Francfort (awp/afp) - La Banque centrale européenne a préparé les esprits jeudi à un nouvel arsenal pour stimuler l'économie, probablement précisé dès septembre, alors que ses marges de manoeuvre restreintes l'obligent à faire preuve d'imagination.

Voici les principales actions envisagées ou déjà annoncées.

Baisse des taux

La BCE a beau maintenir ses taux directeurs à leur plancher historique depuis mars 2016, elle peut les abaisser encore tant que leur niveau n'est pas jugé contre-productif pour l'économie.

La piste privilégiée vise le taux "de dépôt" frappant les liquidités excédentaires des banques, déjà négatif, pour le porter de -0,40% à -0,60%, soit dès septembre, soit en plusieurs étapes d'ici la fin de l'année.

L'idée est de dissuader plus vigoureusement les banques de laisser leur excès de trésorerie au guichet de la BCE, pour les encourager plutôt à les prêter aux ménages et aux entreprises.

La BCE ne devrait cependant pas toucher à son taux "de refinancement", naguère son principal instrument, qui permet aux banques de se financer sur une semaine et campe à 0% depuis trois ans. L'intérêt de le porter en territoire négatif "ne semble pas clair", estime Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

Taux dégressifs

De nouvelles baisses de taux nuiraient aux banques, relève cependant HSBC. Aussi, la BCE se prépare à compenser les effets défavorables des taux négatifs, en recourant au système de paliers ou "tiering" en vigueur en Suède, en Suisse, au Danemark et au Japon.

Le taux moyen facturé aux banques sur leurs dépôts excédentaires serait donc bien inférieur au taux de référence, puisque ce prélèvement "marginal" ne toucherait plus qu'une fraction des dépôts.

Selon M. Ducrozet, cela pourrait réduire d'environ de moitié la facture annuelle sur ces liquidités en excès, estimée à environ 7,5 milliards d'euros et principalement supportée par les banques allemandes et françaises.

Prêts géants aux banques

La BCE a offert entre 2014 et 2016 aux banques la possibilité d'emprunter d'énormes liquidités à des taux très avantageux dans le cadre des programmes TLTRO I et II, à condition qu'elles prêtent à leur tour cet argent aux ménages ou aux entreprises.

Les banques, en particulier les membres les plus fragiles du secteur en Italie, avaient sauté sur l'occasion.

Lors de sa réunion de mars dernier, la BCE a annoncé le lancement en septembre d'une troisième série de ces prêts, un peu moins généreux que par le passé. Il s'agira de sept vagues jusqu'en mars 2021, avec chaque fois une échéance de deux ans, à des taux variant de -0,30% à +0,10% selon la quantité de crédits redistribués par chaque banque dans l'économie.

Nouveau QE, nouvelles conditions?

Enfin, la BCE a chargé ses services de plancher sur une réactivation de ses rachats de dette publique et privée, une puissante arme anti-crise baptisée "QE" et déployée entre mars 2015 et fin 2018.

Pendant cette période, l'institut a acquis environ 2.600 milliards d'euros de dette et continue à réinvestir ce stock pléthorique de titres à leur échéance, afin de maintenir de bonnes conditions financières sur les marchés.

Pour Frédéric Ducrozet, déclencher un "QE 2" apparaît "la réponse politique naturelle, en l'absence d'un rebond soutenu des anticipations d'inflation", puisque la hausse des prix est encore loin du niveau légèrement inférieur à 2% visé par la BCE et que cette situation va perdurer.

Mais l'institut de Francfort pourrait devoir augmenter la proportion maximale de dette achetée par pays, aujourd'hui de 33%, puisque cette limite est atteinte dans certains cas, en Finlande et aux Pays-Bas, et presque atteinte pour les emprunts allemands à 10 ans, selon UniCredit.

Or ce sujet est délicat puisque la validité juridique du QE, contestée par plusieurs universitaires et politiques allemands, sera réexaminée fin juillet par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Le juge européen avait, lui, estimé qu'il ne s'agissait pas d'un financement direct des Etats, interdit par les traités européens,... tant que certaines limites d'achat n'étaient pas dépassées.

afp/buc