New York (awp/afp) - Dropbox, Spotify, Uber, Lyft... Alors que les entrées en Bourse reprennent nettement aux Etats-Unis, certains géants de la tech surnommés "licornes" préparent leur arrivée sur les marchés à pas feutrés.

Au mois de janvier, 18 entrées en Bourse (Initial Public Offering - IPO) ont été enregistrées dans le pays pour 7,9 milliards de dollars de capitaux levés, un début d'année record depuis que la société Dealogic compile ces statistiques en 1995.

L'année 2017 avait déjà montré le chemin de la reprise après une atonie de trois ans, 189 sociétés s'étant introduites aux Etats-Unis pour 49,4 milliards de dollars de capitaux levés.

"Wall Street est en très bonne santé, le contexte politique est stable désormais, les résultats des entreprises dans le monde sont bons et il n'y a pour l'heure pas de menace géopolitique majeure qui pourrait retarder les processus d'introduction", note Alex Ibrahim, à la tête de la division marchés de capitaux internationaux au sein du New York Stock Exchange (NYSE).

Malgré les chutes enregistrées sur les cours de Snap et de Blue Apron depuis leur introduction très remarquée l'an dernier (respectivement -20% et -70%), les débuts de la grande majorité des nouveaux venus ont été solides.

Le cabinet Renaissance Capital, spécialisé dans les entrées en Bourse, a noté un gain de 26% en moyenne entre l'arrivée sur le marché des entreprises introduites l'an dernier et fin 2017.

Ce contexte favorable encourage certaines "licornes", des entreprises non cotées valorisées au-delà du milliard de dollars et dont une centaine est dénombrée rien qu'aux Etats-Unis, à préparer le terrain pour leur prochaine arrivée.

- Dropbox, Spotify... -

C'est le cas du spécialiste du stockage de fichiers en ligne Dropbox. La société, valorisée autour de 10 milliards de dollars après son dernier tour de table en 2014, a déposé en janvier une demande confidentielle d'introduction en Bourse aux Etats-Unis, selon la presse américaine.

Cette demande pourrait la mener à une entrée en Bourse d'ici à l'été.

Permise depuis 2012 par une loi américaine et élargie l'été dernier aux grosses entreprises par le gendarme boursier américain (SEC), cette procédure vise à favoriser les entrées en Bourse sans avoir à révéler publiquement des informations confidentielles, du moins pas avant un stade avancé.

"Le temps de déterminer si les investisseurs institutionnels ont de l'appétit pour l'entreprise et si cet appétit lui offre le niveau de valorisation qu'elle estime nécessaire" à son développement, commente Douglas Ellenoff, avocat en droit des affaires.

D'après M. Ibrahim, cette procédure est utilisée aujourd'hui par 75% des entreprises qui lancent un processus de cotation.

Le géant suédois du streaming musical Spotify serait également sur les rangs pour se lister à la Bourse de New York via une procédure de cotation directe, sous réserve d'un feu vert de la SEC attendu prochainement.

La cotation directe, procédure atypique sur laquelle le NYSE mise pour attirer de nouvelles entreprises, permet d'économiser des coûts liés à une entrée en Bourse traditionnelle, comme certaines commissions versées aux banques aidant les entreprises à séduire les investisseurs. Elle évite également aux sociétés de lever de nouveaux capitaux.

D'après le Wall Street Journal, environ 30 millions de dollars seront versés par Spotify aux banques d'investissement qui suivent l'opération, soit trois fois moins que lors de l'introduction de Snap.

- Capitaux abondants -

"Les banques d'investissement sont généralement payées très cher pour permettre un processus de cotation propre. Ma crainte est que le mécanisme de fixation du prix ne soit pas aussi transparent et mature qu'il ne le serait dans une entrée en Bourse classique", indique M. Ellenoff. Cela ouvrirait, selon lui, la voie à un risque de forte volatilité sur le cours dans les premiers échanges suivant l'introduction

A l'image de Spotify, largement soutenue par des investisseurs privés aux poches profondes depuis plusieurs années, d'autres licornes pourraient suivre ce modèle, estiment de nombreux observateurs. Uber, Lyft ou Airbnb sont régulièrement évoqués, cette dernière ayant toutefois affirmé jeudi qu'elle ne prévoyait pas d'IPO cette année.

"Je ne pense pas qu'il y aura un raz-de-marée. Mais elles pourraient suivre cette voie si les débuts de Spotify sont un succès", indique M. Ellenoff.

Kathleen Smith, co-fondatrice de Renaissance Capital, se montre toutefois plus sceptique: "Il y a une raison à ce que la cotation directe n'ait pas été davantage pratiquée par le passé. Les nombreuses commissions et réunions que Spotify devra financer pour toucher les investisseurs pourraient lui coûter finalement plus cher sur le long terme."

afp/rp