NEW YORK/LONDRES (Reuters) - Le montant atteint par les fusions-acquisitions (M&A) au niveau mondial en 2022 est loin du niveau record de l'année dernière, en raison de l'effondrement des marchés de l'emprunt et de la volatilité des Bourses, mais les négociateurs prévoient une lente reprise en 2023.stock

Les opérations conclues depuis le début de l'année ont représenté un total de 3.660 milliards de dollars (3.448 milliards d'euros) selon les données de Dealogic, contre le record de 5.900 milliards de l'an dernier, soit une baisse de 37%.

D'après des banquiers d'affaires et des avocats spécialisés dans les M&A, les niveaux d'activité enregistrés en 2021 n'étaient pas tenables et une correction était inévitable. Ils soulignent toutefois que plusieurs rapprochements ont été bloqués au second semestre 2022 par les incertitudes macroéconomiques.

"Certains vendeurs espèrent encore le prix d'hier et certains acheteurs espèrent encore obtenir le financement d'hier bien que cela ne soit plus possible. C'est pourquoi nous avons vu moins d'activité", explique Dirk Albersmeier, coresponsable des fusions et acquisitions mondiales chez JPMorgan.

Aux Etats-Unis, le montant des fusions-acquisitions a chuté d'environ 43% à 1.530 milliards de dollars, tandis que l'Europe et l'Asie-Pacifique ont subi une baisse de 27% et de 30% respectivement, à un peu plus de 900 milliards de dollars chacune.

Au quatrième trimestre, l'activité mondiale de M&A a reculé de 56% à 641,2 milliards de dollars, avec la baisse de 66% des activités de capital-investissement.

"Les deux maux que sont les tensions géopolitiques et l'inflation, avec pour résultat une remontée des taux d'intérêt, se sont manifestés et ont eu un impact très négatif sur le marché", résume Tim LaLonde chez Evercore.

Le resserrement monétaire opéré par les banques centrales face à la hausse des prix a augmenté le coût du crédit, contraignant parfois les grandes sociétés de capital-investissement à renoncer à leurs ambitions.

Parmi les transactions les plus importantes conclues sur l'année, on peut citer l'OPA de 61 milliards de dollars du fabricant américain de semi-conducteurs Broadcom sur le fournisseur de services dans l'informatique dématérialisée VMware.

Sur la période octobre-décembre figurent parmi les grosses opérations l'acquisition d'Albertsons par le groupe de grande distribution Kroger pour 25 milliards de dollars et celle d'Horizon Therapeutics par Amgen pour 28 milliards.

Malgré un contexte économique et géopolitique difficiles, les entreprises stratégiques bien capitalisées devraient continuer à réaliser des opérations importantes pour leur stratégie commerciale à long terme, estime Ivan Farman, coresponsable des fusions-acquisitions mondiales chez Bank of America.

Son confrère pour la région Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA), Eamon Brabazon, s'attend à un rebond d'activité au deuxième trimestre.

"Nous aurons probablement une importante activité aux Etats-Unis en 2023, non seulement entre des entreprises américaines mais aussi des opérations transfrontalières", a déclaré Frank Aquila chez Sullivan & Cromwell.

Pour Lorenzo Corte, associé chez Skadden à Londres, les opérations dans le secteur de l'énergie devraient s'accélérer, conséquence de la guerre en Ukraine, car "l'Europe doit trouver des alternatives à l'énorme quantité de source d'énergie qui venait de Russie" jusqu'alors.

(Anirban Sen à New York et Pamela Barbaglia à Londres, version française Laetitia Volga, édité par Jean-Stéphane Brosse)

par Anirban Sen et Pamela Barbaglia