Un an après que le Canada a renforcé les règles relatives aux investissements étrangers dans le secteur des minéraux essentiels, l'argent chinois continue d'affluer dans les sociétés minières cotées à Toronto, selon une étude exclusive menée par l'Université de l'Alberta.

Ce flux entrant fait espérer à certaines petites entreprises minières qu'il sera plus facile de trouver des financements chinois.

Le Canada a contraint trois investisseurs chinois à vendre leurs participations dans des sociétés minières canadiennes d'importance critique en 2022. Certaines de ces sociétés n'avaient pas de mines au Canada.

En octobre 2022, le gouvernement a ajouté un niveau d'examen supplémentaire pour les transactions entrantes dans le domaine des minéraux critiques.

Les changements n'ont pas précisé quels investissements des pays seraient examinés, mais le gouvernement affirme vouloir sécuriser le secteur des minéraux critiques, qui est stratégique pour la sécurité nationale du Canada.

Malgré tout, les mineurs critiques du Canada ont reçu au moins une douzaine d'investissements d'une valeur de 2,2 milliards de dollars canadiens (1,6 milliard de dollars) en 2023 de la part d'investisseurs nouveaux et existants de Chine et de Hong Kong, ce qui représente une augmentation considérable par rapport aux 62 millions de dollars canadiens de 2022, selon les données compilées par l'Institut chinois de l'Université de l'Alberta.

"Ce que vous voyez est la réalité, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de blocus des investissements chinois au Canada... c'est une question de perception", a déclaré Dean McPherson, responsable de l'exploitation minière, TMX Group Ltd.

"Les investisseurs chinois ne craignent pas le risque, ils sont prêts à s'engager et à tenir bon (au Canada)", a ajouté M. McPherson.

Daniel Lincoln, chercheur au China Institute, a déclaré à Reuters que le Canada pourrait avoir du mal à réglementer toutes les acquisitions minières chinoises en dépit des dispositions de la loi sur l'investissement au Canada, en particulier lorsque l'acheteur et le vendeur sont tous deux favorables à la transaction.

Dans un dernier test des nouvelles règles canadiennes, l'entreprise publique chinoise Zijin Mining Group a proposé le mois dernier d'acheter une participation de 15 % dans Solaris Resources Inc. pour 130 millions de dollars canadiens.

Bien que le Canada considère le cuivre comme un minéral essentiel, la transaction devrait être approuvée car les fonds seront utilisés pour développer le projet cuivre-or de Solaris en Équateur, ont déclaré à Reuters deux sources au fait de la transaction.

Solaris et Zijin n'ont pas répondu aux questions posées par Reuters par courrier électronique.

Un porte-parole du ministère de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie a refusé de commenter l'accord avec Zijin, mais a déclaré que le gouvernement devait examiner chaque investissement en fonction de ses mérites afin de s'assurer que le Canada reste ouvert aux investissements étrangers directs nécessaires.

LES ACTIFS EN CUIVRE SONT RECHERCHÉS

Les investisseurs chinois ont été parmi les plus actifs dans l'industrie minière canadienne, investissant 21 milliards de dollars canadiens entre 1993 et 2023, selon les données de l'Institut chinois.

L'année dernière, les entreprises du secteur du cuivre ont été les plus ciblées par les investisseurs chinois. MMG Africa Ventures, une unité de China Minmetals Corp, soutenue par l'État, a acheté une mine de cuivre à Cuprous Capital Ltd, basée à Vancouver, pour 1,7 milliard de dollars canadiens, et Greenwater, basée à Hong Kong, a investi 13 millions de dollars canadiens dans Gowest Gold, selon les données.

Jiangxi Copper Co Ltd a augmenté sa participation dans First Quantum Minerals Ltd de 18,3 % à 18,5 % et la société chinoise a également acheté l'année dernière des billets de premier rang d'une valeur de 20 millions de dollars dans la société canadienne, selon les dépôts réglementaires.

Certaines petites sociétés minières et d'exploration ont fait pression sur le gouvernement canadien pour qu'il autorise davantage d'investissements chinois, en invoquant la difficulté à mobiliser des capitaux.

Dimanche, la société minière chinoise Yintai Gold a accepté d'acheter la société Osino Resources, basée à Vancouver, pour un montant de 368 millions de dollars canadiens. Osino et Yintai n'ont pas répondu à une question de Reuters sur le fait de savoir s'ils cherchaient à obtenir l'approbation du gouvernement canadien pour cette transaction. L'or n'est pas considéré comme un métal critique par le Canada.

Michelle DeCecco, directrice de l'exploitation de Lithium Chile, l'une des trois entreprises auxquelles le Canada a ordonné de se débarrasser de son investisseur chinois, a déclaré à Reuters que la position d'Ottawa ne s'était pas assouplie, car les entreprises trouvent d'autres moyens d'obtenir des fonds chinois.

Peu après que SRG Mining Inc. a reçu une proposition d'investissement de 16,9 millions de dollars canadiens de la part de C-ONE, soutenue par l'entrepreneur chinois Yue Min, la société minière de graphite basée à Montréal a annoncé son intention de changer de pays d'incorporation. Lundi, elle a déclaré qu'elle se constituerait en société à Abu Dhabi Global Markets, tout en conservant sa cotation sur le marché boursier canadien.

SRG Mining n'a pas répondu aux questions posées par Reuters par courrier électronique.

"Malheureusement, il arrive souvent que les entreprises quittent le Canada pour s'éloigner des Cinq Yeux", a déclaré M. DeCecco, en référence au réseau de partage de renseignements qui regroupe les États-Unis, la Grande-Bretagne, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

(1 $ = 1,3522 dollar canadien) (Complément d'information : Julie Zhu à Hong Kong Reportage : Divya Rajagopal Rédaction : Denny Thomas et David Gregorio)