Pierre Moscovici,membre de la Commission. - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, merci de ce débat politique qui a été, je crois, de grande qualité.

Ce que je constate, je n'en suis pas surpris non plus, c'est une très grande convergence de vue entre nous sur la volonté politique, mais aussi sur les mesures à adopter.

Cette alliance entre la Commission et le Parlement européen, elle est fondamentale si nous voulons poursuivre notre combat contre l'évasion fiscale, la fraude et l'optimisation fiscale agressive.

Au fond, maintenant, l'enjeu est sur la table, c'est de gagner la bataille contre l'évasion fiscale.

À ceux qui disent le contraire, je réponds tout de même que nous avons fait, oui, beaucoup de progrès ces trois dernières années et je suis impressionné par cette vraie révolution de la transparence, qui est en cours, avec tout de même une avancée historique que nous devons valoriser qu'est la fin du secret bancaire en Europe.

Mais, vous avez tous raison, ce n'est pas assez, face à un phénomène qui est systémique et planétaire.

Il nous faut donc continuer à agir avec détermination et rapidement, avec encore plus de détermination, encore plus de rapidité.

Dans 18 mois, nos concitoyens vont voter pour élire un nouveau Parlement européen et si nous ne faisons pas la preuve de changement sur ce sujet fondamental, nous perdrons tous ces élections au profit des populistes, des cyniques qui, en vérité, sont les alliés des fraudeurs.

Nous devons donc tous prendre nos responsabilités.

Tous? C'est qui? Ce sont d'abord les États membres, qui ont déjà entamé leur évolution, mais qui parfois ont encore des timidités, qui doivent aller plus loin, qui doivent accélérer leurs travaux, qui doivent conclure rapidement sur les propositions qui sont sur la table.

Je pense à l'annonce, le 5 décembre, de la liste européenne des paradis fiscaux et des sanctions dissuasives. Je pense à des règles comme la lutte contre les intermédiaires fiscaux dans les six mois. Je pense à une assiette fiscale européenne pour les sociétés d'ici un an et je pense aussi, bien sûr, au trilogue en cours sur le blanchiment d'argent.

C'est ensuite la Commission européenne qui doit prendre ses responsabilités. Croyez-le bien, cette Commission, et moi-même en tant que commissaire chargé de la fiscalité, allons poursuivre sans relâche, jusqu'au dernier jour de notre mandat, cette bataille. Il n'y aura pas d'année finale, timide sur ce terrain.

D'autres propositions viendront qui pousseront toutes à plus de transparence, plus de coopération entre administrations fiscales et, d'ici là, je continuerai à aiguillonner les États membres pour qu'ils adoptent cette liste de paradis fiscaux.

Pour qu'elle soit crédible et ambitieuse, nous coopérons bien avec l'OCDE, je veux le dire, mais nous avons une ambition supérieure, tout simplement parce que nous avons un degré d'intégration supérieur et des critères qui sont plus puissants.

La Commission sera la gardienne de cette liste, mais attention, ne négligez pas que cette liste, ce n'est pas nous qui la proposons, ce n'est pas nous qui l'élaborons, ce sont les États membres.

J'ajoute, enfin, qu'il faudra ensuite poursuivre les infractions contre les États qui ne respectent pas les règles, mais je prends ici un engagement: si la liste noire n'est pas à la hauteur, si elle n'est pas assez crédible, si elle n'est pas assez substantielle, si les sanctions ne sont pas assez dissuasives, alors, je le dirai, parce que je crois qu'il ne faut pas avoir d'hypocrisie, il faut que les choses soient extrêmement claires.

Le Parlement européen doit aussi prendre ses responsabilités, c'est-à-dire maintenir la pression, continuer à exercer son influence à travers les propositions législatives qui sont sur la table.

Je viendrai en décembre discuter, ici, le rapport PANA, je félicite ses membres, c'est un excellent rapport, je dois le dire. J'invite votre assemblée à poursuivre ce travail, quelle que soit la forme institutionnelle que vous choisirez.

Enfin, collectivement, nous devons, je crois, ouvrir deux pistes pour l'avenir.

La première ne nous rassemblera peut-être pas tous, mais je la formule tout de même, avec mes convictions personnelles. Nous devons aider les États européens et les autres, ceux qui ont fait un peu de l'évasion fiscale un business d'État, à développer un autre modèle économique et social, et je le dis pour ceux pour qui c'est un business, mais aussi pour ceux pour qui c'est encore des pratiques tolérées.

Cette révolution-là, elle ne se fera pas seule, c'est le sens même de l'action politique.

Finalement, nous devons, je le crois, décider le passage des questions fiscales à la majorité qualifiée avant les prochaines élections européennes.

Nos concitoyens - vous les rencontrez, je les rencontre - ne cessent de nous demander plus d'Europe sociale ou une véritable harmonisation fiscale, mais ne leur racontons pas d'histoires, il y aura des progrès dans l'Europe sociale, il y aura des progrès dans la transparence et la convergence fiscales, mais il n'y aura pas d'avancées décisives pour l'Europe sociale et pour l'harmonisation fiscale tant que nous resterons dans un système où la volonté d'un seul peut paralyser, bloquer, ce que tous souhaitent.

La Commission, vous le savez, son président l'a dit, ici devant vous, Mesdames et Messieurs les parlementaires européens, fera des propositions en 2018 en ce sens.

Je sais à quel point ce combat sera difficile, je sais qu'il demande du courage politique et je sais que pour cela il faudra que votre assemblée, à nos côtés, mette toute l'énergie nécessaire, mais je sais, je crois pouvoir compter presque par définition sur votre soutien majoritaire et je veux vous dire que sur tous ces sujets, eh bien, j'en aurai bien besoin.

La Sté Parlement Européen a publié ce contenu, le 09 janvier 2018, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
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