* Moscou ordonne des manoeuvres militaires dans l'Ouest

* Heurts en Crimée entre pro et anti-Maïdan

* Nouveau gouvernement attendu à Kiev

* Inquiétudes sur la situation financière de l'Ukraine

* Viktor Ianoukovitch toujours introuvable

par Alessandra Prentice et Richard Balmforth

KIEV/SIMFEROPOL, 26 février (Reuters) - La tension est montée d'un cran mercredi entre Moscou et Kiev et le président Vladimir Poutine, silencieux depuis la chute de son homologue ukrainien Viktor Ianoukovitch il y a quatre jours, a montré les dents en ordonnant d'importantes manoeuvres militaires dans l'ouest de la Russie.

Le Kremlin, inquiet pour l'avenir de la population russophone d'Ukraine et de sa base navale de Sébastopol, port d'attache de la flotte de la mer Noire en Crimée, a multiplié les mises en garde contre les tendances "néofascistes" apparues à l'occasion de ce que la Russie considère comme un coup de force contre un pouvoir légitime.

A Simféropol, capitale de la République autonome de Crimée cédée par les Soviétiques à l'Ukraine en 1954, des milliers de Russes de souche, majoritaires dans cette région, ont manifesté mercredi contre le nouveau pouvoir issu des trois mois de manifestations de Maïdan à Kiev, criant leur attachement à la Russie.

Revêtus pour certains du costume traditionnel cosaque, ils se sont heurtés à des partisans des nouvelles autorités ukrainiennes, en majorité des membres de la minorité tatare de Crimée. (voir )

Face aux risques de partition du pays, les ministres de la Défense de l'Otan réunis à Bruxelles ont à leur tour défendu l'intégrité territoriale de l'Ukraine. ( )

La poursuite de la crise a entraîné mercredi une chute de 4% de la monnaie nationale, la hryvnia, et fait craindre que le pays, qui a réclamé une aide internationale, ne se retrouve en défaut de paiement. ( )

MOSCOU DÉNONCE LES "NÉOFASCISTES"

"En accord avec un décret du président de la Fédération de Russie, les forces du district militaire Ouest ont été placées en état d'alerte à 14h00 (10h00 GMT) aujourd'hui", a annoncé dans la matinée le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou.

Ces manoeuvres prendront fin le 3 mars. Elles impliqueront les centres de commandement des forces de défense aériennes et spatiales, des parachutistes, l'aviation à long rayon d'action et mobiliseront également des unités du centre de la Russie. (voir )

"Nous sommes très attentifs à ce qui se passe en Crimée, à ce qui se passe autour de la flotte de la mer Noire", a souligné le ministre de la Défense. "Nous prenons des mesures pour garantir la sécurité des installations, des infrastructures et des arsenaux de la flotte", a-t-il ajouté.

Sergueï Lavrov, chef de la diplomatie russe, a pour sa part demandé à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) de "condamner résolument" l'apparition d'une tendance "nationaliste et néofasciste" dans l'ouest de l'Ukraine.

Son ministère a dénoncé les "extrémistes qui imposent leur volonté" et exacerbent les tensions religieuses en Ukraine. Selon lui, des prêtres et des biens appartenant à l'Eglise orthodoxe russe ont fait l'objet de menaces et ces tensions pourraient donner lieu à "un schisme encore plus important de la société ukrainienne".

GOUVERNEMENT ATTENDU DANS LA SOIRÉE À KIEV

Les pays occidentaux ont demandé au Kremlin, qui a mené en août 2008 une courte guerre contre la Géorgie, de ne pas intervenir directement dans la crise ukrainienne. A l'annonce des manoeuvres militaires russes près de la frontière, le secrétaire britannique à la Défense, Philip Hammond, a exhorté "toutes les parties à laisser le peuple ukrainien régler lui-même ses différends internes et décider de son avenir sans ingérence étrangère".

La composition du nouveau gouvernement ukrainien doit être annoncée dans la soirée à Kiev, ce qui devrait permettre de faire avancer les discussions avec le Fonds monétaire international (FMI). En visite à Kiev, le diplomate américain William Burns, secrétaire d'Etat adjoint, a précisé que des experts financiers américains étaient déjà sur place. (voir ID:nL6N0LV3N6])

L'ancien président Ianoukovitch, qui a fui vendredi soir sa luxueuse datcha de la banlieue de Kiev, reste introuvable. Il est recherché pour "meurtres de masse".

Olexander Tourtchinov, désigné président par intérim, assume depuis mercredi matin les fonctions de chef des forces armées. Le ministre de l'Intérieur, Arsen Avakov, a annoncé la dissolution de la police antiémeute, dont les affrontements avec des manifestants ont fait une centaine de morts à Kiev. Les tireurs de la "Berkout" sont accusés d'avoir tué la plus grande partie des victimes des trois jours de heurts la semaine dernière. (Avec Gabriela Baczynska à Donetsk et Steve Gutterman à Moscou; Guy Kerivel pour le service français)