TOKYO (Reuters) - Les actionnaires de Toshiba ont refusé vendredi de reconduire dans leurs fonctions Osamu Nagayama, le président du conglomérat, et un autre administrateur, Nobuyuki Kobayashi, après des appels à la démission du premier sur fond d'un nouveau scandale.
Réuni dans la foulée de cette annonce, le conseil d'administration de Toshiba a désigné son actuel directeur général, Satoshi Tsunakawa, à la présidence du groupe.
Une enquête indépendante, publiée le 10 juin, a révélé que la direction de Toshiba avait oeuvré en accord avec le ministère japonais du Commerce afin d'empêcher des investisseurs étrangers d'exercer une influence au sein du conseil d'administration.
Le conseil d'administration a fait savoir vendredi qu'il allait entreprendre une analyse en profondeur de la culture d'entreprise au sein du groupe pour éviter d'être à nouveau confronté aux difficultés qui l'ont conduit à voir son président débarqué.
Il entend également examiner l'ensemble de ses actifs et travailler à un nouveau projet d'entreprise destiné à favoriser la création de valeur pour les actionnaires, que ce soit par des rachats d'actions ou par sa politique de dividendes.
Pour nombre d'experts, le résultat de l'assemblée générale annuelle du conglomérat constitue un nouveau tournant dans sa gouvernance, les évictions de membres du conseil d'administration d'entreprises japonaises, surtout dans des groupes connus comme Toshiba, étant extrêmement rares.
"Ce résultat est le signe d'un changement de paradigme au Japon et constituera un encouragement pour les investisseurs activistes, qu'ils soient étrangers ou japonais", commente Justin Tang, responsable d'études sur l'Asie chez United First Partners, basé à Singapour.
Les partisans d'Osamu Nagayama estiment cependant que son éviction ne fera que fragiliser le conglomérat, qui a connu plusieurs crises ces dernières années, dont un scandale comptable en 2015.
Toshiba, qui produit entre autres des équipements de défense et des réacteurs nucléaires, est une entreprise stratégique pour l'Etat japonais.
Hiroshi Kajiyama, le ministre du Commerce, n'a pas présenté d'excuses après les résultats de l'enquête indépendante du 10 juin impliquant son ministère, estimant que les politiques mises en oeuvre alors étaient "naturelles".
"En général, l'espoir est que la gouvernance d'entreprise puisse être améliorée grâce à des discussions avec les actionnaires et en même temps, nous nous employons à assurer la stabilité du développement des entreprises et des technologies qui sont importantes du point de vue de la sécurité nationale", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse avant l'assemblée générale de Toshiba.
L'éviction d'Osamu Nagayama pourrait permettre aux investisseurs activistes de faire pression sur la nouvelle direction pour qu'elle étudie des offres de rachat du groupe.
La société de capital-investissement CVC Capital Partners a présenté à Toshiba une offre de rachat pour 20 milliards de dollars (16,7 milliards d'euros).
Selon le Financial Times, le géant du capital-investissement KKR envisage également de racheter Toshiba pour un montant supérieur à celui proposé par CVC.
Bloomberg rapporte de son côté que le canadien Brookfield Asse Management serait lui aussi intéressé.
(Reportage Makiko Yamazaki; avec la contribution de Yuki Nitta et Tim Kelly à Tokyo et Anshuman Daga à Singapour; version française Claude Chendjou, édité par Sophie Louet)
par Makiko Yamazaki