PARIS (awp/afp) - Après l'affaire du talc Morhange qui a marqué la France des années 70, le pays a été secoué par d'autres grands scandales sanitaires.

Distilbène

Le Distilbène est le nom commercial d'une hormone de synthèse prescrite en France de 1950 à 1977 aux femmes enceintes, notamment pour prévenir les fausses couches.

Ce produit s'avère dangereux: les filles exposées in utero présentent des risques accrus de développer des cancers du vagin ou du col de l'utérus et leurs enfants risquent des malformations.

Au moins 160.000 bébés auraient été exposés en France au Distilbène. A partir du début des années 2000, les procès se multiplient.

Pour la première fois en 2011, la cour d'appel de Versailles reconnaît un lien entre Distilbène et handicap à la troisième génération, accordant au petit-fils d'une femme soignée par ce produit 1,7 million d'euros de dommages et intérêts.

Sang contaminé

Dans les années 80, l'épidémie de sida se répand. Pour éviter les contaminations par transfusion sanguine, une circulaire préconise d'éviter les dons de sang de personnes à risque, toxicomanes et homosexuels. Mais ce texte est mal appliqué.

De plus, des stocks de produits sanguins non chauffés (le chauffage permet d'inactiver le VIH) continuent d'être écoulés jusqu'en octobre 1985.

Résultat: des centaines de personnes sont contaminées, surtout des hémophiles que leur maladie contraint à des transfusions régulières. L'Association française des hémophiles estime que 1.350 ont été contaminés par le VIH, dont mille sont morts du sida.

Les suites judiciaires déçoivent profondément les victimes. En 1993, l'ex-directeur du Centre national de transfusion sanguine Michel Garretta et son ancien directeur du développement Jean-Pierre Allain sont condamnés en appel à quatre ans de prison dont deux ferme.

En 1999, le Premier ministre de l'époque Laurent Fabius et l'ex-ministre des Affaires sociales Georgina Dufoix sont relaxés par la Cour de justice de la République, tandis que l'ex-secrétaire d'Etat à la Santé Edmond Hervé est condamné mais dispensé de peine.

Hormone de croissance

Entre 1983 et 1985, 1.698 enfants reçoivent un traitement pour favoriser leur croissance avec des injections de produits contaminés par le prion, un agent pathogène de la maladie de Creutzfeld-Jacob (MCJ), qui détruit le système nerveux.

Parmi eux, 120 meurent de MCJ. L'épilogue judiciaire du scandale se joue en 2016 après plus de vingt ans d'instruction: les deux derniers prévenus sont relaxés, la justice reconnaissant des "fautes" mais pas de "responsable".

Prothèses PIP

Taux anormal de rupture et utilisation d'un gel de silicone non réglementaire: les prothèses mammaires de la société française PIP sont retirées du marché en mars 2010 par l'Agence de sécurité sanitaire Afssaps (ensuite devenue ANSM).

Quelques mois plus tard, 500 femmes porteuses de ces prothèses portent plainte. Après le décès par cancer de l'une d'elles, la justice ouvre une information judiciaire.

Le fondateur de la société Jean-Claude Mas est condamné fin 2013 à quatre ans de prison ferme et 75.000 euros d'amende pour tromperie aggravée et escroquerie. Il meurt en avril 2019 à 79 ans, sans avoir été incarcéré pour purger sa peine définitive, les recours n'ayant pas tous été épuisés.

Mediator

Substance classée parmi les amphétamines et principalement prescrite comme coupe-faim, le Mediator est retiré du marché en France, fin 2009 à la suite d'alertes lancées notamment par le Dr Irène Frachon sur ses effets néfastes pour les valves cardiaques.

En 2010, l'agence du médicament Afssaps (devenue ANSM) évalue à plus de 500 le nombre de décès dus à ce médicament des laboratoires Servier. En 2011, l'Inspection générale des affaires sociales estime que le retrait aurait dû intervenir dès 1999.

Au terme d'un long procès, le tribunal correctionnel de Paris condamne, en mars 2021, les laboratoires Servier pour "tromperie aggravée" et "homicides et blessures involontaires" à une amende de 2,718 millions d'euros, son ex-numéro 2 à quatre ans de prison avec sursis (le patron Jacques Servier étant mort 2014).

L'Agence du médicament est également condamnée pour avoir "fait preuve de négligence et d'imprudence notamment en tardant à suspendre le médicament". Servier a fait appel.

Dépakine

Antiépileptique du laboratoire Sanofi, la Dépakine est au centre d'un scandale sanitaire qui démarre en 2015 à la suite de malformations chez des enfants de femmes sous traitement pendant leur grossesse.

Le valproate de sodium (Dépakine et dérivés) s'avère responsable depuis 1967 de malformations chez 2.150 à 4.100 enfants et de troubles du développement chez 16.600 à 30.400 enfants, selon des estimations de l'Assurance maladie et de l'ANSM.

Sanofi est mis en examen pour "homicides involontaires" en août 2020 et l'ANSM pour "blessures et homicides involontaires par négligence" en novembre dans la partie pénale du dossier.

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