(Répétition sans changement d'une dépêche transmise vendredi)

* La Fed et l'inflation en zone euro ont marqué la semaine

* PPI et CPI américains au menu des jours à venir

* Interrogations sur la poursuite de la hausse du dollar

* Les tensions commerciales et l'Iran en toile de fond

* Les résultats globalement positifs en Europe

par Marc Angrand

PARIS, 7 mai (Reuters) - Occultées un temps par les craintes de guerre commerciale et les tensions géopolitiques, les perspectives d'inflation sont revenues par surprise au premier plan des préoccupations des investisseurs, une situation qui risque de perdurer aux Etats-Unis comme en Europe.

Après une semaine et demie marquée par la hausse du rendement américain à dix ans à 3% et par l'appréciation du dollar sur fond de remontée des anticipations d'inflation, le doute a repris le dessus avec les déclarations moins déterminées qu'attendu de la Réserve fédérale puis le chiffre inférieur aux attentes des prix à la consommation dans la zone euro.

La Fed a certes laissé mercredi la porte ouverte à une hausse de taux en juin, un scénario déjà très largement anticipé, et elle a relativisé les récents signes de ralentissement de la croissance et de l'emploi, mais son choix de rappeler que l'inflation pourrait évoluer autour de son objectif de 2% à moyen terme a semé le trouble chez certains.

Pour beaucoup, le discours de la Fed sur l'inflation a suggéré que la banque centrale ne s'inquiétait pas outre mesure des signes de reprise de l'inflation et qu'elle continuerait de relever ses taux, mais pas de manière plus rapide qu'anticipé.

Cet optimisme relatif, là où le marché redoute plus clairement une accélération de la hausse des prix, a alimenté les doutes sur la trajectoire de l'inflation.

Cet accès de doute s'est prolongé vendredi après les chiffres mensuels de l'emploi américains, les créations de postes et la hausse du salaire horaire moyen ressortant sous les attentes des marchés.

Conséquence: un coup de frein à la remontée du dollar, l'indice mesurant l'évolution du billet vert face à un panier de six autres grandes devises s'étant stabilisé autour de ses niveaux de la fin décembre après une remontée de 4% depuis un point bas touché mi-avril.

La réaction a été nette sur le marché des emprunts d'Etat, le rendement à dix ans américain amplifiant son repli pour revenir sous 2,92% tandis que le dix ans allemand retombait vers 0,52%, un plus bas de deux semaines.

DÉCISIONS DÉLICATES POUR LA BANQUE D'ANGLETERRE

La semaine à venir devrait apporter de nouveaux éléments de réponse à ceux qui s'interrogent sur la pérennité de ce "retour" du dollar, avec la publication des chiffres des prix à la production (PPI, mercredi) et à la consommation (CPI, jeudi) aux Etats-Unis.

Le rebond du billet vert, qui a pris par surprise le marché, reste néanmoins alimenté par le thème de la divergence monétaire, alors que les grandes banques centrales, dont la Banque centrale européenne (BCE), tardent à suivre la Fed dans le resserrement de leur politique monétaire.

Les chiffres d'Eurostat faisant état, jeudi, d'un ralentissement de la hausse des prix dans la zone euro le mois dernier - à 1,2% seulement en rythme annuel et même 0,7% pour l'inflation sous-jacente - ont encore renforcé la perspective d'une normalisation très progressive de la BCE.

De son côté, la Banque d'Angleterre (BoE) publiera jeudi son rapport trimestriel sur l'inflation au terme d'une réunion qui devrait se solder par le maintien de son taux directeur, faute d'indicateurs économiques suffisamment solides pour justifier le resserrement anticipé il y a quelques semaines encore.

"L'important sera de voir jusqu'où la Banque d'Angleterre décidera d'abaisser ses prévisions d'inflation", expliquent les économistes de Mizuho.

"Si la Banque présente une prévision d'inflation inférieure à l'objectif suggéré par les taux de marché, cela impliquera que, même limitées, les anticipations de hausse de taux du marché pourraient se révéler excessives."

AVANTAGE AUX ACTIONS EUROPÉENNES

Pour les marchés actions, l'évolution des taux et des devises reste évidemment déterminante, et d'autant plus au coeur d'une saison de résultats marquée par l'impact des taux de change.

Un impact nettement favorable à l'Europe jusqu'à présent: entre le 2 avril et le 2 mai, alors que le Standard & Poor's 500 américain ne progressait que de 2,08%, le Stoxx 600 européen s'est adjugé 4,98%, le Dax à Francfort près de 6% et le CAC 40 7,31%.

L'indice parisien a ainsi atteint mercredi, à 5.538,73 points, son plus haut niveau depuis le 29 janvier, avant le mouvement de correction (-8% en neuf séances) qui a marqué le mois de février.

"En avril, l'EuroStoxx a nettement surperformé le S&P 500 malgré un 'momentum' de bénéfices nets par action clairement plus favorable de l'autre côté de l'Atlantique après les premiers résultats du premier trimestre", constate Invest Securities.

"Les marchés européens sont désormais vus comme plus sûrs (et moins volatils), avec à la clé une réduction sensible de la décote en matière de valorisation (9% sur le PE prospectif vs 18% fin 2017)."

De son côté, Deutsche Bank note que si la croissance annuelle des bénéfices par action européens est tombée à zéro au premier trimestre, elle est moins mauvaise qu'attendu.

L'IRAN, FACTEUR DE RISQUE SUPPLÉMENTAIRE

"La France et le Royaume-Uni ont enregistré de solides bonnes surprises jusqu'à présent alors que l'Allemagne constitue la plus grosse déception", ajoute la banque, qui met aussi en avant l'impact possible des changes sur le consensus.

"Si l'euro devait retomber à ses niveaux de fin 2017 (1,5% en dessous de son niveau actuel), cela relèverait notre prévision de croissance des bénéfices (pour 2018) à environ 7%, près du consensus", précise-t-elle.

Parmi les publications à surveiller dans les jours à venir figurent celles de Siemens, AB InBev, EDF , LafargeHolcim et ArcelorMittal en Europe, Toyota et Nissan au Japon ou encore Walt Disney aux Etats-Unis.

Parallèlement, Wall Street et les autres grandes places boursières continueront de surveiller l'évolution des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, un dossier dans lequel les discussions de Pékin jeudi et vendredi n'ont débouché sur aucune avancée marquante.

"Des mouvements de marché exagérés avec l'escalade des tensions ces dernières semaines suggèrent que les investisseurs pourrait attacher une importance excessive à la probabilité d'une guerre commerciale ouverte", estime pourtant Oxford Economics.

D'autant qu'un autre foyer de tension géopolitique risque de se raviver si Donald Trump choisit de dénoncer l'accord international de 2015 sur le nucléaire iranien, une décision qu'il doit annoncer au plus tard le 12 mai.

Une dénonciation de l'accord pourrait ouvrir la voie à de nouvelles sanctions contre Téhéran, avec pour effet probable un coup de fouet aux cours du pétrole.

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(Edité par Blandine Hénault)