A 85 ans, Antoine Bernheim n'est plus un jeune premier ni un manager en devenir. Il a largement fait ses preuves chez Generali : conseiller de l'assureur depuis 1973, vice-président en 1990, puis deux fois président (entre 1995 et 1999 et depuis 2002). Outre durer, il aura réussi à préserver Generali des appétits étrangers. C'est d'ailleurs ce qui plaisait à Enrico Cuccia (mort en 2000), emblématique président de son principal actionnaire, Mediobanca, détenteur de 14,8% du capital, et à la Banque d'Italie, autre actionnaire influent (4,5% du capital).

Mais le 24 avril, échéance de la fin du mandat du « Parrain » français des affaires, approche et son poste aiguise les convoitises. Cesare Geronzi, actuel président de Mediobanca, n'est pas le dernier à postuler. Il aurait même le soutien de Silvio Berlusconi, dont la holding Fininvest est actionnaire de Mediobanca.

Son départ semblait pourtant acquis...
Le mois dernier, le départ de Bernheim apparaissait pourtant acquis, mais depuis, tout bien réfléchi, notre vénérable baron aurait changé d'avis, estimant sans doute pouvoir encore rendre des services. « La reconnaissance est une maladie du chien non transmissible à l'homme », doit à nouveau penser le plus italien des patrons français, qui est quand même parvenu à faire de Generali le deuxième assureur en France et en Allemagne. Les résultats annuels, qui seront publiés le 17 mars, seront en outre l'occasion de montrer que le Lion de Trieste a bien traversé la crise, mieux que ses concurrents en tout cas.

Mais Bernheim a un autre atout dans la poche : son remplaçant putatif, Cesare Geronzi, a déjà été condamné à deux reprises en justice et il devra quitter la banque d'affaires en cas de troisième verdict contre lui. Si la présidence de Generali constituerait une plus qu'honorable planche de salut pour le patron de Mediobanca, ils sont nombreux à s'opposer à cette nomination. La banque Intesa Sanpaolo, dont Generali est le principal actionnaire, mais aussi la Banque d'Italie, ont ainsi élevé la voix pour écarter cette hypothèse.

Selon la Repubblica (22/02), la nomination de Geronzi à la tête de Generali ouvrirait la voie à une possible fusion entre l'assureur et Mediobanca, information aussitôt démentie par la banque d'affaires. Il est pourtant vrai que Mediobanca reste un véritable pivot du capitalisme italien, capable de faire la pluie et le beau temps dans les directions générales de nombre d'entreprises.

Mais Antoine Bernheim a de la bouteille, et il attend sereinement le 24 avril pour voir s'il fait toujours l'affaire à la tête de Generali. Lui n'en doute pas, même s'il ne sollicitera pas de lui-même un nouveau mandat. Il préfère qu'on le retienne par la manche, le privilège des puissants sans doute...