par Sophie Yu et Yew Lun Tian

PEKIN, 10 août (Reuters) - A Pékin, dans les restaurants de la chaîne Nanchengxiang, les clients peuvent profiter de petits-déjeuners composés de trois types de soupes de riz, de soupes aigres et pimentées ou encore de lait pour le prix imbattable de 38 centimes d'euros.

"De nombreux choix, bons marchés sont apparus pendant la pandémie (...) Il y a de nouvelles bonnes affaires tout le temps, il faut juste savoir les trouver", souligne Gao Yi, 71 ans, qui est venue petit-déjeuner avec son petit-fils dans un des 160 restaurants de la chaîne implantés dans la capitale chinoise.

Les petits-déjeuners à 38 centimes illustrent la déflation qui frappe la Chine.

Les restaurateurs rivalisent de prix bas et de bons plans pour attirer des consommateurs qui ont moins d'appétit que par le passé.

Les observateurs s'inquiètent qu'une telle course aux bas prix puisse menacer les petits commerces, incapables de rivaliser avec les promotions agressives des grands groupes du secteur.

A l'instar de la déflation au Japon dans les années 1990, la croissance économique pourrait être menacée.

"Les bons plans sont nécessaires pour attirer les clients et il y a donc beaucoup de pression sur ces commerces pour trouver des marges", affirme Ben Cavender de China Market Research Group à Shanghaï.

Contrairement à leurs homologues occidentaux, les Chinois ont dû se débrouiller financièrement pendant l'épidémie alors que le gouvernement subventionnait en priorité le secteur manufacturier. Une fois les restrictions levées, il n'y a pas eu de vague consumériste comme espérée par certains économistes.

Avec des salaires et des allocations qui n'ont guère augmenté et un marché du travail saturé, les dépenses des consommateurs chinois sont limitées par une économie stagnante.

"Les stratégies de baisse de prix, d'offrir aux consommateurs un meilleur choix niveau rapport qualité/prix correspond à la situation économique actuelle", affirme Zhu Danpeng, vice-président de l'Alliance provinciale de promotion de la sécurité alimentaire de la province du Guangdong (sud-est).

A Pékin, le restaurant de la chaîne Nanchengxiang était bondé jeudi, comme tous les matins depuis que l'entreprise a commencé en mai à proposer des repas à 38 centimes, selon le personnel.

Nanchengxiang n'a pas donné suite aux demandes de commentaires de Reuters.

Xishaoye, une chaîne de burger basée dans la capitale chinoise, a également baissé ses prix, proposant des produits à 10 yuans (1,26 euros). Yum China qui opère les restaurants de KFC en Chine attire les consommateurs en proposant des menus à 19,9 yuans (2,50 euros).

"Les gens sont de retour mais les dépenses par consommateurs ont baissé", affirme à Reuters le directeur général de Yum, Joey Wat.

"Dans notre esprit, la pandémie semble remonter à très longtemps, mais ce n'est pas le cas", poursuit-il.

Dong, un employé de restaurant qui n'a pas souhaité donner son nom de famille, est allé dans un marché de Pékin jeudi midi mais n'a rien acheté.

"J'ai un prêt immobilier et un enfant. Je n'ai pas le choix que d'être plus prudent", affirme-t-il. (Version française Zhifan Liu, édité par Kate Entringer)