Paris (awp/afp) - Les dirigeants français et italien d'EssilorLuxottica ont conclu un accord pour mettre un terme à leur conflit de gouvernance, leurs directeurs généraux se voyant confier davantage de responsabilités pour dépasser cette crise qui paralysait depuis des semaines le jeune groupe d'optique.

Le PDG et premier actionnaire, Leonardo Del Vecchio, et son vice-PDG délégué, Hubert Sagnières, "délèguent à Francesco Milleri, directeur général de Luxottica, et à Laurent Vacherot, directeur général d'Essilor, la responsabilité de développer et mettre en oeuvre la stratégie et le processus d'intégration d'EssilorLuxottica", a précisé l'entreprise dans un communiqué.

MM. Del Vecchio et Sagnières, dotés en principe des mêmes pouvoirs opérationnels, s'étaient accusés mutuellement ces dernières semaines de vouloir prendre le contrôle des opérations et de violer ainsi les accords signés avant la fusion entre le français Essilor et l'italien Luxottica scellée en octobre 2018.

Le conseil d'administration d'EssilorLuxottica, composé de huit administrateurs désignés par la partie française et huit autres par la partie italienne, s'était retrouvé paralysé par cette lutte de pouvoir.

Cet accord intervient juste avant la prochaine assemblée générale d'EssilorLuxottica, qui doit se tenir jeudi et qui promettait d'être agitée. Il met également "fin à toutes les procédures judiciaires en cours", a annoncé le groupe.

Fin mars, Delfin, la holding de M. Del Vecchio, qui détient 32% du capital du groupe, avait en effet entamé une procédure d'arbitrage devant la Chambre de commerce internationale en vue de "faire constater les violations" des accords par M. Sagnières et EssilorLuxottica "sous son impulsion".

Le camp Essilor a répliqué le mois dernier en saisissant le tribunal de commerce de Paris, lequel a désigné son propre ancien président, Frank Gentin, pour jouer les médiateurs et organiser la défense d'EssilorLuxottica dans cet arbitrage.

"Situation un peu plus apaisée"

Le groupe est désormais à la recherche de son futur directeur général, poste auquel Francesco Milleri et Laurent Vacherot ont annoncé ne pas être candidats.

Par ailleurs, Valoptec, association fédérant des actionnaires salariés et ex-salariés du groupe EssilorLuxottica, qui avait annoncé son intention de proposer la nomination d'un administrateur indépendant supplémentaire, a salué cet accord, et va retirer sa proposition.

"C'est rassurant parce qu'il y aura un minimum d'unité à l'assemblée générale" jeudi, a commenté à l'AFP un analyste parisien, estimant que "si maintenant on a une gouvernance un peu clarifiée (...) c'est bon signe".

"Le premier trimestre avait été rassurant, les chiffres étaient bons", et "si maintenant, la gouvernance rassure à son tour, on retrouve une situation un peu plus apaisée. (...) On va juger ça dans la durée", a-t-il ajouté, sous couvert de l'anonymat.

Les ventes du groupe ont été dynamiques au premier trimestre, avec un chiffre d'affaires de 4,21 milliards d'euros, en hausse de 7,5% en données dites "pro forma", calculées comme si la fusion entre le français Essilor et l'italien Luxottica était effective depuis le 1er janvier 2018, alors qu'elle n'a été réalisée qu'en octobre dernier.

Le processus d'intégration des deux sociétés fusionnées est censé générer de 420 à 600 millions d'euros de synergies annuelles d'ici trois à cinq ans.

Les investisseurs ont réagi favorablement à ce développement lundi, le cours de l'action EssilorLuxottica progressant de 1% à 111,30 euros à la Bourse de Paris, dans un marché en baisse de 0,48% à 11h21.

Le cours avait brutalement décroché le 20 mars lorsque la crise avait éclaté au grand jour, descendant sous la barre de 100 euros, avant de remonter graduellement au cours du mois d'avril.

afp/buc