Londres (awp/afp) - La société irlandaise AerCap va racheter la filiale de location d'avions GECAS du conglomérat américain General Electric (GE) dans une opération à 30 milliards de dollars, qui va donner naissance à un géant dans un secteur bouleversé par la pandémie.

GE va recevoir 24 milliards de dollars en numéraire, une participation de 46% dans la nouvelle société et un milliard de dollars à la clôture de l'opération, selon des communiqués distincts des deux groupes publiés mercredi.

Il s'agit d'une opération majeure entre les deux sociétés, qui achètent des avions à Airbus ou Boeing par exemple pour les louer aux compagnies aériennes.

Au total, la nouvelle entité possédera ou gérera plus de 2.000 avions et 300 hélicoptères, et comptera environ 300 clients dans le monde.

"Alors que la reprise du transport aérien gagne en intensité, cette transaction représente une occasion unique qui va créer de la valeur sur le long terme pour nos investisseurs", souligne Aengus Kelly, directeur général d'AerCap.

GE va de son côté utiliser les fonds récoltés pour réduire son énorme dette. Grâce à la transaction et à sa trésorerie existante, il compte se désendetter de 30 milliards de dollars. Il aura réduit sa dette de 70 milliards de dollars depuis fin 2018.

L'opération devrait être bouclée d'ici 9 à 12 mois, après le feu vert espéré des actionnaires d'AerCap et des régulateurs.

La fusion intervient alors que le transport aérien vit une crise historique en raison de la pandémie, avec une chute des ventes de billets d'avion et des reports, voire des annulations, de commandes d'avions de la part des compagnies aériennes.

AerCap, qui avait dégagé un profit de 1,1 milliard de dollars en 2019, a perdu 299 millions en 2020. Même tendance chez GECAS, qui avait gagné plus d'un milliard de dollars en 2019 avant de perdre 786 millions en 2020.

Mais le déploiement de campagnes de vaccinations contre le Covid laisse entrevoir une amélioration prochaine pour les compagnies aériennes, aux finances fragilisées par la crise sanitaire. Un contexte a priori bénéfique pour les loueurs d'avion.

Cure d'amaigrissement

Un rapprochement entre deux géants d'un secteur signifie souvent qu'ils peuvent plus facilement augmenter leurs prix.

Mais les compagnies aériennes ont dans ce cas "toujours beaucoup d'options pour financer leurs avions: en négociant directement avec Boeing et Airbus, en passant par des loueurs d'avions, en empruntant à la banque ou en achetant en cash", remarque Colin Scarola du cabinet CFRA.

L'opération représente par ailleurs une nouvelle étape dans la transformation de GE, engagé depuis plusieurs années dans une cure d'amaigrissement en raison d'un endettement élevé et de quelques mauvais paris.

Le plus symbolique fut le rachat pour 15 milliards de dollars en 2015 du pôle énergie du fleuron industriel français Alstom, intervenu en pleine chute des prix de l'électricité de gros et de l'effondrement des commandes des turbines.

GE Capital, la division qui chapeaute GECAS, a de son côté été fortement bousculée dans le sillage de la crise financière de 2008 et a déjà cédé de nombreux actifs.

Larry Culp, PDG de GE, estime que la cession de GECAS va permettre à son groupe d'être "plus recentré, plus simple et plus solide".

Aux commandes depuis fin 2018, il a déjà cédé des activités considérées comme non stratégiques, comme la biopharmacie vendue en 2019 à Danaher pour 21 milliards de dollars.

L'opération avec AerCap "correspond à la stratégie à long terme de GE qui cherche à réduire GE Capital depuis longtemps pour se concentrer plus sur les activités d'ingénierie, de design, de fabrication de produits, plutôt que sur les façons de les financer", relève M. Scarola.

Mais "il faut peser les avantages d'une réduction de la dette contre la perte d'un business profitable et source de croissance sur le long terme" comme l'étaient la biopharmacie ou la location d'avions, souligne M. Scarola. Cela signifie aussi que GE "se concentre plus sur les secteurs de l'aéronautique et de l'énergie, qui ne sont pas en grande forme en ce moment."

afp/rp