Zurich (awp) - Les collectivités publiques tessinoises pourraient voir disparaître des recettes fiscales jusqu'à hauteur de 50 millions de francs suisses, et les caisses de la Confédération de 30 millions, comme conséquence de l'accord conclu par le groupe français Kering avec les autorités fiscales italiennes, à qui il va verser une somme record de 1,25 milliard d'euros.

Suite à l'enquête concernant sa marque phare Gucci, la multinationale du luxe s'est vu reprocher de soustraire au Trésor transalpin 14,5 milliards d'euros par le biais de sa filiale helvétique Luxury Goods International (LGI).

Basée à Candempino, dans la région de Lugano, cette dernière concentrait plus de trois quarts des bénéfices du groupe afin de tirer profit un taux d'imposition préférentiel à 8%. En 2017, elle y avait déclaré un bénéfice net à hauteur de 1,7 milliard.

Selon des informations recueillies par la RSI, Kering a dans le cadre de l'enquête italienne, transféré son siège fiscal de Suisse en Italie, avec à la clé un important report de recettes fiscales. Sollicitée lundi par AWP, l'entreprise s'est contentée de faire savoir par son service de presse qu'elle se refuse à commenter ce qu'elle qualifie de "rumeurs de marché".

Démantèlement programmé

"Il semble logique que sans avantages fiscaux, le maintien de la logistique au Tessin n'a plus de sens pour le colosse français du luxe" fait valoir la journaliste d'investigation Anna Bernasconi. Selon ses informations, Kering serait en train de préparer le démantèlement des activités logistiques dans un délai estimé à 2-3 ans.

Au total, le montant cumulé des contributions fiscales du groupe en Suisse oscillerait autour de 80 millions de francs suisses par an en moyenne. Sur cette somme, la part des communes et du canton italophone se monte à 40-50 millions, alors que 30 millions de recettes fiscales environ alimentent les finances fédérales.

Avec le transfert de siège fiscal, ces rentrées se retrouveront amputées de 80% pour l'année en cours, et de 95% pour les successives, anticipe Mme Bernasconi. Des chiffres que le ministre tessinois en charge des finances et de l'économie, Christian Vitta, interrogé par la RSI, a refusé de commenter au nom du secret fiscal.

En décembre dernier, le Conseil d'État avait indiqué, en réponse à l'interpellation d'un député, que les recettes générées par les 40 principales entreprises du secteur de la mode au Tessin s'est monté en 2017 à "environ 40 millions de francs suisses, soit 12% des recettes fiscales cantonales cumulées des personnes juridiques" (335 millions).

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