par Maria Tsvetkova

KIEV, 24 février (Reuters) - Un climat de défiance s'est emparé de Kiev jeudi, au milieu des coups de feu, du vacarme des sirènes et des explosions, même si de nombreux habitants tentaient de fuir par tous les moyens la capitale après le lancement de l'offensive russe en Ukraine.

L'inquiétude montait au sein de la population alors que la ville est survolée régulièrement par des avions et qu'un aéroport situé à quelques kilomètres a fait l'objet d'une attaque.

Des habitants qui ont choisi de rester faisaient la queue devant les banques et les magasins pour tenter de retirer de l'argent et amasser des provisions, tandis que d'autres tentaient de quitter la ville en voiture, en bus ou en avion.

Un énorme embouteillage de plusieurs dizaines de kilomètres bloquait la route principale permettant de fuir vers Lviv, une ville située dans la partie occidentale de l'Ukraine, jugée plus sûre, l'offensive russe venant de l'est.

"Je m'en vais parce qu'une guerre a commencé, Poutine nous a attaqués", a déclaré Oxana, la conductrice d'une des voitures coincées dans l'embouteillage avec sa fille de trois ans sur la banquette arrière. "Nous avons peur des bombardements."

Pour le moment, Oxana veut juste sortir de Kiev, le centre du pouvoir en Ukraine et le siège du gouvernement, de la présidence et du parlement. Une fois en dehors de la capitale, elle décidera où aller, souligne-t-elle.

Un autre conducteur, Aleksander, dit vouloir rentrer à Kiev une fois qu'il aura mis ses enfants à l'abri.

"L'état d'esprit est patriotique", a-t-il dit. "Nous allons nous battre. L'Ukraine gagnera, quoi qu'il arrive."

DE "VRAIS HOMMES" ET DES "PATRIOTES"

Un autre conducteur, bloqué par l'embouteillage, a appelé "les vrais hommes, les patriotes" à se mobiliser.

"Je crois que nous devons nous ressaisir et infliger une sévère riposte à l'agression russe", a-t-il déclaré, sans donner son prénom.

"Pardonnez-moi de dire cela, mais je pense que nous devons combattre avec force tous ceux qui envahissent notre pays. Je pendrais chacun d'entre eux à un pont."

D'autres se sentent pris au dépourvu, malgré des semaines d'avertissements de la part de dirigeants ukrainiens et occidentaux sur l'imminence d'une attaque russe.

"Je ne m'y attendais pas. Jusqu'à ce matin, je croyais que rien ne se passerait", reconnaît Nikita, un spécialiste du marketing de 34 ans, en faisant la queue dans un supermarché, des bouteilles d'eau empilées dans son chariot.

"J'ai fait mes bagages, j'ai acheté de la nourriture et je vais rester chez moi avec ma famille."

Certains redoutent maintenant d'être pris au piège dans les affrontements.

"Personne ne nous dit ce qui s'est passé, ce qu'il adviendra de notre vol, ce que nous devons faire, où aller. Nous n'avons nulle part où aller. Personne ne nous répond", dit Gulnara, une voyageuse dont le vol depuis l'aéroport principal de Kiev à destination de Bakou a été annulé. (Reportage Maria Tsvetkova, rédigé par Timothy Heritage; version française Elena Vardon et Diana Mandiá, édité par Jean-Michel Bélot)