La recherche en finance tend à montrer que les achats d’initiés donnent un meilleur signal positif que les ventes d’initiés ne donnent un signal négatif. Peter Lynch, l’investisseur légendaire, l’a résumé ainsi : " Les initiés ont de nombreuses raisons de vendre leurs actions, mais n’ont qu’une raison d’en acheter : ils pensent que le cours va monter ".

Après une fin d’année 2020 où les ventes avaient pris le dessus (cadeaux de Noël, optimisations fiscales ?), les premières semaines de 2021 indiquent un rééquilibrage du ratio Achats/Ventes, et ce malgré la hausse des marchés.

Parmi les centaines de déclarations à l’AMF, voici celles qui nous semblent les plus significatives (critères : montants, nombre de transactions et de personnes concernées) :

  • A l’achat

On notera Abeo qui a fait l’objet d’achats réguliers de la mi-décembre à la mi-janvier de la part du PDG et du fonds Nobel (géré par Weinberg Capital Parners) alors que le titre s’est bien repris sur des espoirs de retournement de résultats très marqués par la crise sanitaire.

On notera également du côté des achats importants du côté des holdings Eurazeo, Wendel, ou dans la galaxie Bolloré.

Des renforts au capital des familles fondatrices de BIC (la holding Marcel Bich Descendants se renforce sur ce titre qui a peu profité de l’embellie boursière alors qu’il a présenté des perspectives ambitieuses de retour à la croissance), Arnault sur LVMH (encore 10 M€ après 10 M€ fin décembre mais la signification est à relativiser car Bernard Arnault se renforce régulièrement et sa fortune se chiffre en dizaines de milliards), et Labrune sur Cegedim.

Terminons ce volet " Achats " par les renforts significatifs des managers au capital de situations spéciales (OPA plus ou moins récentes) : Devoteam, Envea, Tessi ou encore DNXCorp. La question de la sortie de Bourse à court ou moyen terme se pose forcément sur ces dossiers.

  • A la vente

on retrouve des biotech et medtech présentes dans le portefeuille de Truffle Capital, fonds de capital-risque français bien connu. La plupart ont vu leurs cours portés par des annonces très positives ces dernières semaines, à l’image d’Abivax, Carbios, et Carmat.

S’agissant de la biotech Neovacs, la situation est plus compliquée. En cessation de paiement fin 2019, la biotech se finance en émettant régulièrement des obligations convertibles très dilutives pour l’actionnaire individuel. Son PDG y souscrit tout en vendant régulièrement les actions issues de ces émissions d’obligations convertibles. Cette dilution exerce une pression très forte sur le titre, qui évolue actuellement entre 2 et 3 centimes.

L’envolée des " valeurs Covid " Bio-UV et Eurobio Scientific a été mise à profit par leurs dirigeants. A noter que sur cette dernière, les dirigeants avaient plutôt eu le nez creux en vendant massivement à la mi-avril alors que le cours avait connu un pic, vers 17€, avant de perdre la moitié de sa valeur. C’était sans compter sur les 2e et 3e vagues pandémiques qui ont porté le cours encore plus haut à la veille de la publication d’un chiffre d’affaires annuel supérieur aux attentes le 25 janvier (189 M€, +220%). Plusieurs dirigeants en ont profité pour diversifier leur patrimoine, vers 22€, freinant la hausse du cours les jours suivant la publication de cette bonne nouvelle. Chez Biosynex, qui vend également des tests Covid, si le même comportement de prises de bénéfices avait été observé de la part du management à la mi-avril 2020, la hausse du titre, semblable à celle d’Eurobio, a été mise à profit par la direction pour réaliser une augmentation de capital. Dans un cas comme dans l’autre, on y verra plutôt un signe de bonne valorisation de ces sociétés en Bourse que le contraire.

D’autres valeurs technologiques ont connu des ventes d’initiés notables en ce début d’année :

Medincell, le lendemain de l’annonce très bien accueillie des résultats positifs d'un essai clinique de phase 3 conçu pour évaluer l'efficacité d’un traitement des patients atteints de schizophrénie.

Fermentalg, quelques jours après avoir bondit de plus de 50% à l'annonce de la création prochaine d'une co-entreprise avec Suez. La small cap, valorisée une cinquantaine de millions d'euros, est spécialisée dans la recherche et l'exploitation bio-industrielle des microalgues. La co-entreprise, détenue à parité égale, développera des photo-bioréacteurs algaux capables de capter du CO2 par biomimétisme.

Claranova, mi-janvier, pour des montants de quelques dizaines à centaines de milliers d’euros de la part d’au moins cinq dirigeants (Pierre Cesarini, PDG de Claranova, n’y figure pas). Ces ventes autour de 7€ doivent être relativisées car elles interviennent en période d’exercice de stock-options à un prix de souscription de 5,3€. Il s’agit donc quelque part d’une partie variable de leur rémunération.

Les PDG d’Ekinops et d’Esker (dont le titre, qui se paie plus de 100 fois les résultats, affiche encore +34% depuis le début de l’année) ont également profité de l’engouement actuel des investisseurs pour la technologie pour s’alléger.

Enfin, dans l’immobilier, Alain Dinin (Nexity) a revendu vers 38€ une partie de ses actions achetées à bon compte courant 2020, au plus fort de la crise sanitaire pour certaines. Le promoteur Altarea a profité d’une folle envolée spéculative de sa nouvelle coquille vide NR21 pour s’alléger (à 14.6€ pour certains titres). Le soufflet est d’ailleurs bien retombé depuis, autour de 6€. Les 6 millions d’actions souscrites par Altarea à 1€ le 13 janvier 2021 restent une bonne affaire…

Les dirigeants d’Esker ont beau vendre, Esker n’en finit pas de monter, avec le Nasdaq en ligne de mire  (Source : PEA-Performance)