(Actualisation: précisions sur les frais de gestion, déclarations du directeur général Frédéric Oudéa, contexte, réaction en Bourse)

Société Générale a prévenu jeudi qu'elle risquait de ne pas atteindre son objectif de rentabilité en 2016, en raison du durcissement des contraintes réglementaires et de la conjoncture actuelle. La troisième banque française cotée a également publié un bénéfice net inférieur aux attentes des analystes, à 656 millions d'euros, au titre du quatrième trimestre, après une augmentation de sa provision pour litiges et de ses frais de gestion.

"L'augmentation des exigences en capital et l'environnement économique et financier ne permettent pas de confirmer l'objectif de ROE [rentabilité sur fonds propres] de 10% dès fin 2016", a prévenu la banque dans un communiqué, même si "le groupe est confiant dans la capacité de son modèle à générer une rentabilité sur fonds propres (ROE) de 10%". En 2015, le ROE du groupe s'est établi à 8,1%, contre 7,3% en 2014.

La banque a dégagé un bénéfice net en hausse de 20% à 656 millions d'euros au quatrième trimestre 2015, contre 549 millions d'euros un an plus tôt. Le produit net bancaire a diminué de 1%, à 6,05 milliards d'euros.

Ces annonces défavorables entraînent un net repli du cours de Bourse de la banque jeudi. Vers 12h15, le titre cédait 11,8% à 27,71 euros, accusant la plus forte baisse de l'indice CAC 40.

Société Générale a raté le coche au quatrième trimestre", estime Tangi Le Liboux, analyste chez Aurel BGC, qui anticipait un bénéfice net de 944 millions d'euros pour la banque.

Réaction exagérée des marchés, selon Oudéa

Cependant, le directeur général de Société Générale, Frédéric Oudéa, a estimé, lors d'une conférence de presse, que les investisseurs réagissaient de manière exagérée aux enjeux auxquels sont confrontées les banques européennes, qui cherchent à améliorer leurs bénéfices dans un contexte de taux d'intérêt ultra-faible, de réglementation accrue et de volatilité des marchés.

Les valeurs bancaires européennes ont accusé de lourdes pertes depuis le début de l'année, en raison des préoccupations du marché au sujet de leurs niveaux de fonds propres et de leur rentabilité.

Attribuant la chute récente des valeurs bancaires aux incertitudes réglementaires, Frédéric Oudéa a estimé qu'il existait "une deconnexion entre ce qu'on observe sur les marchés et l'économie réelle", a déclaré Frédéric Oudéa. "Il faudrait qu'on arrive à clore le sujet de la réglementation", a-t-il ajouté.

Des dépenses en hausse

Ce montant intègre une augmentation de 400 millions d'euros de sa provision collective pour litiges, à 1,7 milliard d'euros au total. Les autorités américaines mènent une enquête sur Société Générale pour violation présumée des sanctions imposées à certains pays.

Au total, les frais de gestion ont crû de 3,3% au quatrième trimestre, une situation qui inquiète les analystes alors que Société Générale a réalisé des économies d'un montant de 900 millions d'euros entre 2013 et 2015 et compte réduire encore ses coûts de 850 millions d'euros en 2016 et 2017.

Les coûts au quatrième trimestre dépassent de 5,6% le consensus, observent les analystes de Kepler Cheuvreux, en raison "d'effets de change, de la forte hausse des coûts et taxes réglementaires et des frais juridiques.

Société Générale a également comptabilisé une plus-value de 147 millions d'euros au quatrième trimestre sur la cession de sa participation de 20% au capital d'Amundi, dans le cadre de l'introduction en Bourse du gestionnaire d'actifs l'année dernière.

Sur l'ensemble de l'exercice 2015, Société Générale a réalisé un bénéfice net de 4 milliards d'euros, en hausse de 49% sur un an, et un produit net bancaire de 25,64 milliards d'euros, en progression de 8,8%.

Les frais de gestion ont augmenté de 5,3% en 2015, à 16,89 milliards d'euros. Si l'on exclut la la hausse des coûts fiscaux, réglementaires et juridiques, ainsi que les coûts de restructuration liés au nouveau plan d'économies du groupe, la progression s'établit à 1,4%, a indiqué la banque.

Le groupe, qui entre dans la dernière année de son plan stratégique 2013-2016, a précisé que ses frais de gestion depuis 2013 avaient progressé "légèrement plus vite qu'attendu (+2% en rythme annuel contre +1% annoncé) en raison des charges liées au nouvel environnement fiscal et réglementaire et des investissements nécessaires à la transformation des métiers".

Difficultés dans la banque d'investissement et en Russie

Au quatrième trimestre, l'amélioration du produit net bancaire de la banque de détail en France a permis à Société Générale de compenser les difficultés de la banque d'investissement et les pertes accusées en Russie, où l'économie reste en crise en raison des sanctions imposées par les Etats-Unis et l'Union européenne au pays, au quatrième trimestre.

La banque de détail en France a dégagé un bénéfice net trimestriel de 315 millions d'euros, en hausse de 27% par rapport au quatrième trimestre 2014, tandis que le pôle banque de grande clientèle et solutions investisseurs a vu son résultat net chuter de 35% à 275 millions d'euros sur la période.

En Russie, où Société Générale contrôle Rosbank, une des plus grandes banques privées du pays, le groupe a accusé une perte de 8 millions d'euros au quatrième trimestre.

Amélioration des ratios de solvabilité

La croissance des bénéfices de la banque au quatrième trimestre lui a permis d'accumuler des fonds propres supplémentaires afin de respecter les contraintes réglementaires en Europe. La banque a indiqué que son ratio de solvabilité Core Equity Tier 1 (CET1) s'établissait à 10,9% au 31 décembre 2015, contre 10,5% à fin septembre. Société Générale vise un ratio CET1 de 11,5% à 12% d'ici à 2019.

Le ratio de levier, une autre mesure de la solvabilité des banques, ressortait à 4% au 31 décembre, contre 3,9% à fin septembre.

Par ailleurs, Société Générale a proposé un dividende de 2 euros par action au titre de l'exercice 2015, à comparer à 1,2 euro par action un an plus tôt.

-Valérie Venck et Noémie Bisserbe, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 75; valerie.venck@dowjones.com ed: ECH