Washington (awp/afp) - Hausse galopante des prix des voitures et autres produits du quotidien: l'inflation pourrait faire un retour par la grande porte aux Etats-Unis avec le plan de relance de Joe Biden, ce qui inquiète les marchés, mais ces craintes sont balayées par le gouvernement et le FMI.

Quasi-absente du paysage depuis des années, l'inflation pourrait venir réduire le pouvoir d'achat des consommateurs américains.

En cause, les 1.900 milliards de dollars que Joe Biden veut injecter dans l'économie, sous forme, entre autres, de chèques aux ménages les moins aisés, ou d'allocations chômage plus généreuses.

La cheffe économiste du Fonds monétaire international (FMI) Gita Gopinath a balayé vendredi ces craintes.

Elle estime que même avec une enveloppe d'aides aussi élevée, il est "peu probable" que l'inflation s'établisse de façon durable au-dessus de l'objectif de 2% annuels que vise la Banque centrale américaine (Fed).

Autrement dit, les Américains paieront un peu plus cher certains produits, mais de façon temporaire.

L'inflation s'est établie à 1,3% en 2020, et devrait tourner autour des 2,25% en 2022, "ce qui n'a rien d'inquiétant", a encore noté Gita Gopinath. En revanche, le plan de relance pourrait faire grimper le PIB américain de 5% à 6% sur trois ans.

"C'est un risque" ___

La mondialisation limite en effet la hausse des prix des biens "et même de certains services" aux Etats-Unis, détaille-t-elle.

Par ailleurs, le recours à l'automatisation réduit les coûts pour les entreprises qui n'ont donc pas forcément besoin d'augmenter les prix, souligne encore Mme Gopinath, d'autant plus que les grands groupes qui ont des marges élevées peuvent trouver d'autres leviers qu'une hausse de leurs tarifs.

Le plan de relance de Joe Biden, qui devrait être bientôt voté au Congrès, serait le deuxième plus important de l'histoire du pays, après celui de 2.200 milliards de dollars adopté fin mars 2020 face à la pandémie.

La nouvelle secrétaire au Trésor, Janet Yellen, n'a de cesse de le défendre, insistant sur les risques moins grands à faire trop plutôt que pas assez.

"L'inflation est très faible depuis plus d'une décennie. C'est un risque, (...) face auquel la Réserve fédérale et d'autres ont des outils", a-t-elle déclaré jeudi sur la chaîne CNBC.

"Le plus grand risque est celui que cette pandémie provoque une cicatrice durable chez les gens", a martelé la ministre des Finances de Joe Biden.

Avec le mini boom économique attendu cet été lorsqu'une large partie de la population aura été vaccinée contre le Covid-19, de nombreux secteurs auront du mal à répondre à la forte demande, ce qui fera grimper les prix.

Cette inflation pourrait même, dans les scénarios pessimistes, aboutir à une nouvelle récession, liée à un ralentissement de la consommation.

Que fera la Fed? ___

"Je ne suis pas vraiment préoccupé par une relance ou un soutien budgétaire excessif à l'heure actuelle", a ainsi commenté le président de la Fed de New York, John Williams, notant qu'à "l'heure actuelle, l'économie est toujours au plus bas".

"Ce que je veux voir, c'est une économie qui retrouve sa pleine vigueur le plus tôt possible, évidemment dans le contexte d'atteindre l'objectif d'inflation à 2%", a-t-il ajouté, interrogé sur la chaîne CNBC.

Une trop forte hausse des prix pourrait pousser la Fed à relever les taux d'intérêt pour ralentir l'emballement. Les banques commerciales répercuteraient alors ces hausses sur les crédits qu'elles accordent à leurs clients, freinant la consommation, moteur de l'économie américaine, voire le marché immobilier.

Mais la Banque centrale a récemment entamé un virage, estimant qu'un retour à 2% d'inflation passera sans doute par une hausse des prix supérieure à l'objectif mais momentanée, ne nécessitant pas de hausse des taux.

Ces craintes ont néanmoins fait grimper vendredi les taux sur les bons du Trésor à 10 ans à leur plus haut niveau depuis un an.

En effet, leur revenu fixe peut être rogné par l'inflation, ce qui conduit certains investisseurs à vendre leurs obligations. Cela fait grimper le rendement de ces bons qui évolue à l'inverse de leur prix.

Les inquiétudes s'étaient accrues cette semaine, car les ventes au détail, reflet de la consommation, ont bondi en janvier, grâce au plan d'aides de 900 milliards de dollars adopté fin décembre, et les prix de gros payés par les fabricants ont signé leur plus forte hausse depuis le début du suivi de cet indicateur en décembre 2009.

afp/rp