Notre époque ressemble-t-elle à l'une de ces symphonies ? Sans doute, et le spécialiste des paiements en ligne Block, autrefois Square, pourrait en fournir un énième exemple illustratif.  

L'entreprise fondée par l'excentrique Jack Dorsey, par ailleurs fondateur de Twitter, est mise en cause pour ses pratiques commerciales agressives, ainsi que les diverses légèretés avec lesquelles elle adhère aux régulations bancaires.

Menée par le célèbre short-seller Hindenburg Research, qui se distinguait il y a quelques semaines en faisant chuter l'oligarque indien Gautam Adani, l'offensive contre Block a fait coup au but puisque le cours perdait 15% dès la parution du rapport. 

Entre autres, est reproché à Block et à sa célèbre application Cash App — très en vogue chez les trafiquants de drogue — d'être utilisée en premier chef par des criminels — un gang de Baltimore s'est d'ailleurs baptisé les "Cash Apps" ! — et de superbement ignorer les procédures de contrôle les plus élémentaires.

Que ces éléments soient fondés ou non — les prochaines semaines nous le diront — et au-delà des frasques auxquelles nous a habitué Jack Dorsey, les investisseurs avaient-ils besoin de Hindenburg Research pour suspecter un mauvais vent ? 

Valorisée jusqu'à hier à hauteur de $40 milliards, Block est certes passée de €200 millions à $17.5 milliards de chiffre d'affaires entre 2012 et 2022 — en supposant bien sûr que l'entreprise ne berne pas le marché par des pratiques de reconnaissance des revenus douteuses, ce qui n'est pas à exclure étant donné la nature de l'activité.

En revanche, elle n'a jamais dégagé le moindre profit. Les résultats comptables positifs entre 2019 et 2021 sont le fruit d'une cession d'actifs exceptionnelle en 2019, d'une réévaluation providentielle d'un investissement dans DoorDash en 2020, et d'un montant de provisions anormalement bas en 2021.

Que dire également des $20 milliards dépensés dans Bitcoin sur ces trois années ? Des habituelles rémunérations en stock-options gargantuesques ? Des ventes d'actions massives de la part de l'équipe de direction ? Des multiples avertissements émis par les différents régulateurs américains ? Et de la communication prédatrice du groupe, qui vise clairement les couches sociales les plus en marge ?

Peut-être rien de particulier, si ce n'est qu'Hindenburg a ici choisi une cible facile.