Les trois dernières années auront été marquées par une profonde restructuration. Après un rançonnage en règle par les autorités du pays, pas tout à fait réputées pour leur probité, la filiale nigériane a été séparée du groupe via une IPO sur le marché de Lagos.

Idem pour l'activité d'infrastructures, cotée sur le NYSE au sein d'une nouvelle entité, IHS Tower — dont le français Wendel, pour l'anecdote, détient 22% du capital. Les tours du réseau sud-africain ont par ailleurs été vendues — à IHS justement — via un accord de cession-bail.

La prochaine étape pour MTN consiste à se séparer de son activité paiements mobiles, non sans ambition décrite comme une "fintech" par le management. Avec 65 millions d'utilisateurs, cette dernière pourrait attirer les convoitises puisque la majorité de la population du continent reste "unbanked", c'est-à-dire non-bancarisée. 

Enfin, MTN entend consolider son marché domestique sud-africain avec le rachat de Telkom, le troisième opérateur du pays contrôlé par le gouvernement. Il serait ainsi mieux armé pour tenir tête au leader national Vodacom. 

Globalement, les marchés servis par le groupe — en Afrique australe, tout autour du golfe de Guinée, au Soudan et en Iran — restent exceptionnellement complexes. MTN était même présent en Afghanistan jusqu'à la cession de ses activités dans le pays à Irancell.

N'en demeure pas moins que le groupe est un poids-lourd du capitalisme africain. Ceci sur un continent où, pour l'instant, les deux seules industries capables d'absorber les capitaux étrangers sont les telecoms et les matières premières.

La performance financière de MTN à dix ans — période 2012-2022 — est vite balayée : le chiffre d'affaires décroît de $14 à $12 milliards (USD) ; les marges d'exploitation se maintiennent autour des 30%, soit une moyenne trois fois supérieure à celle des opérateurs européens ; après un pic en 2019, l'endettement revient à un niveau raisonnable de $5 milliards. 

Les comptes sont surprenamment lisibles, et les résultats comptables bien réconciliables avec les cash-flows. En dix ans — à périmètre plus ou moins constant donc — MTN génère un profit cash total de $12 milliards, soit $1.2 milliard par an. A défaut de croissance, on saluera une réelle stabilité.  

On rapportera ce chiffre à la valeur d'entreprise — capitalisation boursière plus dette dette — actuelle de $17 milliards, sans omettre de signaler que ce multiple de valorisation se situe dans la moyenne historique, que le dividende manque un peu d'allure, et que le risque de dépréciation du rand plane en permanence sur les avoirs des investisseurs étrangers en Afrique du Sud.