent sur une stratégie à dividende élevé puisque les valeurs bancaires et de l’automobile entre autres n’ont pas maintenu leur versement. Une solution pour éviter ce risque exceptionnel pourrait être d’investir dans un ETF. Par exemple, l’ETF Lyxor STOXX Europe Select Dividend 30 (LU1812092168) vise à investir dans 30 valeurs parmi le STOXX 600 qui ont connu une croissance non négative de leur dividende sur 5 ans et qui affichent les taux de rendement les plus élevés. L’investisseur pourra bénéficier d’un dividende de 5,74 % pour des frais annuels de 0,3 %. Toutefois, avec une moins-value latente de 25,8 %, l’indice fait beaucoup moins bien sur 2020 que les indices européens. Cela s’explique en raison des secteurs sur lesquelles est investi l’ETF puisque les secteurs financier (banque et assurance), automobile, immobilier, pétrole et services aux collectivités sont fortement représentés. Ce sont des secteurs traditionnellement généreux sur leur politique de dividende mais qui souffrent depuis le début de l’année de la crise sanitaire. L’investisseur qui choisit ce type d’ETF aura donc un biais sectoriel. 

Pour optimiser cette stratégie, l’investisseur devra investir via un PEA ou via une assurance-vie afin que les dividendes ne soient pas soumis à l’impôt sur le revenu et réduire ainsi les coûts de fiscalité. L’ETF de chez Lyxor cité plus haut est d’ailleurs éligible au PEA. De même, les nouvelles assurances-vie en ligne offrent de plus en plus la possibilité d’investir dans des titres vifs ce qui permet ainsi de profiter d'un cadre fiscal avantageux. Les dividendes reçus seront versés sur un fond en euros (le plus souvent l’actif général de la compagnie d’assurance) et vous pourrez ainsi programmer des rachats automatiques pour mettre en place votre stratégie sur les revenus complémentaires.

Pour compléter cet article, Zonebourse a concocté un screener sur les valeurs de rendement que vous pouvez utiliser tout en vérifiant les critères décrits précédemment.