* Les livraisons affectés en janvier-février par un
ajustement de
la fabrication, dit Pfizer
* Six Etats membres de l'UE se plaignent des retards
* L'UE s'attend à des livraisons limitées jusqu'en mars
* Un tiers des Etats membres ont exprimé leur inquiétude -
source
* L'Allemagne semble pour l'instant mieux lotie que d'autres
pays
(Actualisé avec réactions française et italienne)
par Francesco Guarascio et Andrius Sytas
BRUXELLES/VILNIUS, 15 janvier (Reuters) - Pfizer a
annoncé vendredi un ralentissement temporaire de la production
et des livraisons de ses vaccins contre le COVID-19 afin de
modifier le processus de façon à l'accélérer ensuite, ce qui a
suscité l'inquiétude de nombreux Etats membres de l'Union
européenne.
La distribution du vaccin mis au point par le laboratoire
américain et son partenaire allemand BioNTech a
débuté fin décembre dans l'UE.
"Cette situation est inacceptable. Non seulement elle a un
impact sur les calendriers de vaccination prévus, mais elle
affecte également la crédibilité du processus de vaccination",
écrivent les ministres de la Santé et des affaires sociales de
Suède, du Danemark, de Finlande, de Lituanie, de Lettonie et
d'Estonie, dans une lettre adressée à la Commission européenne.
L'Allemagne, premier acheteur européen du vaccin, a
également jugé cette décision surprenante et regrettable.
Selon un membre non identifié de l'exécutif français cité
par l'AFP, le gouvernement devra "ajuster le rythme des
vaccinations" en raison de la "forte baisse" attendue des
livraisons du vaccin Pfizer-BioNTech dans les semaines à venir.
Cela ne remet toutefois pas en cause "le déploiement global de
la campagne vaccinale", a-t-on ajouté.
A Rome, les autorités ont fait savoir dans la soirée que
Pfizer leur avait annoncé une réduction de 29% de ses livraisons
à partir de lundi.
Le Canada, dont les approvisionnements proviennent d'une
usine Pfizer en Belgique, est lui aussi touché par ce
ralentissement temporaire des livraisons, a dit la ministre des
Achats Anita Anand aux journalistes.
Après avoir assuré que les livraisons se déroulaient "selon
le calendrier convenu", Pfizer a reconnu qu'il y aurait un
impact temporaire sur les expéditions de fin janvier à début
février en raison des modifications apportées aux processus de
fabrication pour stimuler la production.
La Norvège et la Lituanie avaient auparavant annoncé que la
société réduisait ses approvisionnements en Europe.
Ursula von der Leyen, présidente de la Commission
européenne, a indiqué par la suite que Pfizer lui avait assuré
que les livraisons prévues au premier trimestre ne seraient pas
retardées. Ni la société ni l'UE n'ont précisé le nombre de
doses attendues d'ici à la fin mars.
Pfizer, qui doit livrer des millions de doses à un rythme
effréné pour enrayer la pandémie qui a déjà fait près de deux
millions de morts, a promis que les modifications du processus
de fabrication "entraîneraient une augmentation significative
des doses fin février et mars".
DES LIVRAISONS MAL RÉPARTIES ?
Selon une source européenne, un représentant de la
Commission a expliqué lors d'une réunion mercredi que les
livraisons seraient limitées au moins jusqu'en mars et que la
production n'augmenterait de manière notable qu'en septembre.
La Belgique a déjà dit s'attendre à ne recevoir en janvier
que la moitié environ des quantités de vaccin Pfizer-BioNTech
prévues en raison d'un problème logistique et la Lituanie dit
avoir été informée cette semaine que ses livraisons seraient
réduites de moitié jusqu'à la mi-février.
"Le fabricant nous a dit que les réductions concernaient
toute l'UE", a déclaré vendredi à Reuters Vytautas Beniusis,
porte-parole du ministère de la Santé lituanien.
Pfizer et BioNTech ont signé avec l'UE des contrats
prévoyant la livraison d'un maximum de 600 millions de doses de
leur vaccin cette année, dont 75 millions au deuxième trimestre.
Les volumes prévus pour les trois premiers mois de l'année n'ont
pas été précisés publiquement.
Moderna s'est engagé de son côté à livrer 10 millions de
doses d'ici la fin mars, puis 35 millions au deuxième trimestre
et autant au troisième. Quatre-vingts millions de doses
supplémentaires doivent être livrées avant la fin de l'année,
mais aucun calendrier détaillé n'a été publié.
Les fabricants de vaccins n'ont pas précisé non plus les
calendriers de livraison par pays, sachant que chaque Etat
membre doit être approvisionné au prorata de son poids dans la
population totale de l'UE.
Chez Moderna, un porte-parole a déclaré qu'"à ce stade, nous
pouvons simplement confirmer que les doses seront distribués sur
la base du prorata entre les pays de l'UE".
Dans l'immédiat, cette proportionnalité ne semble pourtant
pas respectée: l'Allemagne, qui compte 83 millions d'habitants,
prévoit de recevoir quatre millions de doses du vaccin
Pfizer-BioNTech d'ici fin janvier alors que la Roumanie, avec
une population quatre fois inférieure, n'en attend que 600.000
et la Bulgarie, dix fois moins peuplée, à peine 60.000.
(Avec Andrius Sytas à Vilnius, Tsevetelia Tsolova à Sofia, Radu
Marinas à Bucarets et Elvira Pollina à Milan; version française
Marc Angrand et Jean-Philippe Lefief, édité par Nicolas Delame
et Jean-Stéphane Brosse)