Allergan, le fabricant du Botox, a d'abord confirmé une information de Reuters qui révélait son intérêt pour Takeda, ce qui a fait chuter son cours de Bourse de 7% à Wall Street.

Selon Reuters, le directeur général d'Allergan, Brent Saunders, a ensuite décidé de ne pas donner suite après avoir eu un retour négatif de certains de ses actionnaires inquiets du niveau d'endettement du groupe.

Allergan a confirmé peu après en annonçant qu'il n'avait pas l'intention de soumettre une offre sur Shire. Le groupe "continue sa procédure d'évaluation d'une large palette d'actions stratégiques potentielles", lit-on dans un communiqué.

Allergan, basé à Dublin, a un endettement de 30 milliards de dollars pour une capitalisation de 52 milliards, conséquence d'une série d'acquisitions.

Reuters a rapporté jeudi que Takeda avait soumis une offre indicative sur Shire de 46,50 livres par action, en numéraire et en titres, poussant les deux groupes à réagir par voie de communiqué.

Shire a dit avoir rejeté l'offre tout en soulignant qu'il poursuivait ses discussions avec le laboratoire japonais.

L'action Shire a fini la séance sur un gain de 5,98% à 39,75 livres à la Bourse de Londres.

RISQUE FINANCIER

En mettant la main sur le laboratoire basé à Dublin, Takeda, dirigé par le Français Christophe Weber, réaliserait la plus importante acquisition jamais effectuée par une société japonaise à l'étranger, qui le propulserait parmi les leaders mondiaux du secteur pharmaceutique.

Ce serait aussi, et de loin, le pari le plus audacieux de Christophe Weber, car le laboratoire japonais pourrait étendre de manière significative sa présence aux Etats-Unis, tout en se renforçant dans les maladies rares, les troubles gastro-intestinaux et les neurosciences, Shire étant en particulier un leader des traitements de l'hyperactivité.

Toutefois, l'opération pose problème financièrement, Shire disposant d'une valorisation boursière - 36 milliards de livres, soit 41 milliards d'euros - nettement supérieure à celle de Takeda (4.100 milliards de yens ou 31 milliards d'euros).

Takeda, soucieux de préserver sa politique du dividende et sa note de crédit, ne veut pas faire d'écart et a signalé que "des discussions entre les parties concernant une éventuelle offre sont en cours", malgré le rejet de Shire.

Le secteur pharmaceutique enregistre depuis le début de l'année une vague d'opérations de fusion et acquisition, les grands laboratoires étant à la recherche d'actifs prometteurs pour doper leurs portefeuilles. Un rapprochement entre Takeda et Shire serait de loin l'opération la plus importante.

Shire a confirmé avoir reçu trois propositions indicatives de Takeda mais il juge qu'elles sous-évaluent considérablement ses perspectives de croissance et son nouveau portefeuille de médicaments.

PLUS DE CASH

La dernière offre de Takeda, de 46,50 livres par action, a été soumise le 12 avril et se compose de 17,75 livres en numéraire (payables en dollars) et de 28,75 livres en actions. Shire a déclaré que celle-ci le valorisait environ 44 milliards de livres sur la base du total des actions émises et à venir.

Les deux précédentes offres en espèces et en actions représentaient respectivement 44 et 45,50 livres par action.

Selon le droit boursier britannique, Takeda a jusqu'au 25 avril pour faire une offre ferme ou y renoncer, après avoir déclaré le mois dernier qu'il envisageait une offre.

Sur la base de la capitalisation boursière de Takeda, les actionnaires de Shire détiendraient environ 51% du nouvel ensemble, a noté Shire.

Wimal Kapadia, analyste chez Bernstein, pense que Shire est susceptible d'exiger une plus grande part en cash dans les discussions en cours mais l'offre de Takeda étant déjà tendue, cela laisse peu d'espoir d'aboutir.

L'action Shire est sous pression depuis un an et avait déjà perdu un tiers de sa valeur avant que l'intérêt que lui prête Takeda ait été rendu public, en raison de la concurrence accrue des médicaments génériques et du poids de la dette liée à l'acquisition de Baxalta en 2016.

Shire a annoncé en janvier son intention de scinder son pôle TDAH (trouble de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité), voire de l'introduire en Bourse. Il a également annoncé le 16 avril la vente de son pôle oncologie au laboratoire français Servier pour 2,4 milliards de dollars (1,95 milliard d'euros).

(Avec Paul Sandle et Carl O'Donnell; Claude Chendjou et Véronique Tison pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)

par Greg Roumeliotis, Ben Hirschler et Ben Martin

Valeurs citées dans l'article : Takeda Pharmaceutical Co Ltd, Shire, Allergan plc