PARIS (Agefi-Dow Jones)--Air France-KLM a levé le voile mardi sur ses objectifs à moyen terme. Le groupe aérien franco-néerlandais compte porter sa marge opérationnelle dans une fourchette de 7% à 8% d'ici à 2024, contre 4% attendu en moyenne par le consensus des analystes en 2019.

Cette ambition impose à la direction de combler significativement l'écart de marge d'exploitation entre les compagnies Air France et KLM. Dans un entretien accordé à l'agence Agefi-Dow Jones, Frédéric Gagey, le directeur général adjoint en charge des Finances, explique que cet écart doit se résorber autour de 2 à 2,5 points de pourcentage, notamment en renouvelant la flotte de la compagnie et en augmentant la contribution du segment 'premium'. Air France-KLM devra revenir à un résultat d'exploitation d'environ 1,9 milliard d'euros pour à nouveau distribuer un dividende à ses actionnaires. Ce qui pourrait intervenir au cours de l'année 2024.

Votre objectif de marge d'exploitation suppose d'augmenter la rentabilité d'Air France. Quelle est votre ambition pour la compagnie française ?

Frédéric Gagey: "Notre objectif est de réduire au maximum l'écart de marge entre Air France et KLM, qui était de 8 points de pourcentage en 2018, contre une fourchette de 2 à 2,5 points entre 2012 et 2015. Nous pensons qu'il est possible de revenir à cet écart de 2,5 points, ce qui porterait la marge d'exploitation d'Air France dans une fourchette comprise entre 6,5% à 7,5% en 2024, contre 9% à 10% pour KLM. Il sera difficile d'égaliser les marges de deux compagnies pour plusieurs raisons. Contrairement à KLM, Air France doit gérer deux bases autour de Paris : l'une pour son réseau international (Roissy) et l'autre pour son réseau domestique (Orly), qui est loin d'être à l'équilibre. Ce facteur à lui-seul explique 1 point d'écart de marges entre les deux compagnies. Ensuite, Air France subit en France des taxes et des charges plus lourdes que KLM aux Pays-Bas. Outre ces éléments structurels, Air France affronte une compétition internationale plus intense que KLM. A titre d'exemple, neuf compagnies relient quotidiennement Paris à New York contre seulement quatre pour la liaison Amsterdam-New York".

Quels leviers comptez-vous activer pour améliorer la marge d'Air France ?

F.G: "Cette amélioration repose sur trois piliers. Le premier est le plan de transformation d'Air France lancé par la directrice générale de la compagnie, Anne Rigail. Il est basé sur le retour aux fondamentaux en matière de performance opérationnelle, prévoyant notamment la réduction des capacités sur le réseau domestique et l'amélioration de la satisfaction des clients. Le plan prévoit également des mesures de réductions sur les achats.

Le deuxième volet porte sur le renouvellement de la flotte. Il a été récemment engagé et prévoit de sortir de la flotte les A380 et les A340 qui seront remplacés par des avions de nouvelle génération. Air France a également débuté le renouvellement des avions moyen-courrier en se tournant vers les A220, avions d'Airbus qui entreront dans la flotte en 2021. Ce renouvellement doit contribuer à environ un tiers de l'amélioration de 900 millions d'euros du résultat d'exploitation d'Air France.

Le dernier levier est lié aux travaux visant à améliorer la qualité des revenus d'Air France. Il s'agit de focaliser davantage Air France sur le segment de marché 'premium', en jouant sur l'optimisation des cabines pour augmenter le pourcentage des sièges sur cette catégorie et produire des recettes unitaires plus compatibles avec la base de coûts.

A quel horizon le marché peut-il espérer un retour du dividende ?

F.G: Dès que notre résultat d'exploitation se situera aux alentours de 1,9 milliard d'euros, il sera légitime de payer un dividende à nos actionnaires. Si nous suivons notre feuille de route, cela pourrait être le cas au cours de l'année 2024.

Quelle place la classe économie occupe-t-elle dans votre organisation ?

F.G: La classe économie continuera à représenter une part très importante des sièges dans nos avions. Il est hors de question bien sûr d'abandonner ces voyageurs et de ne pas leur apporter la meilleure qualité de service. Avoir une large classe économie permet de proposer des tarifs entrant en concurrence avec les compagnies low costs qui tentent de se développer sur le long courrier. L'économie reste une partie intégrante du chiffre d'affaires et de l'activité d'Air France. En dépit de ses ambitions dans le 'premium', Air France n'a pas vocation à devenir une compagnie de luxe.

Toutefois, dans la stratégie du groupe, le low cost moyen-courrier revient spécifiquement à Transavia, qui a connu un formidable développement depuis 4-5 ans. L'an dernier la marge de Transavia était à peu près équivalente en France et aux Pays-Bas, aux alentours de 9-10%. L'accord récemment signé par Ben Smith avec les partenaires sociaux de Transavia France supprimant la limitation de la flotte à 40 appareils nous permettra de nous développer sur ce segment. Il était irrationnel de limiter la flotte de Transavia alors que la demande pour des tarifs peu élevés est forte sur le moyen-courrier.

Vous avez conclu plusieurs accords avec les syndicats en France et aux Pays-Bas. Le plus dur est-il derrière vous ?

F.G: Ben Smith et Anne Rigail ont décidé depuis leur arrivée de renouveler la nature du dialogue social, notamment au sein d'Air France, et de tourner le dos à une période un peu chahutée. Depuis maintenant plus d'un an, les relations sont de qualité. Des accords ont été obtenus sur des sujets complexes. Par exemple, alors que la négociation du déblocage de la flotte de Transavia de 14 à 40 appareils était passée de manière compliquée en 2014, la négociation sur la levée de la limite de flotte s'est déroulée sans conflit.

-Julien Marion, Agefi-DowJones; et Antoine Landrot, L'Agefi +33 (0)1 41 27 47 94; jmarion@agefi.fred: ECH

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