par Wendell Roelf

LE CAP, 22 décembre (Reuters) - Les compagnies maritimes passant par le cap de Bonne-Espérance pour éviter les attaques des rebelles houthis en mer Rouge sont confrontées à des difficultés de ravitaillement et d'approvisionnement dans les ports africains dues à des contraintes administratives, la congestion et le manque d'équipements, selon les entreprises et les analystes.

Malgré un temps de trajet allongé, des centaines de grands navires ont décidé de contourner la pointe sud de l'Afrique plutôt de que passer par la mer Rouge afin d'échapper aux attaques répétées des Houthis du Yémen.

Celles-ci ont perturbé le commerce international par le canal de Suez, la route maritime la plus courte entre l'Europe et l'Asie, par laquelle transite environ un sixième du trafic mondial.

Selon un indice de la Banque mondiale pour l'année 2022 publié en mai, les principaux ports d'Afrique du Sud, notamment Durban, l'un des plus importants sur le continent en termes de volumes de conteneurs traités, ainsi que les ports du Cap et de Ngqura, sont parmi les moins performants au monde.

"Durban, même dans l'état où il se trouve actuellement, reste le port le plus avancé et le plus grand d'Afrique, et les navires qui se déroutent le long du continent n'ont donc qu'un choix très limité pour accoster et se réapprovisionner", a déclaré à Reuters Alessio Lencioni, consultant en logistique et en chaîne d'approvisionnement.

D'autres grands ports africains en eaux profondes situés le long de la route du Cap, tels que Mombasa au Kenya et Dar es Salaam en Tanzanie, manquent d'équipement pour absorber le trafic attendu au cours des deux prochaines semaines, estime Alessio Lencioni.

Le groupe de transport maritime Maersk a déclaré que les navires contournant le Cap essaieront, dans la mesure du possible, de se ravitailler en carburant à leur point d'origine ou de destination.

"Si un ravitaillement en route s'avérait nécessaire, il serait décidé au cas par cas, Walvis Bay (Namibie) ou Port Louis (île Maurice) étant les meilleures options", a déclaré son porte-parole.

CAP DES TEMPÊTES

Naviguant dans des conditions météorologiques difficiles avec une mer agitée, fréquentes au "Cap des Tempêtes" ainsi que dans le canal du Mozambique exposé aux cyclones, les navires risquent de consommer leur carburant plus rapidement, ce qui rend les services de ravitaillement - ou soutage - cruciaux, soulignent les compagnies maritimes.

"À Singapour, nous livrons des volumes de soute plus importants aux navires qui effectueront désormais des voyages plus longs", a déclaré un porte-parole de TFG Marine, une filiale du négociant en énergie Trafigura.

Les contraintes administratives constituent une autre difficulté. En septembre, les autorités fiscales sud-africaines ont arrêté cinq navires de ravitaillement dans la baie d'Algoa, soupçonnés d'avoir enfreint la loi sur les douanes et les droits d'accise. BP, Trafigura et Mercuria ont tous été frappés de suspension dans l'attente d'audits.

Depuis le lancement en 2016 du premier service sud-africain de soutage offshore de navire à navire dans la baie d'Algoa, les volumes de carburant et le nombre de navires utilisant ce service ont fortement augmenté.

Un porte-parole de Heron Marine, la filiale de TFG Marine présente dans la baie d'Algoa, a déclaré que la société travaillait avec les clients pour répondre à leurs besoins de soutage. Mercuria et BP n'ont pas répondu dans l'immédiat aux demandes de précisions.

Pour répondre aux besoins prévus en carburant marin, les importations devraient atteindre environ 230 kilotonnes en décembre, selon les analystes.

"L'Afrique du Sud s'attend à un niveau record d'importations de fioul en décembre, en raison de la demande de ravitaillement liée à la crise (provoquée par) les Houthis", a déclaré Younes Azzouzi, analyste de marché chez Kpler, spécialiste des données et de l'analyse. (avec la contribution de Jonathan Saul à Londres, version française Dagmarah Mackos, édité par Blandine Hénault)