Graphique Super Micro Computer, Inc.

La conception de serveurs a évolué de machines autrefois très standardisées (telles que HP ou Dell en sortaient à la chaîne) vers des produits désormais beaucoup plus spécialisés. Tendance prononcée depuis l'avènement du cloud, bien sûr, mais aussi renforcée par le déploiement des nouvelles technologies dans l'intelligence artificielle (AI), la 5G, la réalité virtuelle, etc. Il faut désormais des serveurs (et des infrastructures de cartes mères correspondantes) plus spécialisées, plus "taillées sur mesure". Supermicro (SMCI) fait manifestement ça très bien puisqu'ils sont la référence en la matière dans la Silicon Valley. Mais encore assez inconnus dans le monde entier. Bon, généralement, ce qui cartonne dans la Valley est promis à un beau roll-out ailleurs dans le monde. 

Les produits sont conçus et fabriqués en interne (aux États-Unis, à Taïwan et aux Pays-Bas). Le chiffre d’affaires se répartit pour 61% aux Etats-Unis, 17% en Europe, 18% en Asie et 4% dans le reste du monde. 

Pour des clients comme Amazon, Meta Platforms, Tesla ou Roblox, si on veut un serveur avec une infrastructure véritablement "sur mesure", on ne peut pas vraiment appeler HP ou Dell, qui eux produisent à la chaîne. Il faut s'adresser à un "artisan" qui sait gérer ces demandes très spécifiques et très complexes (GPU, DPU, CXL, resource pooling, etc.). Le choix de Supermicro (SMCI) devient évident. 

Source : Super Micro Computer 

En plus de ces évolutions technologiques, il y a aussi un effet de cycle (généralement de 5 à 7 ans pour le remplacement des serveurs) qui devrait pas mal profiter la société. A noter que SMCI a investi agressivement à Taiwan pour ses opérations manufacturières. 

Comme à notre habitude, regardons sur le cycle écoulé, la performance financière de l’entreprise. Sur la dernière décennie (2012-2022), le chiffre d’affaires a été multiplié par cinq de 1 à 5,2 milliards de dollars. Les marges opérationnelles sont plutôt faibles à la base (moyenne de 4% sur les dix ans), ce qui laisse entendre que Super Micro Computer pratique des prix bas pour prendre des parts de marché sur les concurrents (et manifestement ça marche). Le résultat net a quasiment décuplé sur la période étudiée, de 30 millions de dollars en 2012 à 285 millions de dollars en 2022. La dilution a été maintenue sous contrôle (rare dans la tech américaine ces temps-ci) avec un nombre d'actions en circulation (base diluée) passant de 41 à 51 millions. 

Niveau bilan, pas de dette à long terme (un bon point), il n'y a que de la dette à court terme qui sert au financement du BFR. On observe un passif total équivalent au cash et créances clients (un bon point aussi). Peut-être aussi signalons que la moitié des actifs sont des stocks. Historiquement, ceux-ci ont très bien tourné, mais on ne sait jamais avec des stocks technologiques présentant un risque d'obsolescence toujours présent donc on garde une certaine précaution avec ces derniers. 

Les profits cash ne sont cependant pas réconciliables avec les profits comptables. Entre 2012 et 2022, nous observons une somme de 936 millions de dollars en profits comptables contre 364 millions de dollars de cash brûlé. Cette différence ne vient pas des dépenses en investissements, puisque on a ici des D&A (total de 192 millions de dollars sur la décennie) certes inférieurs au capex (total de 366 millions de dollars), mais ça ne nous fait que 174 millions de différence. 

Source : Super Micro Computer 

La réponse vient des besoins - assez colossaux - en BFR (1,4 milliard de dollars sur la décennie 2012-2022). Voilà, on a trouvé notre coupable ! Gros BFR donc car premièrement les clients ne paient pas directement, ils passent commande et après faut délivrer ; et deuxièmement, il faut préparer des stocks conséquents en phase d'assemblage avant de livrer la marchandise. 

Le business model semble assez profitable. La marge brute frôle les 18%, la marge opérationnelle dépasse les 10% et la marge nette est supérieure à 5%. Le ROE est de 38% et le ROA de 18%. Cependant, la génération d’argent sonnant et trébuchant est médiocre. Le besoin de fonds de roulement (BFR) est gourmand en cash comme mentionné plus haut, il ne reste pas d’argent à verser aux actionnaires. Il semble également consubstantiel à la croissance pour l’instant. 

Ceci explique une grande partie de la faible valorisation du titre. L’entreprise devrait réaliser un chiffre d’affaires de 6,7 milliards en 2023 mais se valorise (capitalisation boursière) 5,1 milliards en bourse. C’est assez rare dans le monde technologique qu’une société se valorise moins d’une fois son chiffre d’affaires. Également, au niveau de la bottom line, la société se paie moins de 10 fois ses bénéfices nets. 

Nous pensons que le titre, malgré ces quelques défauts, présente une marge de sécurité assez conséquente. Au vu de sa faible valorisation et de sa croissance exponentielle qui devrait continuer au sein de son marché porteur, nous avons fait entrer la valeur dans le portefeuille Investisseur USA de Zonebourse.