La France a battu la concurrence de l'Allemagne et des Pays-Bas pour l'implantation de la première usine de batteries automobiles de ProLogium à l'étranger, grâce au lobbying du président Emmanuel Macron, à des conditions avantageuses et à des prix compétitifs pour l'électricité, ont déclaré les dirigeants de l'entreprise taïwanaise.

Après avoir réduit une liste de 13 pays à trois, ProLogium a déclaré avoir choisi la ville portuaire de Dunkerque, dans le nord de la France, pour sa deuxième gigafactory, qui produira des batteries à grande échelle.

La production devant débuter en 2026, la gigafactory sera la quatrième dans le nord de la France et viendra s'ajouter à un pôle spécialisé émergent au cœur de l'industrie européenne de la voiture électrique.

Actuellement, l'Europe dépend largement des batteries fabriquées en Asie pour les voitures électriques, et les dirigeants nationaux proposent diverses mesures d'incitation pour développer leur propre industrie.

Cette démarche est devenue plus urgente depuis que les États-Unis ont adopté l'année dernière leur loi sur la réduction de l'inflation, d'un montant de 430 milliards de dollars, qui comprend d'importantes subventions fiscales visant à réduire les émissions de carbone tout en stimulant la production et la fabrication nationales.

M. Macron, qui a rencontré le PDG de ProLogium, Vincent Yang, au début du processus de sélection, a annoncé l'investissement de 5,2 milliards d'euros (5,7 milliards de dollars) vendredi à Dunkerque.

Il a également annoncé que le groupe chinois XTC New Energy Materials prévoyait d'investir 1,5 milliard d'euros dans une usine à Dunkerque pour fabriquer des matériaux utilisés dans les batteries, dans le cadre d'une coentreprise avec l'entreprise française Orano.

L'Europe dépend fortement de l'Asie pour l'approvisionnement et la transformation des matières premières utilisées dans les batteries, comme le lithium, le cobalt et le manganèse.

"Nous avons mis en place une politique industrielle pour être compétitifs par rapport à la Chine et aux États-Unis. Les résultats que nous observons à Dunkerque et dans toute la France ne sont pas le fruit du hasard", a déclaré M. Macron depuis l'atelier d'une usine d'aluminium locale.

Gilles Normand, vice-président exécutif de ProLogium, a déclaré qu'après que M. Macron se soit adressé à M. Yang il y a plus d'un an, le ministre des finances, Bruno Le Maire, a aidé à présenter le dossier à la Commission européenne en vue d'obtenir des incitations financières de l'UE.

"On s'est alors rendu compte qu'il pouvait y avoir des possibilités intéressantes", a déclaré M. Normand aux journalistes.

BESOIN D'AUTONOMIE STRATÉGIQUE

M. Macron a déclaré que l'UE s'était ralliée à la pensée française sur la nécessité d'une plus grande autonomie européenne après que le COVID et la guerre en Ukraine ont révélé les vulnérabilités de la chaîne d'approvisionnement.

"Sans compromettre notre ouverture, nous agissons pour protéger nos intérêts, notre indépendance [...] et pour affirmer notre modèle économique et social européen", a écrit M. Macron dans une tribune du Financial Times.

L'offre de ProLogium a également mis en lumière la concurrence féroce entre les États membres de l'UE pour l'obtention de contrats.

La victoire de la France sur l'Allemagne et les Pays-Bas tombe à point nommé pour M. Macron, qui souhaite tourner la page sur des mois de grèves et de manifestations liées à son relèvement de l'âge de la retraite et montrer aux électeurs sceptiques que ses efforts en faveur des entreprises portent leurs fruits.

ProLogium s'attend à ce que le projet crée 3 000 emplois directs et quatre fois plus d'emplois indirects, une aubaine dans une région où les partis politiques d'extrême droite et d'extrême gauche obtiennent de bons résultats auprès des électeurs après des années de déclin industriel.

L'émergence d'un pôle industriel autour des trois usines de batteries déjà en cours de construction était en soi un attrait, offrant une masse critique de fournisseurs de matériaux et de travailleurs qualifiés, a déclaré M. Normand.

L'électricité zéro carbone à prix compétitif, produite par l'un des plus grands parcs de centrales nucléaires au monde, mais aussi de plus en plus par des parcs éoliens en mer et par l'énergie solaire, joue également en faveur de la France.

M. Normand a ajouté que le gouvernement avait adouci l'accord avec un ensemble de mesures incitatives, mais n'a pas donné de détails alors que d'autres subventions sont en cours d'examen par la Commission européenne.

Le gouvernement de M. Macron est impatient d'utiliser le récent assouplissement des règles de l'UE en matière d'aides d'État pour offrir de nouveaux allègements fiscaux et d'autres subventions afin d'encourager les investissements dans les technologies vertes.

Il a annoncé jeudi que le gouvernement offrirait un nouveau crédit d'impôt pouvant atteindre 40 % du capital investi par une entreprise dans des projets éoliens, solaires, de pompes à chaleur et de batteries.

Parallèlement, le gouvernement espère stimuler la demande des consommateurs pour les voitures électriques fabriquées en Europe en accordant une prime de 5 000 euros aux véhicules qui répondent à des normes exigeantes en matière de faibles émissions de carbone dans leur production, ce qui exclut de fait les voitures non européennes.

(1 dollar = 0,9084 euro)