Mauvaises surprises

Les annonces des sociétés peuvent prendre deux formes lorsqu'il s'agit d'annoncer une révision en baisse de leurs objectifs. Soit elles communiquent en amont de la date officielle d'annonce de leurs publications périodiques, soit elles profitent de ladite publication pour ajuster leurs projections.

Ce matin, nous avons deux illustrations d'une communication spécifique avec Euroapi et Maisons du Monde.

L'ancienne filiale ingrédients de Sanofi a sombré de plus de 60% ce matin à sa reprise de cotation, après avoir réduit ses prévisions et renoncé à ses objectifs de moyen terme. Le dossier avait déjà beaucoup déçu ces derniers mois, surtout au regard de sa courte vie boursière. Il semblait de retour sur les rails après une reprise en mains, mais c'est une nouvelle déception, et de taille. Il faudra du temps avant de restaurer la confiance du marché, même si la gifle du jour est assez incroyable, mais à l'image de ce qui s'est passé sur Alstom la semaine dernière.

Autre avertissement, celui de Maisons du Monde, qui perd 4,5% en matinée, une peccadille par rapport à Euroapi, le nouveau couteau qui tombe. Il faut dire que le dossier avait déjà pris une bonne estocade la semaine dernière, quand TP ICAP Midcap avait abaissé de conserver à vendre sa recommandation. L'analyste Florent Thy-tine avait eu du pif en écrivant "Maisons du Monde publiera son T3 à la fin du mois, que nous jugeons à risque avec une possible remise en cause de la guidance selon nous". L'action avait plongé de 15% à cette annonce. Il n'aura pas fallu attendre la fin du mois pour que la société se fende d'un avertissement. Pour autant, TP ICAP Midcap est désagréablement surpris par l'abaissement marqué de la prévision d'EBIT, qui va au-delà de ce qu'il redoutait. L'objectif de cours est ajusté en conséquence de 6,70 à 5,80 EUR. Maisons du Monde a perdu plus de la moitié de sa valeur depuis le 1er janvier. En cause, l'environnement de consommation qui se dégrade en Europe.

Pour info, il y a une rubrique Profit Warning sur Zonebourse, qui recense les dépêches et les articles portant sur des avertissements.

Bonnes surprises (et mauvaises aussi)

UBS a développé il y a quelques années un modèle multifactoriel basé sur les commentaires d'analystes pour identifier des actions qui bénéficient de solides fondamentaux et d'un potentiel de dépassement des attentes. La banque revendique un alpha annualisé de 11% avec cette méthode sur une période longue. Pour la période actuelle, 14 actions répondent aux critères : UniCredit, Bic, Banco Santander, Atlas Copco, Banco de Sabadell, International Consolidated Airlines, BCP, BBVA, Intesa Sanpaolo, Ryanair, ABN Amro, Legrand, Azimut et Rockwool.

UBS propose aussi un modèle fondé sur les données et l'apprentissage machine. Pour la faire simple, la banque croise des données de courtage sur les positions longues et courtes, qu'elle croise avec une estimation de bénéfice par action générée par de l'apprentissage automatique et les données du consensus. Objectif, identifier des actions qui sont hors cadre. Précision utile : la machine est en moyenne meilleure que les analystes, en particulier lorsque les bénéfices sont en baisse. Et que dit la machine ? Que Philips, Universal Music, Sagax, Fastighets, Fresenius Medical Care, Fortum, Grifols, BASF, Vonovia, Continental et Nexi ont de bonnes chances de surprendre positivement alors qu'elles sont notoirement délaissées par le marché en ce moment.

Evidemment, l'exercice marche aussi en négatif. L'analyse humaine pousse à la prudence sur CCC, Siemens Energy, Nordic Semiconductor, Boliden, Norsk Hydro, Fineco, Salzgitter, Intrum et KGHM. Quant à la machine, elle alerte sur ABB, Equinor, NatWest, ING Groep, Scout24, AstraZeneca, National Grid et Tate & Lyle.

Les plus sagaces d'entre vous auront noté que l'humain et la machine n'ont aucune action en commun, que ce soit dans le camp des bonnes surprises potentielles ou dans celui des mauvaises nouvelles hypothétiques.

Rappel (utile) sur les règles de publication de résultats

C'est de saison, il est peut-être utile de rappeler les règles qui régissent la publication des résultats des entreprises.

Les sociétés sont poussées à publier en dehors des heures de cotation

Il ne s'agit pas d'une obligation, mais l’AMF recommande aux émetteurs de prendre toutes mesures nécessaires afin de s’abstenir de divulguer des faits nouveaux importants pendant les heures de bourse (entre 9h00 et 17h30 sur Euronext). C'est le cas des communiques de résultats par exemple.

Les règles pour les publications trimestrielles, semestrielles ou annuelles sur le marché réglementé :

  • Le rapport financier annuel doit être publié dans les quatre mois suivant la clôture d'un exercice (i.e. avant le 30 avril N+1 pour les sociétés clôturant au 31 décembre N). Toutefois, l’AMF recommande aux sociétés cotées sur un marché réglementé de publier dès que possible après la clôture de l’exercice et au plus tard sous 60 jours l’information sur le chiffre d’affaires annuel de l’exercice écoulé, à défaut d’avoir publié leurs résultats annuels à cette date. La France fait partie des pays où les sociétés publient parfois d'abord leur chiffre d'affaires seul, puis plus tard leurs résultats. Beaucoup d'autres pays, notamment anglo-saxons, publient chiffre d'affaires et résultats en même temps.
  • Le rapport financier semestriel doit être publié dans les trois mois suivant la fin du semestre concerné pour les sociétés cotées sur le marché réglementé (30 septembre au plus tard pour les sociétés bouclant leur premier semestre au 30 juin).
  • Le rapport trimestriel n'est pas obligatoire. Les sociétés cotées sur le marché réglementé se plient dans leur très grande majorité à l'exercice, mais il n'est pas obligatoire. L'AMF recommande toutefois aux sociétés qui publient des mises à jour trimestrielles de s'astreindre au même formalisme que pour les obligations annuelle et semestrielle.
  • Voilà pour la théorie. En pratique, il faut noter que les principales sociétés cotées en France publient dans des laps de temps bien plus court, qui ressemble à peu près à ça : 
    • Dès le mois suivant la clôture pour les chiffres trimestriels (en avril et en octobre donc).
    • Entre le 10 juillet et le 10 août pour les chiffres semestriels
    • Entre la dernière semaine de janvier et le début mars pour les chiffres annuels

Les règles sur les marchés non-réglementés

Sur ce type de marché, les règles sont allégées :

  • Sur Euronext Growth, les sociétés doivent publier leurs résultats annuels et semestriels dans les quatre mois suivant la fin de l'exercice ou du semestre.
  • Sur Euronext Access +, seule la publication des résultats annuels sous quatre mois est obligatoire.
  • Sur Euronext Access (ex-Marché Libre), il n'y a pas d'obligation de publication.

Les informations précises sur les marchés réglementés sont disponibles ici, et celles sur les autres marchés sont là.

Pour information, j'ai compté 244 dates de publication de sociétés françaises pesant plus de 100 M€ sur le T3 sur l'agenda Zonebourse. Environ la moitié des entreprises concernées, notamment les plus grosses, publient sur la seconde quinzaine d'octobre. Si vous avez bien suivi ce qui précède, vous savez maintenant que cette publication trimestrielle n'est PAS obligatoire, mais que la plupart des sociétés se plient à l'exercice, avec une certaine discipline, comme le montre la répartition précise de leur date de publication pour l'exercice clos le 30 septembre : 

  • 5% des sociétés publient entre le 1er et le 13 octobre.
  • 19% des sociétés publient entre le 16 et le 20 octobre.
  • 33% des sociétés publient entre le 23 et le 27 octobre.
  • 9% des sociétés publient entre le 30 octobre et le 3 novembre.
  • 18% des sociétés publient entre le 6 et le 10 novembre.
  • 16% des sociétés publient après le 13 novembre.