En quoi la directive sur la lutte contre l'évasion fiscale contribuera-t-elle à garantir une taxation effective des bénéfices?

Certaines entreprises exploitent les différences qui existent entre les régimes des États membres pour réduire au minimum leur contribution fiscale en transférant leurs bénéfices au sein de l'Union. Ceux qui pratiquent la planification fiscale agressive tirent également parti des faiblesses d'un système national ou de l'absence de mesures de lutte contre l'évasion fiscale dans un État membre pour échapper à l'imposition partout dans le marché unique. L'imposition effective est donc largement tributaire d'une coordination étroite entre les États membres, permettant d'éliminer les possibilités d'évasion fiscale et d'empêcher le transfert de bénéfices au sein du marché unique.

Les nouvelles règles permettront de faire en sorte que tous les États membres mettent en œuvre des mesures coordonnées contre l'évasion fiscale, afin de renforcer leurs moyens de défense collective contre la planification fiscale agressive. Elles définissent également une stratégie commune visant à lutter contre les menaces extérieures d'évasion fiscale et à contribuer à empêcher les entreprises de transférer hors de l'Union des bénéfices non imposés.

Quelles sont les mesures de lutte contre l'évasion fiscale contenues dans la nouvelle directive et comment contribueront-elles à empêcher l'évasion fiscale?

La directive sur la lutte contre l'évasion fiscale énonce cinq grandes mesures visant à empêcher l'évasion fiscale, que tous les États membres devront appliquer, pour contrecarrer certaines des formes les plus courantes de planification fiscale agressive qui ont été recensées lors des discussions à l'OCDE, lors des discussions du Conseil sur l'évasion fiscale et par la Commission elle-même. Trois des mesures convenues entrent en vigueur le 1er janvier 2019. Il s'agit des mesures suivantes:

a) Règle relative aux sociétés étrangères contrôlées (SEC): prévenir les transferts de bénéfices vers des pays à fiscalité faible ou nulle

Les entreprises multinationales transfèrent parfois les bénéfices de la société mère établie dans un pays à fiscalité élevée vers des filiales contrôlées situées dans des pays à fiscalité faible ou nulle afin de réduire la charge fiscale du groupe. La règle proposée en ce qui concerne les sociétés étrangères contrôlées (SEC) devrait les dissuader de se livrer à cette pratique.

La règle relative aux SEC permettra de garantir que l'État membre de la société mère impose certains bénéfices que celle-ci place dans un pays à fiscalité faible ou nulle. Elle sera appliquée si l'impôt acquitté dans le pays tiers est inférieur à la moitié de celui qui aurait été payé dans l'État membre en question. La société se verra accorder un crédit fiscal pour les impôts qu'elle aura effectivement payés à l'étranger. Ce système permettra de garantir l'imposition effective des bénéfices, au taux d'imposition de l'État membre dans lequel ils ont été générés.

Exemple: une société a son siège dans un État membre de l'Union. Elle crée une filiale dans un pays tiers qui ne lève pas d'impôt sur les sociétés. Cette filiale n'exerce pas d'activités substantielles en rapport avec ces revenus. La société effectue des paiements de redevances gonflées en faveur de la société offshore et réduit ainsi ses bénéfices imposables dans l'État membre de l'Union. Les paiements que reçoit la filiale ne sont pas taxés non plus, en raison du taux nul appliqué par le pays tiers.

Avec la règle relative aux SEC proposée, l'État membre imposera les bénéfices de la filiale comme s'ils n'avaient pas été transférés vers le pays à fiscalité nulle, ce qui garantira une imposition effective au taux en vigueur dans l'État membre concerné.

b) Limitation des intérêts: décourager les entreprises de mettre en place des montages d'endettement artificiels afin de réduire au minimum leurs impôts

Les paiements d'intérêts sont en général fiscalement déductibles dans l'Union. Certaines entreprises aménagent leurs prêts intragroupe de sorte que leur dette soit placée dans l'une des sociétés du groupe établie dans un pays où la fiscalité est élevée et les paiements d'intérêts déductibles. Parallèlement, les intérêts sur la dette sont versés à l'entreprise «prêteuse» du groupe, qui a son siège dans un pays à fiscalité peu élevée où les intérêts sont imposés à un taux faible (ou nul). Le groupe réduit de cette manière sa pression fiscale globale et paie en tout moins d'impôts en transférant ses bénéfices dans le cadre de dispositifs de prêts entre ses sociétés.

La directive propose de limiter le montant des intérêts nets qu'une société peut déduire de son revenu imposable, en prenant pour base un ratio fixe de ses bénéfices. Il devrait ainsi être moins intéressant pour les sociétés de déplacer artificiellement leur dette afin de réduire au minimum leurs impôts. Les États membres peuvent choisir de n'appliquer cette règle qu'aux sociétés qui font partie d'un groupe, car les sociétés indépendantes ne peuvent pas utiliser la dette pour transférer leurs bénéfices.

La règle de limitation des intérêts comporte une clause facultative de maintien des droits acquis: par conséquent, les États membres peuvent exclure une dette existant avant le 17 juin 2016 de son champ d'application, comme ils peuvent le faire pour les intérêts utilisés pour financer des projets d'infrastructure publics à long terme. Les États membres qui sont dotés de règles aussi efficaces seront autorisés à les conserver jusqu'à ce que l'OCDE préconise une norme minimale concernant les règles de limitation des intérêts, ou jusqu'au 1er janvier 2024 au plus tard.

Exemple: un groupe crée une filiale dans un pays tiers à fiscalité nulle, où cette dernière accorde un prêt à taux d'intérêt élevé à une autre entreprise du groupe, établie dans un État membre de l'Union. L'entreprise établie dans l'Union doit verser à la filiale des intérêts élevés, qui sont fiscalement déductibles. Ce faisant, elle réduit son revenu imposable dans l'État membre, tandis que le revenu d'intérêt correspondant n'est pas non plus imposé dans le pays tiers.

Dans le cadre de la règle de limitation des intérêts, l'État membre appliquera une limite fixe au montant des intérêts que l'entreprise peut déduire. Cela devrait dissuader les entreprises de déplacer leurs dettes dans le seul but de réduire leurs contributions fiscales.

c) Clause anti-abus générale: lutter contre la planification fiscale agressive lorsque d'autres règles ne s'appliquent pas

La planification fiscale agressive cherche, par nature, à contourner les règles afin de réduire au minimum les impôts qu'une entreprise doit payer. Ceux qui se livrent à la planification fiscale agressive s'efforcent en permanence de trouver des moyens de contourner les dispositions de lutte contre l'évasion ou de mettre au point de nouvelles techniques d'évasion fiscale qui ne soient pas couvertes par des règles spécifiques.

La directive établit une clause anti-abus générale, qui visera les montages fiscaux abusifs lorsqu'il n'existe pas d'autre règle anti-abus applicable spécifiquement à un tel montage. La clause anti-abus générale sert de filet de sécurité dans les cas où d'autres dispositions anti-abus ne peuvent être appliquées. Elle permettra aux autorités fiscales de ne pas prendre en considération des montages fiscaux abusifs et de taxer les entreprises en fonction de la réalité économique de leurs activités.

D'autres règles relatives aux dispositifs hybrides destinées à empêcher les sociétés d'exploiter les asymétries entre les législations fiscales de deux pays de l'UE pour éluder l'impôt, ainsi que des mesures visant à garantir l'imposition des plus-values réalisées sur des actifs, comme la propriété intellectuelle, qui ont été transférés hors du territoire d'un État membre (règles d'imposition à la sortie) entreront en vigueur le 1er janvier 2020.

La Sté Union européenne a publié ce contenu, le 30 décembre 2018, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
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