Un nouveau directeur général optimiste
"Un challenge magnifique, un honneur". Tels sont les mots d'Eric de Saintdo pour qualifier sa nomination. L'ancien directeur général du Festival International de Plaisance de Cannes met en avant sa passion pour le nautisme et sa "vision globale du marché de la grande plaisance" pour légitimer sa nomination à 46 ans au poste de Directeur Général de Rodriguez Group.

Preuve qu'on peut être lucide sans être fataliste, Eric de Saintdo joue parfaitement son rôle d'homme de la situation. Bien sûr le marché de la grande plaisance a traversé une grave crise en 2008, bien sûr le carnet de commandes du groupe s'est amaigri, bien sûr le chiffre d'affaires a chuté (passant de 109 millions d'euros en 2009 à 87 millions en 2010), bien sûr "le marché est tendu". Pourtant Eric de Saintdo se veut optimiste et se dit "assez confiant". Cette assurance il la tient des derniers salons automnaux qui se sont tenus à Cannes, Monaco et Gènes. A ses yeux, l'engouement autour de ces manifestations témoigne d'une certaine "reprise" portée par des "envies" et des "projets" évidents.

Un business model redimensionné
L'avocat Maitre Jean-Paul Poulain, conseil du groupe durant la procédure de sauvegarde a analysé le plan de relance. Jonglant habilement entre transparence revendiquée et communication habile, le "chef d'orchestre de la sauvegarde" comme se plait à l'appeler Eric de Saintdo a exposé les axes du plan de relance.

Tout d'abord, il était primordial pour le groupe de maintenir la relation client en respectant les engagements pris avant le 7 avril 2009, date de l'ouverture de la procédure de sauvegarde. Ensuite l'homologation des plans de sauvegarde a été rendue possible grâce à la redéfinition des partenariats avec les chantiers navals, les motoristes et les banques.

Le groupe a ainsi obtenu l'abandon de créances, l'absence d'intérêt sur le solde dû aux banques et l'étalement sur 10 ans de sa dette bancaire de 64 millions d'euros, en échange de quoi il s'est engagé à donner les bateaux neufs et les bateaux d'occasions en stock aux banques. Le prochain paiement de 6,46 millions d'euros est prévu pour le mois de mai. Rodriguez Group a également diminué ses coûts de façon drastique. Les charges fixes sont réduites à 20 millions d'euros par an, contre 46 millions précédemment. La masse salariale a ainsi fondu, passant de 270 à 200 personnes.

Avant dernier axe de restructuration : "l'abandon, de la gestion par les marges au profit de la gestion par la trésorerie". Maître Poulain a largement insisté sur ce point en rappelant que le curseur générateur de perte sur 2009/210 était dû au fait que les bateaux en stock avaient été achetés à des prix trop élevés par rapport au marché actuel. Désormais le nouveau business model repose sur l'achat de bateaux 30% moins chers qu'il y a trois ans. Le schéma de cette nouvelle gestion est le suivant : la vente de bateaux neufs et d'occasion génère de la trésorerie. Une partie de cette trésorerie permet de rembourser les créanciers. Le solde restant est réinvesti dans la construction de bateaux neufs. Le but étant de renouer avec un cercle vertueux.

Enfin, la constitution d'une nouvelle équipe dotée de savoir-faire techniques et commerciaux éminents est un atout majeur. Des comités d'évaluation et d'analyse, ainsi que la mise en place d'un système d'"insentives" motivants pour les commerciaux sont les pierres angulaires de ce nouveau management de croissance.

"Cap 2012, une nouvelle ambition"
Tel était le titre de la réunion d'information. Autant dire que les dirigeants du groupe semblent bel et bien tournés vers l'avenir et entendent oublier la crise de 2008. Regarder vers l'avenir c'est d'abord mettre en place de nouveaux partenariats, à l'instar de celui conclu avec Italyachts et de celui signé avec Sanlorenzo la semaine dernière. Bien que les grands open ultra-rapides et ultra-luxueux soient la marque de fabrique de groupe, le groupe élargit sa gamme et réoriente son offre afin de coller à la nouvelle demande.

La conclusion de nouveaux chantiers n'est pas la seule décision opérationnelle marquante. Le groupe compte aussi diversifier un peu plus encore son activité en développant les services (mise en place de synergies avec le groupe Camper & Nicholsons, intensification du chantier Rodriguez de Golfe-Juan).

Une nouvelle identité, un nouveau logo
Qui dit nouveau DG, nouveaux chantiers, nouvelle offre dit nouvelle communication. Le groupe a ainsi repensé son logo et sa chartre graphique. Eric de Saintdo ambitionne d'"associer l'image du groupe à d'autres marques de luxe, que ce soit dans l'horlogerie, la mode ou l'automobile". Il entend réaffirmer l'excellence et la qualité des yachts en ancrant le groupe dans une stratégie haut de gamme assumée : "Nous ne sommes pas dans l'industrie, nous sommes dans l'artisanat du luxe".

Ce soir à la clôture de la Bourse de Paris, le titre chutait de 5,64% à 5,02€.

Pauline Raud