WASHINGTON (Reuters) - Les démocrates se préparent à vivre des élections de mi-mandat périlleuses mardi aux Etats-Unis, la perte possible d'au moins l'une des deux chambres du Congrès risquant d'affaiblir un peu plus un Joe Biden déjà fragilisé tout en remettant pleinement en selle Donald Trump en vue de la prochaine présidentielle.

Signe de ses difficultés, le président américain a choisi un terrain conquis pour s'adresser une dernière fois aux électeurs ce lundi, plutôt que de se rendre dans l'un des Etats où un scrutin serré pourrait faire basculer d'un côté ou de l'autre la Chambre des représentants ou le Sénat.

Alors que sa popularité déclinante le rend indésirable dans une grande partie du pays, Joe Biden va prendre la parole dans le Maryland, Etat acquis aux démocrates, dont le candidat pour le poste de gouverneur, Wes Moore, est quasiment assuré d'être élu.

Sur fond de mécontentement croissant de la population face à la hausse des prix, les observateurs de la vie politique américaine s'attendent à ce que les républicains reprennent le contrôle de la Chambre des représentants, renouvelée entièrement, voire du Sénat, renouvelé au tiers.

Un tel scénario anéantirait quasiment la capacité d'action du président démocrate pour les deux dernières années de son mandat, non seulement pour la mise en oeuvre de ses projets politiques mais aussi pour les nominations à de nombreux postes administratifs ou judiciaires, susceptibles d'être bloquées par un Sénat hostile.

Joe Biden a prévenu qu'une victoire républicaine risquerait de saper les fondements mêmes de la démocratie américaine.

"La démocratie est littéralement en jeu", a-t-il déclaré dimanche lors d'un rassemblement électoral à Yonkers, dans l'Etat de New York.

Beaucoup de candidats républicains reprennent à leur compte les accusations infondées de fraude lancées par Donald Trump pour contester sa défaite face à Joe Biden lors de l'élection présidentielle de novembre 2020.

Certains d'entre eux pourraient accéder à des postes de gouverneur ou d'autres hautes fonctions dans des Etats où se décidera la prochaine présidentielle, et jouer ainsi un rôle crucial dans l'issue du scrutin.

L'AVORTEMENT N'EST PLUS UN THÈME PRIORITAIRE

Donald Trump s'est personnellement impliqué dans cette campagne des "midterms". L'ancien président s'est ainsi efforcé de peser sur la sélection des candidats républicains tout en continuant d'orienter la ligne politique du parti et en laissant entendre qu'il serait de nouveau candidat à la présidence des Etats-Unis en 2024.

Avec l'appui des deux chambres du Congrès contrôlées par les démocrates depuis 2020, Joe Biden a jusqu'à présent pu mettre en oeuvre certaines de ses promesses de campagne, en matière de développement des énergies renouvelables, de lutte contre la pandémie de COVID-19 ou de plan de rénovation des infrastructures défaillantes du pays.

Sa popularité a toutefois pâti d'une inflation élevée et d'un sentiment d'insécurité croissante dans une partie de la population. Seulement 40% des Américains approuvent désormais son action, selon un sondage Reuters-Ipsos conclu mardi dernier.

Contrairement à lui, nombre de démocrates n'ont pas voulu dramatiser l'enjeu de ces élections, préférant mettre l'accent sur des aspects concrets de leurs projets politiques tels que la baisse des prix des médicaments ou la défense du système de protection sociale.

Ils ont un temps espéré que la remise en cause du droit à l'avortement par la Cour suprême allait attirer vers eux une partie de l'électorat féminin mais les études d'opinion montrent que ce thème a perdu en importance à l'approche des "midterms".

Dans de nombreux Etats où les élections s'annoncent serrées, des candidats démocrates ont refusé d'apparaître aux côtés du président ou même de dire s'ils le soutiendraient en cas de tentative de réélection en 2024.

Plus de 40 millions d'Américains ont déjà voté, soit dans un bureau de vote soit par correspondance, selon les données de l'US Elections Project.

Comme certains Etats autorisent l'envoi des bulletins par correspondance jusqu'au jour du scrutin, des experts prédisent qu'il pourrait falloir attendre plusieurs jours, voire semaines, avant de savoir qui des démocrates ou des républicains contrôleront le futur Congrès en cas d'issue indécise.

Les républicains comptent actuellement 50 sénateurs, soit autant que les démocrates qui contrôlent cependant la chambre haute via la voix supplémentaire de la vice-présidente Kamala Harris, et il leur suffit donc de reprendre un siège à leurs adversaires pour y redevenir majoritaires.

La Chambre des représentants est composée de 435 élus, actuellement 220 démocrates et 212 républicains avec trois sièges vacants.

(Reportage Andy Sullivan, version française Bertrand Boucey, édité par Sophie Louet)

par Andy Sullivan