par Elinor Comlay

Bank of America et JPMorgan Chase & Co auront à coup sûr bénéficié de l'activité inhabituellement animée des marchés de la dette et du marché primaire actions durant la période estivale.

"Les banques exposées aux marchés de capitaux auront connu un très bon trimestre", prédit Tim Ghriskey, directeur des investissements de Solaris Asset Management.

Mais les activités de crédit devraient avoir continué de générer des pertes, qu'il s'agisse des prêts immobiliers, des cartes de crédit et, de plus en plus, de l'immobilier commercial, plombé par les faillites de distributeurs et le non-renouvellement de baux d'entreprises.

Citigroup, qui a déjà subi de lourdes pertes dans le crédit à la consommation et l'immobilier commercial, devrait publier au titre du trimestre juillet-septembre une perte par action de 21 cents selon le consensus Thomson Reuters I/B/E/S.

Sur la même période l'an dernier, le groupe avait perdu 60 cents par action mais les comparaisons sont compliquées par le fait qu'il a émis dans l'intervalle un volume considérable d'actions nouvelles.

Comme Bank of America, Citigroup a bénéficié depuis un an d'un renflouement massif sur fonds publics (45 milliards de dollars dans son cas) et il n'a pas encore remboursé l'Etat fédéral.

Les analystes s'attendent à ce que JPMorgan présente les meilleurs résultats du secteur, avec un bénéfice estimé à 49 cents par action. Il y a un an, le groupe new-yorkais avait fait état d'un profit trimestriel de 11 cents par titre.

De son côté, Bank of America devrait afficher une perte de six cents par action, creusée notamment par les 425 millions de dollars de charges liées à l'annulation de la garantie de l'Etat sur des actifs à haut risque et à son important portefeuille de crédit immobilier résidentiel.

Parmi les banques régionales, les résultats devraient varier en fonction du poids des crédits au bilan et de l'exposition géographique.

US Bancorp, basée à Minneapolis, qui a échappé pour l'essentiel aux dépréciations massives du secteur, devrait avoir accru ses profits au troisième trimestre, les analystes anticipant un bénéfice par action d'environ 27 cents.

Par contre, KeyCorp, qui avait annoncé un bond de ses provisions pour créances douteuses au deuxième trimestre, devrait afficher une perte de 41 cents.

LE RISQUE DE L'IMMOBILIER COMMERCIAL

Plusieurs dirigeants du secteur, parmi lesquels le directeur financier de JPMorgan, Michael Cavanagh, ont récemment expliqué que le taux de défaut dans le crédit à la consommation semblait diminuer mais ils ont aussi averti que le crédit immobilier commercial pourrait se détériorer de plus en plus rapidement.

Ce facteur pourrait particulièrement affecter Zions Bancorp, un groupe de Salt Lake City dont le portefeuille de crédits d'immobilier commercial, à 14,5 milliards de dollars, représente environ 35% de l'encours total de ses prêts selon les statistiques de la Réserve fédérale analysées par le cabinet spécialisé FIG Partners.

Zions devrait publier une perte trimestrielle par action de 1,16 dollar contre un bénéfice de 31 cents un an plus tôt.

Au-delà des résultats chiffrés, analystes et investisseurs étudieront les indicateurs de créances douteuses publiés par les banques, à l'affût de tout signe de ralentissement de la tendance à la détérioration du crédit.

"C'est le cancer du crédit", estime Gerard Cassidy, analyste de RBC Capital Markets. "Une fois que la tumeur, si je peux m'exprimer ainsi, commence à se réduire, c'est signe que le patient va mieux."

Le marché surveillera aussi le montant des provisions passées au titre des créances douteuses à venir.

"Ce que nous aimerions voir, c'est un signe traduisant un point d'inflexion", explique Ben Wallace, analyste actions de Grimes & Company.

Si les pertes devraient avoir diminué au troisième trimestre, les banques absentes des marchés de capitaux devraient avoir vu leur activité reculer. Il faudra donc sans doute du temps pour que les cours de Bourse du secteur reflètent une amélioration.

"Les actions sont encore en partie sous l'influence des indicateurs macroéconomiques", explique Todd Hagerman, analyste de Collins Stewart. "Tant qu'on ne sera pas plus à l'aise en ce qui concerne la reprise économique, je ne crois pas que les actions bougent beaucoup à court terme."

A la clôture de vendredi, l'indice KBW du secteur bancaire américain affichait une progression de 7% depuis le début de l'année, après une chute de 50% en 2008.

Version française Marc Angrand