Paris (awp/afp) - Plusieurs fonds actionnaires d'EssilorLuxottica ont réitéré mardi leur proposition de nommer deux administrateurs indépendants supplémentaires, estimant que le compromis annoncé la veille par le groupe pour résoudre sa crise de gouvernance s'apparente à une trêve plutôt qu'à un armistice.

Les fonds Phitrust et Comgest, associés à Baillie Gifford, Edmond de Rothschild, Fidelity, GuardCap et Sycomore, ont salué "des avancées" mais ils comptent toujours proposer à l'assemblée générale d'EssilorLuxottica de nommer deux administrateurs neutres, l'Américaine Wendy E. Lane et le Danois Jesper Brandgaard, permettant "d'assurer une gouvernance équilibrée", selon un communiqué.

L'accord annoncé lundi par le géant mondial de l'optique "permet de gagner du temps et de relancer les chantiers d'intégration" des activités du nouvel ensemble fusionné. Mais "il n'est pas certain que ce soit de nature à empêcher de nouvelles crises" de gouvernance à l'avenir, a justifié auprès de l'AFP Sébastien Thevoux-Chabuel, analyste et gérant chez Comgest.

"On a peur que les mêmes causes puissent engendrer les mêmes effets", a-t-il ajouté, évoquant les cultures d'entreprises "très différentes" du français Essilor et de l'italien Luxottica.

Le conseil d'administration du groupe est actuellement composé de 16 membres, désignés pour moitié par Essilor et pour l'autre moitié par Luxottica.

Cet équilibre avait paralysé son activité ces dernières semaines, sur fond de vives tensions entre le PDG et principal actionnaire du groupe Leonardo Del Vecchio, fondateur de Luxottica, et son vice-PDG délégué Hubert Sagnières, ancien PDG d'Essilor. Tous deux s'accusaient mutuellement de vouloir prendre le contrôle du groupe, en violation des accords prévoyant une fusion entre égaux.

L'accord sur la gouvernance annoncé lundi par EssilorLuxottica prévoit notamment de déléguer des responsabilités opérationnelles à Laurent Vacherot et Francesco Milleri, respectivement patrons d'Essilor et de Luxottica.

Cet accord met aussi un terme à toutes les procédures judiciaires en cours, y compris l'arbitrage devant la Chambre de commerce internationale initié en mars par Delfin, la holding de M. Del Vecchio.

Dans la foulée de ce compromis, Valoptec, association fédérant des actionnaires salariés et anciens salariés d'EssilorLuxottica, a renoncé à proposer la nomination d'un autre administrateur indépendant et s'est désolidarisé des démarches similaires portées par Comgest, Phitrust et leurs alliés.

Ces propositions ont peu de chances d'aboutir, nécessitant au moins 50% des suffrages à l'Assemblée générale et n'ayant pas le soutien du conseil d'administration du groupe. Mais même minoritaire, un vote relativement important enverrait un message d'avertissement que le conseil "pourrait difficilement ignorer", selon M. Thevoux-Chabuel.

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